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Les critiques de Bifrost

Le Marteau de Dieu

Le Marteau de Dieu

Arthur C. CLARKE
J'AI LU
256pp -

Bifrost n° 102

Critique parue en avril 2021 dans Bifrost n° 102

Publié en 1993, Le Marteau de Dieu est une version étendue d’une nouvelle parue dans le magazine Time l’année précédente. Et le moins que l’on puisse dire est que le procédé est douloureusement visible et maladroit ! L’intri­gue est supposée parler de la menace vitale que constitue Kali, un astéroïde détecté en 2109 par le programme de surveillance Spaceguard (un postulat de base qui rappelle celui de Ren­dez-vous avec Rama, ce à quoi il convient d’a­jouter deux éléments recyclés de 2001 et 2010), ainsi que de la mission menée par le capitaine Singh pour le dévier de sa trajectoire, mais le roman débute en nous parlant du passé du protagoniste, l’astéroïde n’étant abordé, quand on y pense, que de façon pres­que marginale durant les deux premières parties du livre. Il faut même attendre plus du tiers pour que l’histoire de la découverte de Kali soit relatée. On a la nette impression que l’astéroïde n’est pas le principal sujet de l’ouvrage, un comble !

Pendant ce temps, l’auteur s’étend à n’en plus finir sur l’existence (peu passionnante) de son protagoniste, et tente de nous dépein­dre les changements sociétaux, technologiques ou autres qui ont eu lieu au XXIe siècle et au début du XXIIe. C’est un échec : ce qui n’est pas du cent fois vu, en mieux qui plus est, chez Clarke ou d’autres, nécessite parfois un considérable degré de suspension de l’incrédulité, comme avec l’hypothèse de départ, rien moins qu’absurde, de la formation d’un syncrétisme chrétien/islamique. Ce qui est d’autant plus grave qu’il a un certain rôle à jouer dans l’intrigue ! Les parties consacrées à l’astéroïde sont d’une faiblesse intolérable pour un auteur de hard-SF du calibre de Clarke, sans compter une absence quasi-totale de dramaturgie inacceptable dans ce genre de SF apocalyptique (les pro­blèmes se règlent pratiquement aussi vite qu’ils apparaissent !).

La structure inutilement bavarde et aérée de l’ensemble se conjugue à un patchwork de chapitres n’ayant rien à voir avec ceux qui forment l’intrigue principale et insérés n’importe comment entre eux. Avec la faiblesse de tous les aspects traités, cela aboutit à un roman dispensable, surtout chez un romancier tel que Clarke, qui a produit tant d’autres livres intéressants voire incontournables. Et ce d’autant plus que dans la thématique de l’astéroïde tueur, d’autres (à com­mencer par Benford et Rostler avec Shiva le destructeur, dont on se demande d’ail­leurs si Clarke ne s’en est pas inspiré) ont fait bien mieux.

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