Curieuse idée qu'ont eue les éditions l'Atalante en publiant un Eschbach pour enfants… Une idée d'autant plus étrange que Le Projet Mars ressemble plutôt à un mauvais livre pour adultes qu'à un bon livre pour enfants. Un roman médiocre dont même l'éditeur se fiche, dans la mesure où il orthographie mal le nom de l'auteur sur la tranche, ce qui met toujours à l'aise.
Bref, si Eschbach produit habituellement de bonnes choses, gageons que Le Projet Mars n'est qu'une mauvaise passe alimentaire. Faire un livre pour enfant n'est hélas pas si simple, nos chers bambins ayant horreur qu'on les prenne pour des idiots…
Sorte de Club des Cinq sur la planète rouge, Le Projet Mars relate les aventures de quatre mômes élevés sur Mars, au sein de la colonie scientifique installée depuis déjà 36 ans sur l'astre mort. La vie est assez agréable, la pesanteur réduite et le terrain de jeu immense. Cachettes, petits secrets et rêveries forment le quotidien des quatre gamins, tous parfaitement habitués à vivre sous coupole et dont le scaphandre est une sorte de seconde peau.
Mais c'est sans compter le changement radical de politique terrestre à l'égard d'une colonie onéreuse, sans grand intérêt scientifique proprement dit. Bref, il va falloir évacuer, et vite, afin que cesse ce gaspillage. Mais pour les « enfants de Mars », pas question de revenir sur Terre, planète surpeuplée qu'ils n'ont jamais connue et dont ils se foutent éperdument. D'autant qu'Elinn, la plus jeune, souffre d'une malformation qui rendrait sa vie impossible sous la pesanteur terrienne. Il est donc temps d'élaborer une stratégie de résistance, en bonne intelligence avec l'ordinateur central, et même en compagnie des Chinois de la station voisine, pour gagner du temps et grappiller quelques mois supplémentaires. Après 250 pages de considérations diverses, Eschbach aborde enfin le réel sujet de son livre, celui-là même qui donne son piment à la quatrième de couverture : Elinn est persuadée que les martiens existent. Et si elle avait raison ? Le lecteur s'en doute, elle a raison, avec en prime une découverte archéologique hallucinante dans les dernières pages. Bref, au moment où l'histoire démarre enfin, Eschbach conclut. Abrupt.
Au final, Le Projet Mars ne présente donc aucun intérêt. Si l'intention est louable et les bonnes idées nombreuses, le sujet n'est jamais vraiment traité et le lecteur lit le roman entre les lignes, dans l'attente vaine d'une révélation qui n'arrive jamais. Propice au questionnement métaphysique le plus intense (eh oui, même les gamins se posent des questions, une règle à ne jamais oublier quand on tente d'écrire un livre pour enfants), le scénario donne l'impression d'un roman bâclé, classé « littérature jeunesse » pour atténuer un peu sa médiocrité. Une déception donc, ce qui ne nous empêchera nullement de nous précipiter sur le prochain Eschbach en toute innocence.