« Voici un volume où se réunissent le génie narratif d'un Kipling et le sens de l'horreur d'un Edgar Poe, quoique les récits de Morrow soient une chose si neuve qu'il est inutile d'y chercher des comparaisons. » Alfred Jarry, in la Revue Blanche, premier août 1901.
Avec les quatorze textes courts (rarement plus de quinze pages) de ce recueil peuplé de monstres de foire et ensanglanté par diverses mutilations ou expériences chirurgicales délirantes, William Chambers Morrow dresse un pont entre l'œuvre de Poe (qui, comme chacun sait, était inspirée principalement par d'authentiques faits divers) et celle de Lovecraft, qu'il est (du moins, je l'espère) inutile de présenter en ces pages.
Parmi les textes les plus marquants de ce recueil, on signalera principalement « Le Faiseur de monstres », une histoire de chirurgien fou habitant une maison gigantesque avec sa femme et le produit d'une de ses expériences ; « Un Stylet » où un homme poignardé est sauvé d'une mort certaine par un chirurgien ingénieux ; « Un irréductible ennemi » où un serviteur privé de ses bras et jambes décide de se venger du rajah ayant ordonné ses mutilations. Et puis « Deux hommes singuliers », qui semble avoir servi de base scénaristique au Freaks de Tod Browning.
William Chambers Morrow (1854-1923), journaliste et frère spirituel d'Ambrose Bierce, n'a certes pas écrit son Dictionnaire du diable, mais les nouvelles réunies ici valent franchement que vous vous y attardiez, d'autant plus qu'elles sont d'une étonnante modernité stylistique .
Par ailleurs, on signalera une fois de plus le travail remarquable des éditions Phébus, qui nous proposent un ouvrage doté d'une passionnante préface d'Eric Dussert et d'appendices bibliographiques fort appréciables.
Une publication remarquable en tous points.