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Les critiques de Bifrost

Le Verrou du fleuve

Lionel DAVOUST
CRITIC
23,00 €

Critique parue en juillet 2018 dans Bifrost n° 91

Si vous n’avez pas encore lu La Messagère du ciel, passez d’emblée à la critique suivante. Le Verrou du fleuve, sa suite directe, reprend là où le premier tome s’est arrêté, et cette chronique est susceptible de divulguer des éléments propres à gâcher la lecture de l’opus initial. Deux siècles après l’effondrement de l’empire d’Asrethia, le dieu Aska s’est choisi un prophète, Ganner, a levé une armée de monstruosités et marche, invaincu, sur le royaume de Rhovelle. Pour le contrer, son frère Wer s’est trouvé un Héraut en la personne de Mériane, paria et femme. Convaincre le clergé qu’elle est sa Messagère relève d’une mission impossible. Et faire d’elle la sauveuse de la ville de Loered, surnommée le Verrou du Fleuve (réputée imprenable grâce à ses sept enceintes fortifiées) et assiégée par l’Éternel Crépuscule d’Aska, semble encore plus illusoire. Avant de défaire les Askalites, il lui faudra gagner le cœur des hommes à la raison aveuglée par le poids des traditions et des préjugés. Et convaincre des prêtres pétris de certitudes renforcées par une foi parfois extrême. Pendant qu’elle chemine à la tête d’une maigre colonne de ravitaillement vers Loered, la ville tient le siège, sous le commandement du vaillant mais âgé duc Thormig. La cité attend la charge de l’armée ennemie et, sous une pluie sans fin, le découragement gagne les troupes. Il faut pourtant que le Verrou tienne.

Comme dans le premier tome, la narration multiplie les points de vue, délaissant souvent les pérégrinations de Mériane au profit des événements autour et dans Loered, sans pour autant en oublier les arcs secondaires. L’arrivée de nouveaux personnages ouvre d’autres pistes. Le chroniqueur attaché au pas de Mériane montre ainsi que les faits importent moins que la manière dont ils vont être mis en scène et racontés. On devine que chaque intrigue de palais, chaque décision, chaque action de tous les protagonistes, même celui qui n’a pour l’instant que peu d’importance, peut peser sur le destin du monde. Il en résulte une ambiance générale et un ton plus sombres et plus sanglants, très différents du premier opus. Lionel Davoust restitue avec précision et minutie les combats, les batailles accompagnées du souffle de la mort, et parvient à retranscrire avec force l’attente qui ronge les âmes et le désespoir qui empoisonne lentement. Au bout des cinq cents pages, l’issue finale n’est pas encore connue. Le deuxième tome de la série, trop imposant, s’est vu coupé en deux. La trilogie initiale cède donc la place à une tétralogie. La semi-fin du Verrou du fleuve laisse le lecteur dans l’expectative et dans l’attente du tome suivant tout en lui évitant la frustration d’un cliffhanger trop brutal. Une petite remarque, pour l’éditeur cette fois : il manque parfois des espaces entre les mots et la récurrence du problème trouble la lecture.

Karine GOBLED

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