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Les critiques de Bifrost

Les Armées de ceux que j’aime

Ken LIU
LE BÉLIAL'
128pp - 11,90 €

Critique parue en janvier 2025 dans Bifrost n° 117

Comment ça, un recueil ? La promesse de la collection « Une heure-lumière » n’était-elle pas d’offrir un texte court à chaque nu­méro : texte allant de la très grosse nouvelle au quasi-roman ? Et de faire découvrir une nouvelle facette d’un auteur, contemporain ou appartenant au patrimoine (ver­sion éditorialement pudique de « ancien ») ? Alors comment se fait-il que Les Armées de ceux que j’aime ne propose pas un texte, mais bien deux de Ken Liu qui a, de plus, déjà eu par trois fois les honneurs de cette collection (L’Homme qui mit fin à l’histoire, Le Regard et Toutes les saveurs) ? Pour ce cadeau bonus, grâces en soit rendues à Amazon via sa filiale de livres audio Audible. Dite filiale qui, première éditrice du récit original de Ken Liu, ne voulait pas en lâcher les droits pour une traduction papier en soli­taire. L’auteur y a donc tout naturellement adjoint un court texte pour contourner son contrat initial. Et c’est son public français qui se régale de ce tour de passe-passe juridique. Et découvre ici le versant poète de Ken Liu.

La novella qui ouvre le livre, « Les Armées de ceux que j’aime » est fortement inspirée du poème de Walt Whitman, « Je chante le corps électrique » dans son recueil Feuilles d’herbes. Non seulement le poème est largement cité, mais cette histoire post-apocalyptique douce-amère de villes errantes et d’humains accrochés à leur flanc ayant per­du leur science et leurs « rêves » fait écho aux vers du poème. Comme avec « The Gods Will Not Be Chained », « The Gods Will Not Be Slain » et « The Gods Have Not Died in Vain » — trois nouvelles au sommaire du recueil Hidden Girl and Other Stories ayant inspirées la série Pantheon sur AMC+ —, Ken Liu y explore les limites de l’humanité une fois reliée à la machine, que ce soit au niveau individuel ou au niveau de la collectivité. Quitte à nous offrir quelques mo­ments de body horror que ne renierait pas un David Cronenberg au sommet de sa forme. Le second récit, « Alter », assez bref, est une manière de poème en vers libres et prose, une rêverie — qui tourne parfois au cauchemar, Ken Liu ne pouvant s’en empêcher — sur des avenirs possibles pour l’humanité. Et le tout forme un ensemble étrangement cohérent et apaisant.

 

 

 

Stéphanie CHAPTAL

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