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Les critiques de Bifrost

Les Aventures du pilote Pirx

Stanislas LEM
ACTES SUD
432pp - 23,00 €

Critique parue en octobre 2021 dans Bifrost n° 104

Première traduction française inédite de Lem en plus de trente ans, le recueil Les Aventures du pilote Pirx rassemble les dix nouvelles que l’auteur a consacrées à son personnage récurrent entre 1959 et 1971 – douze années lors desquelles la conquête de l’espace a fait des bonds de géants.

Dans un futur indéterminé, possiblement le XXIIe siècle, l’humanité a commencé à s’installer de par le Système solaire, voire au-delà. L’âge des pionniers a pris fin, mais il faut toujours des gens pour piloter les fusées. Pirx est de ceux-là. D’abord cadet de l’espace formé à l’astronavigation sur la Lune, puis pilote chevronné un brin blasé, Pirx est, en dépit d’un nom qui claque, surtout un gars normal, pas spécialement brillant, mais doué dès le départ d’un esprit pratique (« Le Test »). C’est cet esprit qui va lui permettre de comprendre et résoudre plusieurs problèmes ayant causé la mort de collègues (« La Patrouille », « Le Réflexe conditionnel »). À quelques reprises, il s’agit pour lui d’éviter une catastrophe (« L’Albatros », « Ananké »). On le sait, le vide de l’espace ne pardonne pas ; avaries et autres bugs ont très souvent une issue fatale. Dans le futur imaginé par Lem, les erreurs sont parfois d’origine mécanique, mais le plus souvent humaine. Au fil des nouvelles, on y croise quelques robots. D’abord tas de ferraille mais potentiellement hantés (« Terminus ») ou sujets à de gros dysfonctionnements (« La Traque »), on les voit progresser jusqu’à développer des capacités humaines (« L’Accident », et surtout « Le Procès », où Pirx doit déterminer qui, de son équipage, est un androïde « non-linéaire » et qui est humain).

Membre d’une génération perdue, Pirx est un héros désabusé. Au bout du compte, l’espace, c’est barbant — même si des surprises venues d’ailleurs demeurent possibles (« Le Récit de Pirx »). Lem, de moins en moins intéressé par la conquête de l’espace alors qu’il vieillissait, sait faire ressentir l’ennui de l’âge spatial. Immersives et mélancoliques, les dix nouvelles ont l’éclat dur du régolithe sous la lumière du soleil, avec un souci de réalisme marqué, et si certains détails techniques accusent le poids des ans, l’ensemble reste d’une lecture recommandable.

Erwann PERCHOC

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