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Les critiques de Bifrost

Les Cieux découronnés

Les Cieux découronnés

Tim POWERS
J'AI LU
247pp - 6,00 €

Bifrost n° 13

Critique parue en avril 1999 dans Bifrost n° 13

Face au succès de Tim Powers, l'un des chefs de file du mouvement steampunk, J'ai Lu a visiblement décidé de publier ses œuvres de jeunesse — Les Cieux découronnés, datant le 1976, étant d'ailleurs le tout premier roman qu'il ait écrit. Avec ses amis, K. W Jeter et James Blaylock, Powers fréquentait Philip K. Dick, auteur qui n'est pas resté sans influence sur sa (leur) vocation. Aussi, le lecteur sera certainement surpris de l'absence, dans Les Cieux découronnés, de la thématique dickienne à laquelle il pourrait s'attendre. L'inspiration de ce premier roman étant incontestablement plus à chercher chez Jack Vance...

Frank Rovzar, le héros de cette histoire, est avant tout un excellent bretteur jouant à qui mieux mieux de la rapière dans les ruelles de la ville souterraine de Munson. Témoin de l'assassinat du duc Topo ainsi que de l'exécution de son propre père par le fils du duc, le tout appuyé par le Service des Transports, Frank est condamné à la déportation. Il s'évade et se réfugie dans les sombres coupe-gorge de Munson, où il rencontre Sam Ochrist, baron de la pègre, pour qui il devient faussaire, cambrioleur puis maître d'armes. Dans le même temps, la milice des Transports fait pression sur les Compagnons des Bas-Fonds qui ne sont nullement exempts de dissensions, dues entre autres à l'ambitieux lord Tolley Christensen. Ce dernier tue Blanchard, le roi des Bas-Fonds et ami de Frank, avant de prendre sa place. Commence alors un règne fort court puisque Franck ne tarde pas à lui faire subir un sort identique. Devenu roi, Franck entend bien bouter les milices des Transports hors d'Octavio. En se faisant le champion de George Tyler, poète et fils naturel du feu duc Topo, lui aussi réfugié dans les Bas-Fonds, Frank mettra fin au règne de Costa.

On tient là un bien sympathique roman d'aventures, trépidant à souhait, mais qui n'aurait sans doute pas connu les honneurs de la traduction si son auteur n'avait ultérieurement livré des romans d'une toute autre ambition. Sur fond de space opera, le cadre « low-tech » d'Octavio, ce monde où les armes à feu sont devenues rares, préfigure en quelques sortes les orientations steampunk que l'auteur explorera par la suite. Quant à son personnage, pour lequel il n'a pas choisi un épais soudard ou voyou, il le brosse en finesse. Si bretteur il est, artiste peintre il n'est pas moins ! Ceux qui apprécient Powers pour ses livres les plus récents risquent une certaine déception à la lecture de ce premier roman. Mais on sait que le mieux est l'ennemi du bien. Et on aimerait que le tout-venant des récits divertissants fût de cette facture. C'est, par exemple, ce que devrait toujours être un Fleuve Noir.

Jean-Pierre LION

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