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Les critiques de Bifrost

Les Enfants de Peakwood

Rod MARTY
SCRINEO
384pp - 20,00 €

Critique parue en avril 2016 dans Bifrost n° 82

Au rayon premier roman d’un illustre inconnu, penchons-nous sur le cas de Rod Marty. Publié donc par les éditions Scrinéo, l’auteur parisien se lance dans un genre qui se fait rare : le fantastique. L’action se passe dans une petite ville américaine du Montana, la fameuse Peakwood du titre, et parle d’un lugubre accident de bus scolaire qui aurait coûté la vie à plusieurs enfants et quelques adultes. Heureusement, le docteur Littlefeather n’est autre que le descendant d’un shaman indien local. Devant l’horreur de la situation, il décide de pratiquer un rituel pour ramener les victimes du drame à la vie et déjouer la mort. Le problème, c’est que la mort en question va rapidement venir reprendre ce qui lui appartient – et le lecteur de suivre les péripéties des habitants de Peakwood confrontés à d’étranges évènements (l’apparition spontanée de cicatrices et de blessures, le comportement violent de certaines personnes, ou encore la mystérieuse propagande qui envahit la ville…).

Rod Marty déroule une intrigue qui met bien trop longtemps à démarrer et prouve d’emblée sa désagréable tendance à tirer à la ligne. Des travers pour partie, toutefois, compensés par des personnages attachants. On se surprend, en définitive, à suivre sans déplaisir les différents acteurs de cette histoire fantastique, et le bouquin se transforme bientôt, de manière presque inattendue, en une espèce de page-turner que l’on avale somme toute assez vite malgré ses quelques 380 pages. Au sein d’une intrigue qui finit par décoller après les deux premiers chapitres, et d’une ambiance de mystère qui vire à l’horreur, Rod Marty parvient à recycler certains poncifs avec plus ou moins de bonheur, notamment une pseudo séance d’exorcisme saupoudrée de saveurs indiennes. Pris comme un divertissement pur et simple, Les Enfants de Peakwood joue son rôle et promet quelques belles heures à son lecteur. Point barre : on se gardera d’attendre quoi que ce soit d’autre de ce premier roman. Outre sa propension à rallonger la sauce, Rod Marty ne développe aucune thématique originale, se bornant, en définitive, à dresser une galerie de personnages attachants, on l’a dit, mais in fine caricaturaux. On peut d’ailleurs s’amuser à retrouver tous les poncifs d’une bonne série B à l’américaine : de l’homme qui renie ses origines mais finit par les embrasser à la pom-pom girl pas si stupide en passant par le parfait salaud battu par son non moins salaud de père ; un côté déjà-vu mais efficace qui résume à lui seul les qualités et défauts du bouquin. Si Rod Marty arrive à accélérer les choses tout en jouant avec son atmosphère, il montre aussi ses limites dans un style utilitaire dénué de caractère. Ce qui explique sans doute que le roman échoue à jamais sortir de son cadre de gentil divertissement et de melting-pot d’influences littéraires et cinématographiques. Sans être mauvais, Les Enfants de Peakwood n’arrive tout simplement pas à trouver de vraies thématiques fortes et à sortir de poncifs vus et revus des dizaines de fois ailleurs, et en bien mieux. Que ce soit du côté du deuil ou celui de la responsabilité, ce récit ne fait qu’enfoncer des portes ouvertes sans jamais surprendre. Les amateurs de récits fantastiques apprécieront sans doute, histoire de se délasser, les autres passeront leur tour.

Nicolas WINTER

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