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Les critiques de Bifrost

Les Esclaves de Gor

John NORMAN
OPTA

Critique parue en novembre 1996 dans Bifrost n° 3

 

« Oui ! Oui ! criai-je. Je suis femme !

Je restai immobile sur le rocher, au soleil, près du torrent rapide, les bras levés, les yeux fermés. Puis, ouvrant les yeux, je découvris l'azur des cieux.

– Oui ! Oui ! Oui ! criai-je aux cieux de Gor, aux étoiles et aux planètes. J'ai envie d'un Maître ! J'ai envie d'un Maître !

– Remets-toi au travail ! ordonna le gardien. »

Le roman à offrir à votre copine si vous voulez lui faire haïr la science-fiction. Un succès éditorial réédité sans trêve par J'ai Lu. Difficile à critiquer sans verser dans une certaine vulgarité, dont l'absence nuirait toutefois à restituer l'atmosphère de ce chef-d’œuvre du bondage.

Résumons. Elinor Brinton, la pétasse absolue américaine, nantie et stupide, se découvre au sortir de la douche une marque au fer rouge sur la cuisse. Plutôt que d'appeler la police ou son esthéticienne au secours, Elinor décide d'aller toute seule comme une grande directement au point P pour l'enlèvement par les extraterrestres de la planète Gor.

Loin d'être petits, gris et imberbes, ceux-ci se révèlent des mâles, des vrais. Là-bas, Elinor va apprendre au fouet les devoirs de toute femme : servir l'homme et pas en sauce.

 C'est bien écrit ; aucune bassesse n'est épargnée à cette bonne Elinor : s'acharner sur les nouvelles venues, ramasser à quatre pattes les bouchées de viande qu'on lui lance, changer d'avis toutes les trois pages, mentir, voler, trahir, et attendre presque 400 pages avant qu'un homme ne lui accorde ce qu'elle réclame à corps et à cri à qui veut l'entendre.

En fin d'ouvrage on se prend à admettre que, finalement, une débile de ce genre n'a que ce qu'elle mérite, et qu'il existe sûrement des femmes à qui un pareil traitement conviendrait — chose curieuse, les lectrices ne sont pas du même avis.

Au second degré, on peut en rire.

Au troisième, on se dit que le plaisir pris par le lecteur (et un auteur) d'un tel ouvrage écrit d'un bout à l'autre à la première personne du singulier — n'est pas sans rappeler certains plaisirs victoriens. Alors, cher lecteur, partant pour titiller votre côté féminin le plus vil?

David SICÉ

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