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Les critiques de Bifrost

Les Fourneaux de Crachemort

Raphaël BARDAS
MNÉMOS
384pp - 23,00 €

Critique parue en octobre 2024 dans Bifrost n° 116

Si la « cosy fantasy » est remplie de lattes et de pâtisseries, la « Grand-Guignol fantasy » est-elle remplie de saucisses et d’épices ? Si l’on en croit Raphaël Bardas et son dernier roman Les Fourneaux de Crachemort : assurément. Situé dans le même univers que les deux précédents, Les Chevaliers du Tintamarre et Le Voyage des âmes cabossées, mais pouvant se lire de façon indépendante, ce roman commence — après un prologue de « folk horror » bien crasseux et mystérieux — par un cambriolage qui tourne mal. Les quatre voleurs doivent fuir la ville et s’improviser qui saltimbanque, qui cuisinier devant adapter ses recettes avec les ingrédients rencontrés en cours de route. Las, leurs ennemis les pistent et le moindre arrêt, le moindre lien tissé avec autrui se termine dans le foutre, les larmes et le sang…

Raphaël Bardas sait camper des personnages hauts en couleur, si ce n’est en taille (l’alfe noir n’étant pas bien haut, qu’il se tienne à deux ou quatre pattes), au moins en paroles et en actions. Il a également le sens des répliques qui font mouche et de l’exagération. Sans oublier le juste dosage entre le comique de situation, la noirceur des destins exposés et une certaine mélancolie. Mais… comme dans tout récit de voyage, il arrive un moment où l’ennui s’installe chez les passagers. Et ici les lecteurs qui, à mi-chemin, commencent à discerner une certaine répétition aux aventures des compères et commères, et souhaiteraient un aboutissement plus rapide. De même, l’accumulation de fluides corporels ou de langage fleuri est un style qui peut plaire, y compris à l’autrice de ces lignes, mais il faut que ce soit un minimum justifié. S’il s’agit juste de faire couleur locale (comme les singes du temple aux méduses fricassées), hormis un « ah oui, et donc… », et un vague souvenir de chamelier en arrière-plan dans Conan le destructeur, l’intérêt s’émousse. À vous de voir si vous aurez assez d’endurance pour aller jusqu’au bout de ce voyage, certes roboratif et riche en saveur, mais dont un bon tronçon se déroule sur l’équivalent littéraire d’une ligne droite d’autoroute un jour de départ en vacances.

 

Stéphanie CHAPTAL

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