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Les critiques de Bifrost

Les Lanciers de Peshawar

S.M. STIRLING
FLEUVE NOIR
20,00 €

Critique parue en octobre 2004 dans Bifrost n° 36

En 1878, une chute de météorites a créé sur Terre un hiver nucléaire provoquant une importante régression de l'humanité. Alors que l'Europe est retombée dans la sauvagerie et le cannibalisme, l'Angleterre s'est réfugiée dans ses colonies, créant un empire, l'Angrezi Raj, comprenant en 2025 l'Australie, l'Afrique du sud, l'Amérique du nord, la république batave, la Grande-Bretagne reconquise et surtout l'Inde, dont les diverses cultures ont énormément imprégné la civilisation britannique. La société, encore grandement rurale, dispose du téléphone et du cinématographe ainsi que d'un moyen de transport automobile et par dirigeable basé sur la technologie Stirling des moteurs à air chaud. John II projette de marier contre son gré sa fille Sita au prince hériter de la France d'outre-mer, Henri de Vascogne.

Mais cette alliance n'est pas du goût des indépendantistes du Cap ni de la grande puissance russe, en particulier Ignatieff, qui voue un culte satanique au Dieu Noir et désire anéantir non seulement l'Empire mais la Terre entière, en visant notamment deux représentants de l'Empire : Cassandra King, scientifique qui pourrait prédire à l'avenir une prochaine chute de météorites et son frère Athelstane, capitaine des Lanciers de Peshawar, susceptible d'empêcher l'assassinat de l'Empereur-Roi. Cruel et autoritaire, Ignatieff utilise des Rêveuses, ces femmes dont le don de précognition est renforcé par l'usage de drogues pouvant les mener à la folie quand elles se perdent dans le chemin des futurs possibles. L'une d'elles est au centre de cette intrigue où frère et sœur déjouent les tentatives d'assassinat des tueurs lancés à leurs trousses pour préserver la survie de l'Empire.

Cette uchronie, dont Stirling s'est fait une spécialité (Conquistador, Island in the sea of time) entre deux novellisations ou collaborations en fantasy avec Drake, McCaffrey, Pournelle, ne se limite pas à une formidable épopée digne des Trois Lanciers du Bengale : la reconstruction très fouillée de cet univers parallèle, avec une analyse historique très convaincante et une connaissance sans faille de l'Inde, est digne de tous les éloges. L'auteur a même poussé la minutie jusqu'à faire évoluer la langue, l'anglais impérial, dans sa prononciation et son vocabulaire, au contact des cultures étrangères — quelques annexes permettent de mesurer l'ampleur du travail accompli. Avec ce roman, passionnant à tous points de vue, Stirling est probablement la révélation de la rentrée. Du très bon.

Claude ECKEN

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