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Les critiques de Bifrost

Critique parue en juillet 2014 dans Bifrost n° 75

Avec Les Vaisseaux d’Omale, Laurent Genefort poursuit sa visite du monde d’Omale, immense sphère de Dyson créée, il y a bien longtemps, par les mystérieux Vangks qui y exilèrent d’innombrables races intelligentes. Revenues, sous l’effet de l’isolation, à un niveau technologique bien inférieur à celui de leur arrivée, les races ou « reh » vivent sur de « Grandes Aires », adaptées à leur besoin physiologique, et doivent y cohabiter avec une ou deux voisines.

L’action des Vaisseaux d’Omale débute vers 1600 CC, alors que les « rehs » retrouvent la voie de la science et que les regards des savants se tournent de nouveau vers le ciel.

Après des siècles de guerre, le pacte de Loplad a garanti la paix entre les Humains, les belliqueux Chiles, et les très empathiques Hodgqins. En dépit d’un cosmopolitisme qui se développe, la méfiance n’a pourtant pas complètement disparu, et les préjugés, parfois exprimés violemment, demeurent ; néanmoins de grandes villes triples existent, et la coopération, entre scientifiques notamment, progresse.

C’est dans l’une de ces villes triples qu’un Aezir, membre d’une étrange race spatiale, propose aux trois « rehs » un rendez-vous, dans cinq ans, pour partir explorer les planétoïdes intérieurs de la Sphère et peut-être comprendre mieux ceux qui l’ont créée. Hasard programmé, des scientifiques hodgqins sont justement en train de terminer la mise au point de vaisseaux spatiaux. L’expédition sera conduite par une scientifique humaine à la passion dévorante, Ipis, qui va diriger d’une main de fer sa petite troupe d’Humains et d’Hodgqins — plus bigarrée encore par la suite — vers l’infini et au-delà, à la rencontre des Aezirs et d’un peu du secret des Vangks.

Les Vaisseaux d’Omale offre aux lecteurs une incursion en profondeur dans l’aire hodgqine, sans doute la « reh » restée la plus mystérieuse dans le « cycle d’Omale ». On y découvre un peuple bien plus loin de nous que ne le sont les Chiles : biotechnologie, reproduction à trois sexes, empathie si vive qu’elle pousse à « l’occultation », ce moment récurrent durant lequel les Hodgqins se ferment au monde pour intégrer les faits dans leur être. Le long voyage en gwilume, sorte d’engin steampunk entre train et téléphérique, permet au lecteur, à travers le regard d’Ipis, de découvrir un monde profondément étranger, par ses habitants comme par son écologie. La longueur de ce voyage fait bien sentir combien les humains quittent leur biotope et s’enfoncent dans celui des Hodgqins, êtres amicaux mais radicalement différents. A l’issue de ce trajet et de maintes tribulations, arrivés à la base spatiale, les membres de l’expédition et quelques pièces rapportées finiront par décoller, à bord d’un vaisseau bioformé bien artisanal, afin d’honorer leur rendez-vous et d’augmenter leurs connaissances en rencontrant des êtres encore plus étranges que tous ceux qu’ils connaissent.

Les Vaisseaux d’Omale est un roman d’aventure prenant. Il offre au lecteur une vraie occasion de dépaysement. Le texte est d’une lecture rapide, agréable, et il n’a pas de défaut rédhibitoire ; ce qui ne l’empêche pas d’en avoir d’ennuyeux. Privilégiant l’action, Genefort fait trop rapide. Les périls qu’affronte l’expédition surgissent puis sont résolus en quelques lignes, les personnages, mis à part Ipis, sont peu développés et disparaissent parfois longuement du texte lorsqu’ils n’ont pas de rôle à y jouer, certains fils, enfin, sont largement sous-exploités, au point qu’on se demande s’il n’aurait pas mieux valu s’en passer pour allonger le reste. L’impression d’ensemble est celle d’un très bon plan détaillé auquel manque encore du développement et de l’approfondissement. Il est rare de dire qu’un roman devrait avoir plus de pages ; c’est le cas ici.

Éric JENTILE

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