Françoise DUPEYRON-LAFAY
CALLIDOR
392pp - 25,00 €
Critique parue en janvier 2025 dans Bifrost n° 117
George MacDonald, auteur écossais né en 1824 et mort en 1904, est peu connu en France. C’est pourtant une référence au Royaume-Uni. Lewis Carroll décida de publier Alice après que MacDonald eut lu l’ouvrage à ses filles, qui l’avaient adoré, et C.S. Lewis le décrit comme son « maître », jusqu’à lui emprunter le motif de la porte dérobée vers un autre monde qui marque le début de ce livre. Ici, un jeune homme de noble famille découvre dans son grenier un passage vers un univers fantastique — qu’il va parcourir guidé par un corbeau prenant régulièrement forme humaine. Une contrée dans laquelle on peut rencontrer des squelettes qui dansent, une femme-léopard ou un peuple d’enfants souriants qui, lorsqu’ils grandissent, deviennent des Géants, où l’on traverse des forêts hostiles au péril de sa vie… et où l’on peut venir à la rescousse d’une femme au seuil de la mort qui semble revenir à la vie à mesure que Vane, le protagoniste, dépérit. L’auteur truffe ce roman d’apprentissage — sur la vie et la mort, sur le salut des âmes — de citations bibliques et religieuses, de motifs mystiques et allégoriques, qui donnent une vraie épaisseur à l’univers ainsi décrit, et que l’on se plaît à visualiser semblable aux œuvres préraphaélites. L’usage de la lumière y est d’ailleurs primordial, le décor globalement sombre trouvant régulièrement son contrepoint lumineux dans la joie de vivre des enfants, la pureté des rivières, ou la bonté des certaines âmes rencontrées. Comme d’habitude avec Callidor, le livre est magnifique ; les illustrations de Luciano Feijão rendent à merveille l’envoûtement que suscite le récit, et la préface de l’éditeur américain Lin Carter, complétée de la postface de la traductrice Françoise Dupeyron-Lafay, sont particulièrement éclairantes sur la place occupée par George MacDonald dans le développement de la fantasy moderne, un constat amplement confirmé par la présente sortie.