Brandon SANDERSON
LIVRE DE POCHE
512pp - 22,90 €
Critique parue en juillet 2023 dans Bifrost n° 111
Voici déjà le deuxième des quatre romans « secrets » que l’inarrêtable Brandon Sanderson a écrits pendant les périodes de confinement de 2020/2021. Après Tress de la Mer Émeraude (cf. Bifrost n° 110), l’auteur nous propose un changement de décor et d’ambiance : nous voici projetés, en même temps que Johnny, notre narrateur, dans un espace-temps qui ressemble fort à l’Angleterre médiévale (pas de surprise, c’est dans le titre). Opportunément amnésique, Johnny reprend conscience dans un champ, entouré des pages volantes et à moitié brûlées d’un livre : le fameux Manuel du Sorcier Frugal dans l’Angleterre médiévale… Charge à lui d’essayer de reconnecter les choses entre elles et de comprendre comment et pourquoi il en est arrivé là, tout en essayant de survivre. Ce dernier point n’est pas le plus difficile : grâces à ses nanites, Johnny bénéficie de quelques augmentations plutôt pratiques, comme la vision nocturne, la capacité à blinder sa peau, à modifier la couleur d’icelle, ou à altérer sa voix. De quoi passer pour un elfe auprès des locaux, ce qui peut avoir des avantages. Bientôt, le voici en route vers le village voisin, en compagnie d’une skop – herboriste/guérisseuse –, d’un nobliau et d’une vieille pas si folle qu’elle en donne l’impression, avec l’intention de regagner son univers d’origine et, aussi, d’éviter de tomber sur ses anciens camarades. Car, sur notre Terre, Johnny avait des fréquentations louches et n’était pas vraiment un type du genre recommandable. Peut-être pourra-t-il changer ici… surtout si quelques créatures étranges s’en mêlent.
L’idée de projeter un individu lambda dans une époque passée avec un aspect fantasy plus ou moins marqué a fait florès, que l’on pense à Un Yankee du Connecticut à la cour du roi Arthur de Mark Twain, ou Trois Cœurs, Trois Lions de Poul Anderson. Brandon Sanderson ajoute sa pierre à l’édifice avec un roman éminemment sympathique, qui change quelque peu de sa production habituelle – narration à la première personne, cadre plus science-fictif que fantasy, et un côté humoristique marqué. Comme pour Tress…, on devine que l’auteur s’est fait plaisir à l’écrire, sans véritable pression. Le revers de la médaille est que ce Manuel… ressemble toutefois à une longue mise en place suivie d’une conclusion un rien hâtive, et laisse un goût de trop peu en bouche. Trois étoiles sur cinq, quoi. Et si ce deuxième roman « secret » déçoit un peu, il en reste deux à venir pour rattraper le coup.
Pour les aficionados, le roman est proposé en version collector, à l’instar de Tress…, avec couverture cartonnée et illustrations en couleurs.