« Avant le décollage, nous avons dû subir le discours de Jack Lang qui, à son habitude, avait réussi à chourer la place de l'actuel locataire de la rue de Valois. Il était très chic en veste sportwear bleu pétrole Thierry Mügler. Mais c'était peut-être La Redoute, il paraît que le salaire de nos Ministres, et donc à fortiori ex-ministres, n'est pas ce qu'on prétend... »
Dernier né de la jeune collection « Lettres SF », Manuscrit d'un roman de SF trouvé dans une poubelle est un recueil de nouvelles partiellement inédites (quatre textes sur les neuf publiés), celle-ci représentant, à l'évidence, le principal intérêt de l'ouvrage, les autres nouvelles parues dans Fiction ou divers fanzines étant de natures, de qualités et genres très divers (c'est le moins qu'on puisse en dire !). On navigue donc à vue entre l'ultraviolence de « Et chez vous comment ça va ? », la satire de « F&SF » et la misogynie (pornographie ?) de « Tout à la main ». Aussi dans cette traversée gare à ne pas s'échouer, l'ultraviolence pouvant très vite devenir ignoble et la satire, pour peu qu'elle décrive un milieu particulier, s'avérer obscure pour le commun des mortels. Quant au troisième des genres mentionnés...
Manuscrit d'un roman de SF... mériterait donc à l'occasion, comme à la télé (dixit le CSA...), son petit carré rouge (ou son triangle bleu, allez savoir.,.), en dépit de sa couverture de qualité qui ne déparerait pas les rayons pour la jeunesse où un libraire inconscient pourrait facilement l'égarer. Ainsi le recueil pourra de fait emballer ou susciter le dégoût, suivant les sensibilités de chacun.
Reste, comme indiqué en quatrième de couverture, l'omniprésence d'un humour acide. « F&SF » est hilarant ; « L'Arme » réserve de ces développements en coup de théâtre à la Fredric Brown. Quant à « Mégalomaniaque », c'est complètement... allumé ! En revanche le mythe d'Adam et Eve revisité à la sauce andrevonienne dans « C'est la meilleure histoire... » est incontestablement téléphoné. Demeure « Chapo », décrivant une société hyper hygiénique où il est bien difficile de trouver un animal de compagnie : un texte pertinent et par certains côtés émouvant, un sombre futur dont on souhaite qu'il reste là où il est, sur le papier... Enfin ajoutons que certains des textes (dont la préface, à la formulation originale quoiqu'un tantinet surfaite) permettront aux nostalgiques et aux curieux, au travers de l'itinéraire d'un Jean-Pierre Andrevon vieux routier du genre, de (re)plonger dans le milieu de la S-F française des années 70-80.
Du bon et du moins bon, donc, mais certes pas de l'inintéressant, à commencer par le style souvent remarquable de l'auteur.