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Les critiques de Bifrost

Mausolée

Antoine TRACQUI
CRITIC
944pp - 25,00 €

Critique parue en juillet 2015 dans Bifrost n° 79

Dans notre 72e livraison, nous disions tout le bien que nous pensions de Point Zéro, premier roman d’Antoine Tracqui, gros techno thriller qui envoyait du lourd. Un peu de moins de deux ans plus tard, en voici la suite : Mausolée.

1978. Le steamer Mary D. Hume s’échoue à Gold Beach, Oregon. La cause du naufrage, le capitaine, pas très sobre au moment des faits, préfère la taire, tant elle dépasse son entendement. 2020. Deux ans après les événements narrés dans Point Zéro, l’équipe de la Hard Rescue – ces spécialistes ès sauvetages impossibles – s’est mise au vert, mais Kendall Kjölsrud, le multi-milliardaire plus que centenaire à la tête de l’une des entreprises les plus puissantes du globe, sonne le rappel. Direction l’Oregon, pour exhumer l’objet à l’origine de l’échouement de la Mary D. Hume : un navire venu tout droit… de la Chine Antique. La fine équipe se retrouve bientôt lancée sur les traces de Qin Shi Huangdi, le premier empereur chinois, dont le mausolée funéraire ne se situerait nulle part ailleurs qu’aux USA. Despote habité par la quête de l’immortalité, Qin Shi Huangdi avait lancé une expédition en direction d’hypothétiques îles à l’est de la Chine, expédition dont aucun membre n’est jamais revenu. Mais n’est-ce pas absurde de supposer que l’empereur en aurait fait partie ? Du côté de la Corée du Nord, devenue récemment la Nation de la Loi sous la férule d’un dictateur propre à faire passer Kim Jong-un pour un aimable Bisounours, les choses se corsent : le tyran, persuadé d’être la réincarnation de Qin Shi Huangdi, est prêt à déchaîner l’enfer sur Terre pour asseoir sa suprématie sur son voisin chinois…

Mausolée reprend les choses là où elles en étaient restées avec Point Zéro, avec les mêmes qualités – et, par corollaire, les mêmes défauts. Des personnages bigger than life formant une dream team du tonnerre ; des méchants aussi vicieux qu’increvables ; un vieux sage (Kendall Kjölsrud) affligé du syndrome « Gandalf » : barbu omniscient qui distille ses révélations au compte-gouttes et qui n’est jamais là quand sa présence est requise ; une action qui ne faiblit pas un seul instant, au travers de scènes de baston hypertrophiée ; une mécanique de scénario huilée à l’excès. Le roman suit une structure similaire à celle de Point Zéro : l’action va crescendo jusqu’à une apocalyptique troisième partie ; la quatrième et dernière partie est plus posée et finit de renouer les fils de l’intrigue, avant un épilogue qui, forcément, appelle une suite. Là où Mausolée pèche encore, c’est par sa longueur : les neuf cents ( !) et quelque pages, interminables, laissent peu de place à la subtilité et au développement des personnages, qui demeurent quasi monolithiques, privilégiant l’hénaurme et les cliffhangers à répétitions. Les notes de bas de page abondent, attestant du sérieux d’Antoine Tracqui quant à la documentation mais hachant la lecture.

Il n’empêche : dans le genre du thriller dopé, Mausolée fonctionne aussi bien que Point Zéro. Généreux dans l’action, le roman n’est pas non plus avare de « sense of wonder », même si on regrettera l’absence d’un petit supplément d’âme. Peut-être pour la suite ?

Erwann PERCHOC

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