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Les critiques de Bifrost

Miel des lunes

Michèle SÉBAL
GLYPHE
17,00 €

Critique parue en avril 2009 dans Bifrost n° 54

Oubliez le titre, Miel des lunes, qui fait un peu peur et qui n'aurait pas déparé chez Harlequin. Car ce roman — le premier de Michèle Sébal — est beaucoup moins gnangnan que le laisse supposer ledit titre, et même s'il ne s'agit pas là d'un chef-d'œuvre, gageons qu'il saura procurer quelques moments intéressants.

Janice est une jeune femme renfermée sur elle-même qui se rend tous les jours à son travail insignifiant, discute à peine avec ses collègues et semble dépourvue de toute vie sociale. Dans ce désert, sa seule amie est Tarita, sa gouvernante, aux petits soins pour elle.

Miel est quant à elle en perpétuelle volupté au sein d'un aréopage exotique : il y a une géante, une femme-serpent, une femme-félin et un Maître au sexe démesuré. Tout ce beau monde se croise et se décroise au sein de jeux érotiques aux configurations multiples.

Ces deux jeunes femmes, Janice et Miel, n'ont apparemment rien à voir. Pourtant, un lien les unit, on le suspecte très rapidement — Raoul Alcan, un psychanalyste, va d'ailleurs essayer de déterminer la nature de leur relation.

Les deux premières parties du roman reposent sur un intéressant mélange de narrations des scènes tristes de la vie de Janice, des expériences de Miel, et des séances de psychanalyse conduites par Raoul sur Janice. Ceci permet à Michèle Sébal (elle-même psychanalyste de profession) de nous dévoiler peu à peu le mystère sur l'identité de Miel, au travers de personnages fort bien campés. La fascination de Raoul Alcan, qui tombe peu à peu sous le charme de la jeune femme, mais qui tente de résister à ses pulsions, est admirablement décrite.

Toutefois, cette belle construction s'écroule quelque peu dans la troisième partie, à l'hôpital. Si l'auteur introduit de nouveaux personnages, un groupe de chercheurs en psychiatrie très fortement caractérisés (le connaisseur du vaudou, le juif introverti et besogneux…), leurs réactions en face du phénomène créé par Janice les rendent quasiment interchangeables. Et comme tout est désormais décrit par Alcan, sans balance par d'autres points de vue, on perd ce qui faisait l'intérêt de ce qui précède. Quant à la conclusion de l'histoire, bien qu'intrinsèquement satisfaisante, elle est loin de cette fin traumatique annoncée à grands renforts de trompette lors des passages situés après le déroulement des événements…

Bref, un roman intéressant dans sa première moitié et qui ne tient pas ses promesses dans la seconde. Mais un roman qui montre néanmoins qu'on peut logiquement attendre de Michèle Sébal des œuvres tout aussi personnelles et, à n'en pas douter, plus accomplies.

Bruno PARA

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