Additif à l'intégrale des nouvelles de Matheson publiée en cinq volumes dans la même collection, ce recueil comprend huit textes récents inédits en français. Les spectres de la solitude et de la vieillesse planent sur ces récits ; c'est une femme obnubilée par sa beauté qui ne cesse de se regarder dans sa glace, obsession que Matheson rend terrifiante par un habile renversement de perspective donnant à voir la situation… en miroir ; c'est un homme qui se réveille seul au monde, dans une cité fantôme, trame classique sur laquelle l'auteur tente une variation stylistique. La solitude pousse également une buraliste à s'immiscer dans la vie privée d'un écrivain par le biais de son courrier expédié en poste restante. Tout passe : les objets technologiques qui font la fierté de l'homme moderne ne sont plus que des pièces de musée qui ennuient les élèves en visite.
Parfois, Matheson exploite encore des veines classiques, comme ce coup de fil à un truand résistant à un assaut policier, dont on devine vite l'identité de l'interlocuteur, ou ce champion de base-ball qui a vendu son âme au diable mais refuse d'en payer le prix. Peu originale également, l'histoire de ce physicien irradié au plutonium, qui se retrouve propulsé à travers le temps dans le corps d'un condamné à mort et qui n'a que deux heures pour prouver sa bonne foi avant l'exécution de la sentence. Mais il sait aussi adapter ses propos aux thèmes plus récents : les dangers de la prédiction de l'avenir, qui tuent la surprise et l'attente, sont ici exploités de façon science-fictive, à partir des miracles de la génétique.
Ce recueil peu innovant n'ajoute ni ne retranche rien à l'œuvre de Matheson mais prouve que l'auteur n'a rien perdu de sa force d'écriture et de son art de la chute. Les inconditionnels ainsi que ceux qui n'ont pas lu ses textes majeurs y trouveront leur compte.