Salomon DE IZARRA
RIVAGES
120pp - 15,00 €
Critique parue en juillet 2014 dans Bifrost n° 75
Le jeune Nordnight, second d’un baleinier norvégien en 1927, nous rapporte dans Nous sommes tous morts (OK, pas de spoiler…) le terrible calvaire enduré par son équipage quand ledit bateau s’est retrouvé pris dans les glaces, là où il n’aurait pas dû y en avoir… Un effroyable cauchemar polaire, qui transforme les hommes, et notamment notre narrateur, dont on a retrouvé le journal en partie illisible ; Nordnight, mais il n’est pas le seul, tourne ainsi au salaud dans cet enfer glacé, et nous sommes témoins de cette horrible dégradation…
Premier roman du jeune Salomon de Izarra, Nous sommes tous morts affiche d’emblée ses références. On parle ainsi de Stevenson, mais aussi de Lovecraft (et ce n’est sans doute pas un hasard si le baleinier cadre de l’intrigue se nomme Providence…) ; on pense, forcément, au Moby Dick de Melville, très tôt cité ; mais, au-delà, ce mélange d’aventure maritime et de fantastique horrifique peut aussi évoquer Les Aventures d’Arthur Gordon Pym d’Edgar Allan Poe, et peut-être plus encore William Hope Hodgson (Les Pirates fantômes, par exemple). Plus près de nous, on évoquera également Terreur de Dan Simmons… C’est dire, à la fois, l’ambition de ce très court livre, et en même temps la rude concurrence à laquelle il doit faire face.
Et, hélas, il ne se montre pas à la hauteur de ces prestigieux modèles. Le récit relativement convenu, les personnages, à peine esquissés (sauf Nordnight et le capitaine) et bien trop caricaturaux, pèsent déjà douloureusement sur la balance… Mais c’est le style, défaillant, souvent lourd et perclus de clichés, qui fait en définitive de la lecture de Nous sommes tous morts un calvaire presque aussi terrible que celui enduré par l’équipage du Providence.
Dommage. Le cadre est fascinant, les bonnes idées émergent de temps en temps — idées que l’on aurait souhaité mieux traitées —, le propos est assez intéressant. Mais cela ne suffit pas à emporter l’adhésion du lecteur, qui renâcle à chaque page ou presque (qu’on se rassure, c’est très court… trop, sans doute). Un triste ratage que l’on fera bien d’éviter ; lisez plutôt les modèles cités plus haut…