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Rapidement résumé, on pourrait dire que le roman (?) met en scène une compositrice italienne de l’époque baroque qui perçoit des voix. Évidemment, ce n’est pas si simple. Divisé en quatorze chants aux vers libres numérotés, Nout nous fait entendre (enfin, lire) d’abord ces voix, avec les interventions et incises de la compositrice, rares au début, moins au fil des pages. Ces voix viennent de l’avenir lointain, et racontent à la musicienne le devenir de la Terre et de l’humanité au fil des millions d’années, notamment en traitant des conséquences de l’arrivée d’une nouvelle planète dans le Système solaire. En fait, loin de se limiter à la seule espèce humaine, elles parlent de la vie. Et elles inspireront la compositrice dans son œuvre, qui nous sera donnée à lire à l’issue de cette quinzaine de chants.
Nout est parsemé de citations de philosophes, poètes, poétesses ou textes sacrés, dont les origines sont mentionnées en fin d’ouvrage. Un auteur entre tous n’est pas cité mais ses mânes semblent flotter dans ces pages : Olaf Stapledon. Sous une forme autrement lyrique, le présent ouvrage cherche à convoquer le vertige de Les Derniers et les Premiers, ou encore de Créateur d’étoiles, avec, comme en témoignent les chercheurs mentionnés dans les remerciements, le même souci du scientifiquement vraisemblable.
Encore faut-il être sensible à la poésie : c’est là que Nout peut trouver ses limites. Et celles de son lectorat. Sachons gré toutefois à La Volte de permettre à de tels OLNI d’exister !
Erwann PERCHOC