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Les critiques de Bifrost

Plop

Rafael PINEDO
FOLIO
7,40 €

Critique parue en juillet 2019 dans Bifrost n° 95

Futur distant et boueux. La civilisation n’est plus ce qu’elle était : ce qu’il reste de l’humanité est retombé dans la barbarie. Çà et là, dans la Plaine, cette zone morne dont les seuls reliefs sont des tas d’ordures, où il pleut en permanence, où errent rats et cochons en goguette, vivotent des Groupes.

Parce que ça a fait « plop » quand son corps a été éjecté du ventre maternel, droit vers la boue, on l’a appelé Plop. Pas grand monde n’aime Plop, mais celui-ci le rend bien au monde. Plus malin que ses congénères, il va gravir les échelons de sa tribu jusqu’à la dominer. Mais plus on est haut, plus dure est la chute, même dans la boue…

Étonnant roman que Plop, paru en 2011 aux excellentes éditions de l’Arbre Vengeur et que Folio « SF » a eu la bonne idée de rééditer. Premier des trois romans que son auteur, l’écrivain argentin Rafael Pinedo, a écrit avant de décéder en 2006, Plop ne fait pas dans le propret ou le sentimental.

Phrases brèves, paragraphes concis, chapitres courts : la prose de Plop est sèche et brutale. Voilà pour la forme. Sur le fond, le roman présente une humanité en phase terminale, survivant tant bien que mal (surtout mal) dans un environnement détruit et hostile. Les rapports humains au sein du Groupe se réduisent à l’utilitaire, chacun étant réparti dans différentes Brigades qui assurent une espérance de vie brève ou moins brève. On ne gâche pas les cadavres avec une mise en terre. On s’adonne parfois au sexe — qu’importent l’âge et la nature du partenaire. Ici, pas de morale, juste des tabous idiots, comme celui de ne pas montrer l’intérieur de sa bouche. Ne riez pas.

Post-apocalyptique aussi noir que clinique, bref et éprouvant, Plop ne laisse pas indifférent. Dans ce portrait vitriolé d’une humanité déshumanisée, tout est sale, et l’on ressort de la lecture avec un goût amer dans la bouche — celui d’une boue polluée.

Erwann PERCHOC

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