Au cours de sa longue carrière, Arthur C. Clarke aura publié bon nombre d’essais et de recueils d’articles, une bonne part demeurant inédite en français. Faisant partie des rares à avoir bénéficié d’une traduction sous nos latitudes, Profil du futur est sûrement le plus connu, car formulant deux des « lois de Clarke » – les bonnes choses allant par trois, notre auteur en rajoutera une dernière plus tard.
Cet essai compile une série d’articles, à l’origine publiés dans Playboy – on ne peut qu’espérer que les lecteurs anglophones de la revue auront autant appris sur l’anatomie féminine que la science. Sous nos latitudes, Profil du futur est paru au sein de « L’Encyclopédie Planète », une émanation de la revue Planète fondée par Jacques Bergier et Louis Pauwels suite au succès de leur Matin des magiciens. Clarke aborde ici toute une variété de thèmes allant de l’astrophysique aux techniques, dressant un état des lieux de la science et de ses perspectives. Sacrifiant rarement au sensationnalisme (à l’inverse du plus tardif essai 21 juillet 2019), ce Profil… reste d’une lecture des plus enthousiasmantes, en particulier dans le vertige que l’ouvrage est à même de susciter – on comprend son influence sur un écrivain comme Stephen Baxter. De fait, soixante ans après publication, bon nombre de chapitres gardent leur acuité : l’éloge de la science-fiction, de la science et des arts, le problème de la distance dès lors qu’il est question de voyage dans l’espace, l’épuisement des ressources naturelles… D’autres chapitres se font reflets des angoisses de l’époque : la surpopulation ou les disettes invitent à des réflexions sur le rapetissement des humains ou les réplicateurs de matière. Faisant preuve d’un humour discret, la plume de Clarke n’est ici jamais péremptoire et l’optimisme scientiste de l’auteur garde toujours une certaine lucidité. On pourra regretter les envahissantes annotations des éditeurs, venant complémenter plus ou moins à propos les articles.
Si Profil du futur est épuisé depuis belle lurette, on le trouve d’occasion sans trop de difficultés. En dépit de l’âge du livre, les lecteurs curieux de découvrir plus avant la pensée de l’un des auteurs majeurs de la SF auraient tort de s’en priver.