Miles CAMERON
BRAGELONNE
840pp - 25,00 €
Critique parue en octobre 2013 dans Bifrost n° 72
Le Chevalier rouge constituait l’une des sorties fantasy 2013 à surveiller selon un certain nombre d’observateurs.
Sauf que des premiers romans soi-disant incroyables, renversants, mais se révélant en définitive décevants, on en a tout de même vu défiler beaucoup au fil des ans. En cherchant un peu, on apprend bien vite que Miles Cameron s’est déjà distingué dans le domaine du roman historique sous un autre nom. De quoi nous rassurer en partie ?
A voir…
Il suffit en tout cas de quelques chapitres pour se rendre compte que l’auteur, peu importe son nom, se range dans la mouvance d’une fantasy sombre et volontiers brutale. On pourrait presque parler de réalisme, en songeant par exemple aux scènes de batail-les (nombreuses), gérées avec allant. Cameron ne s’embarrasse pas de fioritures, et si son écriture est relativement banale, elle a au moins le mérite d’aller droit au but. L’auteur joue davantage, de toute évidence, la carte des dialogues, qui s’avèrent percutants et non dénués d’un certain humour… noir, bien entendu.
Comme souvent désormais dans le registre de la fantasy épique, Cameron a fait le choix de multiplier les points de vue. C’est sans doute là l’une des faiblesses du roman, car fatalement, serait-on tenté de dire, tous les personnages ayant droit à ce « privilège » ne provoquent pas le même intérêt chez le lecteur. Le plus souvent, après avoir initialement piqué notre curiosité, on se détourne lentement d’eux au fil des pages, ce qui n’est jamais bon signe.
Dans le registre des regrets, on pourra également citer une première moitié de roman un peu lente dans son déroulement, en particulier les premiers chapitres, verbeux. Néanmoins, une fois entré dans l’histoire et assimilé tous ses parallèles avec le mythe arthurien — eh oui, nous y revoilà, mais attendez, l’auteur a choisi d’adopter un vrai point de vue, une véritable approche personnelle pour contourner le poids de la légende plutôt que de l’affronter bille en tête —, il s’avère difficile de ne pas aller au bout.
Miles Cameron laisse traîner suffisamment d’indices et planer assez de mystères autour de son univers pour donner envie au lecteur de s’investir plus avant dans ses personnages (quand bien même ils se révèlent un peu falots, on l’a dit), et dans une intrigue plus complexe qu’il n’y paraît.
Avec son atmosphère rappelant « La Compagnie noire », voire certains écrits de David Gemmell, son sens de la mise en scène et cette dimension historique à même d’éveiller l’intérêt de celles et ceux qui en auraient assez d’une fantasy trop « fantaisiste » à leur goût, ce Chevalier ne manque pas d’atouts.
Le meilleur premier tome croisé depuis longtemps ? Pas forcément, non. Mais un ouvrage solidement bâti.