Daniel H. WILSON
FLEUVE NOIR
Critique parue en octobre 2017 dans Bifrost n° 88
Robogenesis est la suite directe de Robocalypse (tout juste réédité en poche, chez Pocket). À la fin du premier opus, le danger représenté par Archos R-14 semblait définitivement écarté. Le monde était certes en ruines, l’humanité presque éteinte, mais elle pensait avoir vaincu le monstre. Or, avant de disparaître, l’I.A. Était parvenue à se transférer dans d’autres machines. Des centaines de milliers de machines. Big Rob est donc encore en vie. Et il n’est pas seul. Des versions précédentes ont aussi survécu. L’une d’entre elles, en particulier, a des projets pour cette Terre. Et l’homme n’y a pas la place centrale. Archos R-8, autrement appelé Arayt Shah, a un but ultime : prendre le pouvoir sur la planète entière. Pour cela, il doit s’assurer du contrôle de centres de calcul disséminés de-ci de-là afin d’acquérir la puissance nécessaire. Et il en profite pour éliminer les menaces potentielles. Dont les plus importantes sont les modifiés, ces êtres humains transformés par Archos R-14, améliorés, mais plus vraiment des hommes ou des femmes à part entière.
L’intrigue nous est narrée, en alternance, par les différents protagonistes de ce grand final (enfin, espérons, car on n’oublie pas que Robocalypse devait déjà marquer la fin des hommes). Et l’on retrouve nombre de personnages présents dans le premier roman : Lark Iron Cloud, revenu d’entre les morts ; la jeune Mathilda et son frère Nolan, accompagnés de leur ange gardien Neuf Zéro Deux ; mais aussi Cormac Wallace, le héros de la précédente guerre ; et enfin, le professeur Takeo Nomura, sauveur de l’humanité.
Malgré ce « casting de rêve », rien n’y fait ! C’est plat, sans grande saveur, sans aucune originalité. Arayt Shah pérore à longueur de pages sur sa supériorité et la faiblesse des tas de viande que nous sommes. Les survivants tentent… de survivre. Mais on s’en moque. Leur détresse, à quelques exceptions près, échoue à nous toucher tant l’ensemble se montre artificiel. Les récits de fin du monde sont légion, à l’instar des histoires post-apocalyptiques. Pourquoi alors en pondre une nouvelle ? Pourquoi écrire une suite à Robocalypse, un roman distrayant, certes, mais d’un intérêt déjà très moyen ? Peut-être y a-t-il là quelque chose à voir avec le fait que Steven Spielberg a acheté les droits du premier bouquin et que le film va, un jour, c’est promis, enfin sortir ? À moins qu’il ne s’agisse de surfer sur la mode des questionnements liés à l’avenir de l’humain face à des machines toujours plus puissantes ? En ce cas, encore aurait-il fallu s’appliquer un tantinet, et guider le lecteur vers des altitudes plus élevées. Depuis Turing, les œuvres traitant ce thème sont légion, le lecteur a l’embarras du choix. Une concurrence face à laquelle Robogenesis déçoit, et pas qu’un peu. On renverra de fait Daniel H. Wilson à la lecture de son petit Greg Egan illustré, tout en évitant ici un achat dispensable.