Daniel H. WILSON
FLEUVE NOIR
448pp - 20,90 €
Critique parue en octobre 2012 dans Bifrost n° 68
Pour une fois, la quatrième de couverture plante assez bien le décor : « Nous avons créé une nouvelle intelligence artificielle. Elle a décidé de nous éliminer pour sauvegarder la planète. Ça commence par vos téléphones portables, vos GPS et Internet. Puis elle prend le contrôle des jouets de vos enfants… La guerre contre nos propres machines est en marche. A nous de résister. » Un vrai pitch. Nous y reviendrons… D’un côté, la révolte des robots, fomentée par Archos, qui ressemble en bien des points au HAL de 2001, l’odyssée de l’espace, de l’autre la résistance internationale, organisée notamment autour de Cormac « Brightboy » Wallace (comme le héros écossais, ça ne s’invente pas ! Mais si, vous vous rappelez de Mel Gibson dans Braveheart ? Et bien voilà, himself). C’est lui qui nous raconte l’histoire de la Nouvelle Guerre — au travers d’archives retrouvées à la fin du conflit et qui relatent les actes de bravoure de différents protagonistes, de l’insurrection des robots en passant par l’extermination de la majorité de la race humaine, jusqu’à l’organisation de la lutte et la victoire finale. Pas vraiment besoin ici de préserver la fin de l’histoire, c’est écrit d’avance…
Annoncé comme le futur blockbuster de Steven Spielberg (sortie prévue fin avril 2014 aux US), et produit par DreamWorks SKG et la 20th Century Fox, Robopocalypse contient tous les ingrédients d’une grosse machine à faire du pognon. Daniel H. Wilson le dit lui-même dans les remerciements : « Les cinéastes de DW SKG m’ont manifesté leur enthousiasme dès le départ et m’ont aidé à écrire ce livre. » La machine est en route, donc, et ça devrait envoyer du lourd…
Soyons clair : nous sommes ici en présence de SF grand (voire très grand) public, et les puristes du genre — ou peut-être, plus simplement, les lecteurs exigeants ? — resteront sur leur faim. Et pourtant, il faut bien l’admettre, c’est sacrément efficace. Au point même qu’en la matière, on peine à imaginer comment faire mieux. L’intrigue est bien ficelée ; les chapitres sont courts, donnant à l’ensemble un rythme adapté ; le style est fluide ; les personnages bien campés. Bref, c’est écrit comme un scénario et le tout s’avère hyper-visuel. Evidemment, on a droit au dernier chapitre avec la totale : la morale, la happy end, l’espoir et l’histoire d’amour… Fantastique ! Présenté comme ça, dans les pages de Bifrost, on pourrait se dire qu’il vaudrait mieux éviter de se procurer le roman. Et pourtant non. Honnêtement, quand c’est aussi bien fabriqué que ça, aussi assumé, pourquoi bouder le plaisir d’une lecture ludique et sans prétention ?
A moins que le Fleuve noir ait hypothéqué le paquet de caramels mous des ayants-droits de pépé San Antonio pour l’achat, il s’agit certainement là d’un très joli coup éditorial qui promet des ventes importantes en grand format et en poche lors de la sortie du film en 2014, avec Chris Hemsworth, le mec de Thor, en acteur vedette — on s’interrogera d’ailleurs, ceci dit en passant, sur la présence de ce titre au catalogue de la vénérable maison de la place d’Italie, sachant que le même auteur a récemment publié chez Orbit/Calmann-Levy un Survivre à une invasion robot, soit un guide de survie dans l’univers du présent roman ; mais quoi… les voix de l’édition sont souvent impénétrables. Comme disait la sage vache qui rit : « Même les bios vont au Mac Do de temps en temps ». Alors, mangez-en !