Le rollback du titre, c'est un procédé permettant de rajeunir le corps humain en remplaçant les organes défectueux et en régénérant les cellules. Un jour, on propose à Sarah Halifax, quatre-vingt-sept ans, d'y avoir recours. Cette astronome avait en 2010 capté puis déchiffré un message d'origine extraterrestre ; après concertation mondiale, la Terre avait répondu. Nous sommes désormais en 2048, quand arrive la réponse des habitants de Sigma Draconis. Un mécène pense que Sarah est la seule à pouvoir déchiffrer le nouveau message, et, pour la placer dans des conditions optimales, il lui propose le rollback.
Sur cette trame, Robert J. Sawyer aurait pu nous proposer un roman vivant, intéressant, aux multiples implications scientifiques vertigineuses. Il n'en est rien : il a choisi une autre direction, celle de la ménagère de plus de cinquante ans. Sarah a en effet un mari qui a son âge. Elle décrète donc que si elle subit le rollback, son mari doit le subir aussi. Cette opération, qui a toujours réussi sur les deux cents premières interventions, rate cette fois-ci. Pas de chance, non ? En plus, pas sur Don : sur Sarah ; du coup, elle reste âgée. Le roman va dès lors se concentrer davantage sur Don, sur sa verdeur retrouvée, à laquelle il est confronté, notamment vis-à-vis d'une jeunette qui pourrait être son arrière-petite-fille… Après soixante ans de vie commune et une relation au beau fixe, sa transition vers un jeune bouillonnant de sève est tout sauf crédible. Et ses atermoiements — est-il en train de trahir Sarah ? — sur plus de 350 pages sont d'un pathétique consommé. Comme du reste l'ensemble du livre : à aucun moment, le questionnement sur le contact avec les extraterrestres ou sur l'effet à terme du rollback sur l'humanité ne prend le pas sur des considérations toutes personnelles, comme « que faire à manger ce soir ? » ou « est-ce que tu n'as pas froid, ma chérie ? ». Avec de nombreux passages d'un ridicule achevé — le robot qui enlève ses bottes crasseuses en entrant dans la maison. Ajoutez que le message des E.T. et ses implications sont crétins à souhait, sans même parler du fait que le déchiffrage par Sarah du deuxième message tombe comme un cheveu sur la soupe, et vous aurez compris qu'on a affaire ici à un ratage sur toute la ligne. C'est d'autant plus rageant qu'avec un substrat identique, un auteur du calibre de, mettons, Robert Charles Wilson ou Greg Egan, aurait pu nous livrer quelque chose de plus consistant, de plus étourdissant sur ce double thème. En l'état, Robert Sawyer a choisi ce qu'il devait faire à manger ce soir : de la soupe, assurément.