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Les critiques de Bifrost

Critique parue en août 2020 dans Bifrost n° 99

Il aura donc fallu moins d’un an pour pouvoir lire l’intégralité de «  Rosewater » en France. Ce court délai est d’autant plus appréciable dans le cas de ce dernier volet, qui poursuit ou prolonge nombre d’intrigues du tome précédent. L’action reprend dix-huit mois plus tard, mais rien n’est réglé : une guerre larvée oppose toujours la désormais cité indépendante de Rosewater aux autorités nigérianes, de nouvelles factions apparaissent du côté des extraterrestres, certaines plus pressées que d’autres de supplanter la race humaine, et le sort des réanimés, dont le corps sert désormais de réceptacle aux aliens, soulève de plus en plus de controverses.

Rosewater : Rédemption reprend la forme éclatée de son prédécesseur, alternant le point de vue de ses nombreux protagonistes. Kaaro, narrateur du premier volume, y occupe cette fois une place nettement plus importante, et la principale nouveauté est le rôle prépondérant que joue Bicycle Girl dans l’intrigue, personnage qui n’apparaissait que de manière fugace jusque là. Ainsi, c’est à travers elle que l’on explore davantage la xénosphère pour y découvrir certaines caractéristiques inédites. Le roman présente également le même aspect chaotique que Rosewater : Insurrection, les coups de force se multipliant au fil des pages, tandis que certains acteurs ne cessent de revoir leurs alliances et leurs objectifs. Au bout du compte, tous verront leur histoire conclue de manière satisfaisante. On sent que Tade Thompson s’est pleinement investi dans ses personnages, et c’est l’une des forces de la trilogie. En revanche, la résolution de la guerre opposant tout ce petit monde aux Originiens laisse une désagréable impression de bâclé. Tout se joue dans les derniers chapitres, de manière aussi précipitée que peu convaincante. On peut également regretter qu’à force de se concentrer sur le microcosme que constitue Rosewater, le romancier en oublie le reste du monde, y compris certains éléments tout juste évoqués mais jamais développés. Aussi plaisante et souvent stimulante qu’ait été la lecture de cette trilogie, elle laisse toutefois un arrière-goût d’inachevé. Mais il n’est pas interdit de rêver que Tade Thompson n’en ait pas tout à fait fini avec cet univers.

Philippe BOULIER

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