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Les critiques de Bifrost

Sacrifice du guerrier - tome 2

Sacrifice du guerrier - tome 2

Jacques MARTEL
MNÉMOS
264pp - 20,00 €

Bifrost n° 53

Critique parue en janvier 2009 dans Bifrost n° 53

Dans le Bifrost n°52, j'avais fait un compte-rendu plutôt laudateur du premier volet de ce diptyque à l'antique. La suite n'est pas du même tonneau.

Petit rappel du casting : le beau Jarl, chef d'un peuple inspiré de la Horde d'Or, veut contrecarrer les desseins d'un Empire qui lorgne sur les terres ancestrales. En particulier, il veut la peau d'un certain dignitaire, qui a buté son papa et mis bobonne sous les verrous. Le beau gosse est accompagné par le sévèrement burné Roi Solitaire et la farouche Reine Vierge, amazone carrossée chez les concepteurs de Baldur's Gate.

Nos héros vont galoper jusqu'à une forteresse réputée imprenable, où bobonne est recluse. Et soudain c'est le drame… (sur lequel nous jetterons un voile pudique). Jarl bascule du côté obscur de la Force, rassemble tous les clans de la Horde et décide d'attaquer l'Empire, ou plus modestement, de mettre le siège sur un de ses avant-postes.

Du bourrin, du bourrin ! réclame le peuple en mal de défouloir. Du bourrin, il y en aura, jusqu'à épuisement. De sièges en sièges, d'assauts à grande échelle en face-à-face épiques et solitaires, l'errance de la Horde s'achève en un paroxysme de violence, dans une bataille que Martel voulait sans doute digne des Thermopyles, mais dont l'effet est assez mal rendu. Qu'une bataille soit confuse pour ses propres acteurs et pour ses observateurs, soit. Cependant, la confusion ici n'est pas le fait du réel que l'auteur cherche à recomposer, mais d'une véritable débâcle littéraire due à une technique défaillante. L'auteur malmène ses protagonistes avec un plaisir sadique, mais l'héroïsme qu'il dépeint devient factice à force de deus ex machina trop nombreux et à contretemps. Problème de rythme, de mise en scène, que complique un découpage parfois discutable. Pourquoi nous raconter en détail, parallèlement à la trame principale, l'historiette de la Reine Vierge alors qu'on n'en peut plus d'attendre la résolution des pistes narratives que l'auteur a ouvertes ? Lecteur, je t'entends déjà pousser des cris d'orfraie : et le suspense ? ! Le suspense est un vilain mot quand on n'en fait pas bon usage.

La postface est la dernière incongruité à la mode. Avertissement aux contempteurs de quêtes : le scénario est une démarque d'AD&D et RuneQuest. À part ça, on apprend que l'histoire est relatée par un Narrateur soi-disant contemporain des faits, ce qu'on a le plus grand mal à croire : le style, posé, évocateur, reste malgré tout assez distancié, quoi qu'en pense Martel (on est loin du ton à la manière des griots employé dans le Trône d'ébène de Thomas Day, ou des accents bardiques du Royaume blessé de Laurent Kloetzer). Celui-ci se livre en outre à sa propre exégèse, ce qui peut paraître un tantinet présomptueux.

Haché, mal structuré, bourré de scènes d'actions mal calibrées, le deuxième volet des aventures de Jarl Dayntsh Amia laisse en bouche un goût d'incomplétude, même si les dernières pages, poétiques en diable, démontrent que l'auteur possède une belle imagination. Ce qui fait d'autant plus regretter, et amèrement, le bâclage qui précède.

Sam LERMITE

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