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Les critiques de Bifrost

Sandman Slim

Sandman Slim

Richard KADREY
DENOËL
384pp - 23,00 €

Bifrost n° 71

Critique parue en juillet 2013 dans Bifrost n° 71

Envoyé aux enfers par quelques « amis », le magicien James Stark devient gladiateur. Contre toute attente, soutenu par le général Azazel, il finit par se tailler une sacrée réputation dans les arènes. Mais onze ans plus tard, il parvient à s’échapper de ce lieu sordide et revient sur Terre pour se venger. Et, le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il n’est pas content !

Mais avant de partir à la poursuite de ses anciens meurtriers pour les faire profiter des nouvelles techniques acquises dans les bas-fonds, il va lui falloir redécouvrir Los Angeles. Retourner là où il a vécu avec Alice, assassinée elle aussi. Retrouver Eugène Vidocq (si, si ! lui-même !), un ami fidèle et plus sage, immortalité oblige. Et réapprendre à vivre parmi les humains. Et ça, ce sera le plus difficile. Régler des problèmes autrement qu’en explosant la tête de son adversaire est un concept étranger à Stark. Comme les restaurants et autres bars devenus non-fumeurs !

Loin du cyberpunk des années 80-90, avec un Metrophage (Denoël, « Présence du futur ») déjà rempli d’aventures et d’un certain cynisme, la donne a changé. Des explosions, des bons mots (pas toujours de bon goût), des morts, des anges et des démons. Bref, le cocktail idéal pour se vider les neurones. Mais en tout bien tout honneur. Cette série B autoproclamée fonctionne à merveille. Les personnages ont beau être stéréotypés au possible, ils font mouche. Dans cet univers survitaminé et machiste, les femmes ont leur place. Pas de blonde évaporée et romantique. Des paumées, comme le héros, qui n’hésitent pas à frapper, voire à tuer quand le besoin s’en fait sentir.

Autre atout, le rythme : trépidant du début à la fin. Pas de chapitres dans ce roman. Tout s’enchaîne sans pause : les scènes d’action se suivent sans temps mort, appuyées par des dialogues efficaces. C’est en parfaite adéquation avec le personnage principal : il prend rarement le temps de réfléchir ou d’imaginer les conséquences de ses actes. Au grand dam de ses amis, comme de ses ennemis. Et du mobilier urbain !

L’auteur s’amuse comme un fou et convoque ses souvenirs de films. Ce n’est pas pour rien si James Stark trouve refuge dans un vidéoclub, le Max Overdrive Video ! Les anciens westerns flirtent avec les films d’action ou les films de guerre. Des choix qu’on croirait sortis de la vidéothèque de Quentin Tarantino se percutent : Le Bon, la Brute et le Truand précède Le bras armé de Wang-Yu contre la guillotine volante. Comme le héros de l’El Dorado d’Howard Hawks, celui de Sandman Slim a été blessé et des balles restent dans son corps, handicap permanent qu’il ne fera retirer que sur la fin. Clint Eastwood et autres justiciers sont régulièrement cités ou évoqués. D’ailleurs, dans une récente interview accordée au site internet ActuSF, Richard Kadrey dit lui-même que sa série « est un western spaghetti avec des gangsters ».

Alors que Kill City Blues, le cinquième tome de la série, sort aux Etats-Unis cette année, on attend avec une certaine impatience, en France, la suite de ce volet initial. Pour voir s’étoffer ce monde à peine ébauché. Pour replonger dans un L.A. fantasmé. Pour vivre à nouveau avec ce personnage qui carbure à l’alcool, à la nicotine et à la testostérone, Sandman Slim.

Raphaël GAUDIN

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