Seule dans l’espace : si le titre renvoie à Seul sur Mars d’Andy Weir, publié par le même éditeur, le pitch rappelle irrésistiblement Gravity. Pas de chance, ce roman n’est ni l’un ni l’autre.
Décembre 2067. Lorsque Maryam – May – Knox, commandante du Hawking II, astronef destiné à explorer le satellite jovien Europe, se réveille dans l’infirmerie de bord, elle ne se souvient de rien : ni de son hospitalisation, ni de la raison pour laquelle le vaisseau, gravement endommagé, dérive au large de Jupiter, ni pourquoi elle est la seule survivante à bord. Que s’est-il passé ? Surtout, comment revenir sur Terre alors que le Hawking II se déglingue à vue d’œil ? Sur Terre, justement, Stephen Knox, futur ex-mari de May, va faire tout son possible pour faire revenir celle-ci en vie, quitte à se battre contre vents et marées…
Certes, conquête spatiale n’est pas qu’une histoire de mecs : la récente sortie dans l’espace entièrement féminine effectuée par les astronautes américaines Christina Koch et Jessica Meir l’a rappelé – après un pataquès maladroit de la Nasa. Mais cela, la SF l’a compris depuis longtemps. Il n’empêche : ici, à commencer par May, qui ne semble douée que d’une émotion à la fois, les personnages ont moins d’épaisseur que les parois de la station Mir et sont desservis par des dialogues niais. Afin de justifier d’incessants flashbacks (où l’on voit que les années 2060 ressemblent à s’y méprendre à notre époque), l’héroïne est opportunément amnésique : un cliché qui mériterait d’être banni par la Convention de Genève.
Le roman fait pourtant illusion dans sa première moitié, avant que les prétentions hard science volent en éclat, à l’instar des vaisseaux spatiaux de ce roman – c’est-à-dire tout le temps et douloureusement. On passe de l’orbite jovienne à Mars en trois mois à bord d’un vaisseau amoché, sans avoir à se soucier de la navigation, traversant des champs d’astéroïdes où on n’y voit pas à dix mètres ; on juge bon d’effectuer un rendez-vous orbital à la frontière d’une atmosphère planétaire ; on accouche d’un bébé de cinq mois à ce moment-là, et sans trop de séquelles, apparemment, pour le grand prématuré. La suspension consentie d’incrédulité est violée par des incohérences calibre Saturn V – ça fait mal. Sans oublier un correcteur orthographique débile (ça ne peut être que ça, non ?), qui nous fait voir des capsules Mercure à la place de Mercury, des zodiaques à la place de Zodiacs.
À vrai dire, la meilleure chose à faire pour Seule dans l’espace, c’est de le laisser dériver vers l’oubli. La prochaine fois que S. K. Vaughn se pique de commettre un roman de SF, pitié, qu’il potasse davantage son sujet – ou s’en abstienne.