F. Paul WILSON, David J. SCHOW, Nancy Averill COLLINS, Ronald KELLY, Don D'AMMASSA, Graham MASTERTON, Paul Dale ANDERSON, Michael GARRETT, Brian HODGE, R(andy) Patrick GATES, Rex MILLER, Peter DAVID, Bill MUMMY, Richard Christian MATHESON, Michael
POCKET
320pp -
Critique parue en décembre 1998 dans Bifrost n° 11
Parrainés par ce bon vieil Alice Cooper — qui nous gratifie d'une préface aussi amusante qu'oubliable, ramenant tout à lui-même — ces dix-neuf récits d'épouvante consacrés au rock en déclinent les mythes sur tous les tons. Des mythes ne surprennent plus. Jouer du rock, c'est gagner l'adulation des foules, et toutes les filles faciles de la terre ; dans ces conditions on est prêt à vendre son âme au diable (au vaudou, à une guitare ensorcelée…) pour s'imposer sur la scène. Et si c'est la musique du diable, elle sera bien capable d'expédier le public dans l'au-delà (David Schow) ou, c'est plus original, de l'en faire revenir (Ray Garton). A moins que ce ne soit l'adulation des fans qui fasse revivre un groupe mythique (Brian Hodge), ou une tragédie célèbre (Michael Newton).
Mais on finit par se lasser de ce cocktail de sexe et de malédiction symptomatique d'un regard finalement extérieur sur le rock, même porté par ceux qui en écoutent régulièrement. Surtout quand les nouvelles sont courtes, portées par une seule idée — la deuxième fois qu'il a été question de sexe et de loups-garous, j'ai baillé. La plupart textes qui ne font pas appel à un ressort fantastique (Patrick Gates, Rex Miller, Richard Christian Matheson, Thomas Tessier), obligés de rechercher la terreur dans les perversions de l'âme humaine, en tirent plus de force et de potentiel de surprise. Leurs protagonistes paumés ne sont pas musiciens, mais prisonniers de leur rapport à la musique.
À mon goût, les groupes musicaux fictifs (un expédient rendu souvent nécessaire par les difficultés posées par l'usage de personnalités vivantes…) souffrent de la comparaison avec ceux qui leur ont servi de modèle, qui auront toujours plus d'épaisseur dans l'imaginaire du lecteur. On est loin du fabuleux Armageddon Rag de George R. R. Martin ! A contrario, Graham Masterton réussit bien son coup en mettant en scène Jimi Hendrix dans « L'enfant vaudou », ou F. Paul Wilson, qui fait de Bob Dylan un personnage périphérique. Curieusement, cette nouvelle, qui ouvre le recueil, est de la SF : un voyage dans le temps. Mais on sait bien que la musique est la clé idéale des réminiscences… et que le rock est mort, avec son avenir derrière lui ! Ce qui explique qu'autant de textes de l'anthologie versent dans la nostalgie, situés dans le passé ou mettant en scène des fans fétichistes ou des rockers has-been (Ray Garton réussit fort bien cet exercice).
Jerry Shirley conclut l'anthologie et domine de la tête et des épaules un volume tout compte fait décevant. Sans doute parce que lui connaît vraiment le rock, et son milieu, et met une image vécue et contemporaine de la scène de Los Angeles au service d'une intrigue surprenante, qui emprunte à la SF et à la fantasy autant qu'à l'horreur.