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Les critiques de Bifrost

Critique parue en octobre 2001 dans Bifrost n° 24

Inutile d'aller dans les étoiles pour peindre des sociétés étrangères, c'est ce qu'affirme Mike Resnick, l'Africain, qui a depuis longtemps trouvé sa source d'inspiration dans le continent noir. Après Ivoire, Kirinyaga et d'autres, il nous régale à nouveau avec ces huit récits (un de plus que dans l'édition américaine du présent recueil), qui témoignent de sa fascination pour l'Afrique.
Toutes les nouvelles n'appartiennent pas au champ de la science-fiction : à côté de textes apparentés aux contes et légendes, comme « Le Dieu pâle », davantage empreints de magie et de fantastique (dans « La Fine équipe », les colons anglais opposent aux Mau-Mau qui ont convoqué pour les défendre Hermès, un autre dieu antique), on trouve des récits proches de la littérature générale. « L'Exil de Barnabé » s'y rattache, qui présente un chimpanzé bonobo, très doué pour parler le langage des signes, rendu à la vie sauvage faute de crédits, forcé de s'adapter dans un monde dont il ignore les règles.
L'exotisme dont parle Resnick réside d'abord dans la mentalité particulière des Africains, comme l'apprend à ses dépens le Théodore Roosevelt d'un univers parallèle qui a décidé de faire du Congo belge une nation démocratique dévolue au savoir et au progrès (« Épatant ! »).
Malgré un décor très typé, Resnick touche à l'universalité, raison pour laquelle ses récits, limpides dans leur simplicité, parlent à tous. Dans « Mwalimu et la quadrature du cercle », il évoque les ravages de la guerre en imaginant que les représentants de la Tanzanie et de l'Ouganda s'opposent en un inégal combat singulier pour épargner à leurs pays les désordres d'un conflit. « Bibi », écrit en collaboration avec Susan Swartz, traite fort singulièrement du Sida : alors que les associations caritatives, malgré leur insistante bonne volonté, demeurent impuissantes, c'est l'ancêtre de l'homme, la Lucy des origines, qui intervient pour soigner son peuple décimé. Mais le récit le plus universel reste encore « Sept Vues sur la gorge d'Olduvaï », déjà publié dans la revue Galaxies, où des extraterrestres, en Afrique, interrogent des vestiges, recomposant à partir d'eux la fresque de l'humanité depuis ses origines jusqu'à sa formidable expansion dans l'univers et à son extinction… provisoire.
Au total, Resnick nous offre ici une magistrale démonstration qui prouve une fois de plus qu'en prenant l'Afrique pour thème, il parle à tous.

Claude ECKEN

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