Le décor : après la guerre des spores, seuls survivent les enders (plus de 60 ans) et les starters (moins de 20 ans), considérés comme les plus vulnérables et ayant donc bénéficiés du vaccin contre les spores du génocide. Le reste de la population a été décimé. Une dystopie sur la sécurité sociale ? Non, attendez la suite. Callie, jeune starter de 16 ans, tente de survivre avec son petit frère malade, Tyler. D’immeubles désaffectés en squats, elle doit tantôt échapper aux marshalls qui traquent les adolescents en errance pour les enfermer à l’institut 37, tantôt se battre contre d’autres perdus en quête de nourriture. Afin de se sortir de cette situation, Callie décide de louer son corps à… la banque des corps. Le principe : des enders fortunés, dont la durée de vie peut aller jusqu’à 150 ans, louent le corps de starters retouchés à coup de chirurgie esthétique, pour vivre ou revivre des expériences que leur corps ne leur permet plus : sport, soirée disco… Seulement voilà, le locataire de Callie a un autre projet : un meurtre.
Premier roman « jeune adulte » de Lissa Price traduit en français, paru dans la toute nouvelle collection « R » dédiée aux adolescents et plus des éditions Robert Laffont, Starters aurait pu nous convaincre avec autant de thèmes riches à explorer : culte de l’esthétique, le corps comme objet de consommation, esclavagisme organisé, quête de la jeunesse éternelle… En effet, sans être très originale, l’idée initiale du livre s’avère plutôt bonne. Sauf que le traitement laisse à désirer. D’abord, le roman est bourré de maladresses et souffre d’erreurs qu’on qualifiera de jeunesse (justement). Un exemple ? Un point d’ancrage fort de l’intrigue se trouve être une soirée organisée par la Ligue de la jeunesse, le 19 à 20 heures ! Information essentielle que l’auteur va nous rappeler au moins cinq fois. Le 19 à 20 h, le 19 à 20 h, le 19 à 20 h… Bon, c’est vrai qu’on est tatillon, mais quand même, c’est lourd. Et puis il y a quelques perles : « J’arrive au lieu de rendez-vous : une patinoire (…) il y fait très froid, à cause de la glace » ! Sans commentaire… Par ailleurs, les personnages manquent cruellement de profondeur, la réflexion sur le thème de l’esclavagisme légalisé, qui aurait mérité un développement étayé, est inexistante ou presque, sans parler de l’intrigue, qui, pour être honnête, se révèle cousue de fil blanc. Et on passe allégrement sur la mièvrerie de la romance : c’est mignon tout plein. Reste un texte rythmé plutôt bien ficelé dans sa mécanique. On reconnaît là l’expérience de Lissa Price en tant que scénariste. C’est au final un peu court et cela n’apporte pas grand-chose. Voilà donc un roman ado (plus que « young adult ») qui se lit vite, bien, facilement et sans prise de tête… c’est le cas de le dire. Il est très possible que certains adolescents apprécient le livre, mais l’âge du chroniqueur ne lui aura pas permis d’en saisir toutes les subtilités. Peut-être le second volet, Enders, à paraître en novembre 2012, complétera-t-il les lacunes d’un premier texte en définitive assez décevant. Pourquoi pas sur la plage, pour se détendre ? On ne voit que ça.