Sans en vouloir personnellement aux éditions Glyphe (à qui nous souhaitons une vie longue et heureuse) où à Jean-Michel Calvez lui-même (à qui nous souhaitons la même chose), force est de reconnaître que STYx est un roman qui fâche. Non quant à sa supposée nullité (qui interdirait tout bêtement d'en parler — encore que…), mais plutôt à son côté « raté » dans les grandes largeurs, malgré l'évidente sincérité de l'auteur, son style intriguant et ses développements inattendus. Trop long, mal découpé, parfois ridicule (quand les amants s'embrassent, on entend la musique des sphères et il y a du vent), fatiguant et passablement ennuyeux, STYx n'est pas vraiment une expérience littéraire inoubliable. Pourtant, son thème a de quoi séduire : le Sida. Transposé sur une planète lointaine colonisée depuis une dizaine d'années par l'humanité et dont les habitants souffrent parfois du STYx, Syndrome Transmissible par les Yeux, maladie mortelle qui aurait la pitié comme catalyseur. Jolie trouvaille, d'ailleurs, mais hélas, question Sida, il est difficile de s'affranchir du magnifique Rivage des Intouchables de Francis Berthelot qui plane quand même à quelques kilomètres au-dessus… Bref, le pari n'était pas gagné au départ, et Jean-Michel Calvez va droit dans le mur en négligeant un aspect fondamental dans la littérature (quelle qu'elle soit, d'ailleurs) : la crédibilité. S'il fallait résumer STYx en un seul mot, on pourrait dire qu'il est incroyable. Au sens le plus strict. On n'y croit pas. Pas une seconde. Jamais. Amer constat qui fait vite basculer le roman dans le ridicule et, hélas, l'agaçant. Comment croire à l'histoire d'Orfeu, journaliste un peu miteux traumatisé par un amour perdu qui cherche à comprendre la nature du STYx sur une planète à peine colonisée depuis dix ans, avec des indigènes (les « lutins ») qui respirent de l'oxygène (pratique), qui sont humanoïdes (pratique), qui servent parfois d'objets sexuels (pratique), qui s'expriment correctement en français (pratique) et dont les humains ne savent à peu près rien ? C'est simple, on ne la croit pas. Et ce n'est pas en cumulant l'histoire (trop ressemblante, qui plus est) d'Orfeu et celle de son frère Lucio, que Jean-Michel Calvez réussit à nous intéresser. Au contraire, même. On a plus l'impression d'avoir affaire à un roman bricolé à la hâte qu'à une œuvre construite, ambitieuse et au propos douloureux. Raté pour cette fois, donc, mais la plume de Calvez est suffisamment étonnante et intelligente pour nous donner envie d'en savoir plus.