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Les critiques de Bifrost

Tekrock

Tekrock

Roland C. WAGNER
L'ATALANTE
416pp - 19,90 €

Bifrost n° 14

Critique parue en juillet 1999 dans Bifrost n° 14

Alors que s'ouvre le procès du sectateur Odon et que se poursuit la prise en otage du wèbe par les intelligences artificielles, Tem, le détective privé doué du don de la transparence, est contacté par l'une d'elles, sa fidèle alliée Gloria, qui lui propose de mener une enquête pour le compte d'un dénommé Pépin de Pomme.

Le problème de ce dernier est simple : il s'est réveillé un jour, un demi-siècle plus tôt, apparemment âgé de vingt-cinq ans, mais sans le moindre souvenir de son existence passée. Ceci se déroulait durant la Grande Terreur Primitive qui a changé à jamais le visage de la planète lorsque la Psychosphère a interagi de manière cataclysmique avec la Réalité consensuelle. Et comme rien de ce qui touche à la Psychosphère ne peut laisser Tem, le mutant, indifférent…

Ce n'est là que l'un des prémices d'une intrigue complexe et polymorphe, mêlant les fils narratifs et les voix, au cours de laquelle vont réapparaître plusieurs personnages secondaires des quatre titres précédents de la série. C'est l'occasion pour Roland C. Wagner de dresser une galerie de ces portraits iconoclastes dont il a le secret.

De plus, Tekrock impressionne par la facilité apparente, résultat sans doute d'un travail en profondeur, avec laquelle l'auteur construit, pierre par pierre, un futur qui, sous ses atours psychédéliques, demeure très crédible du point de vue politique, économique et social. Plus même que la musique, omniprésente, c'est la notion de jeu qui fonde ce roman, à la fois dans les détails qui renvoient à ce qu'on est bel et bien obligé d'appeler le “patrimoine” de la SF (linotype Brown-Shrdlu, astronef Arthur C. Clarke, etc.) et dans la manière dont l'ouvrage répond à diverses questions soulevées lors des premiers volumes tout en en posant de nouvelles. Enfin l'intrigue policière, pourtant souvent présentée comme un simple prétexte, n'a jamais été aussi chandlérienne, ni sa résolution, lourde de symboles, aussi satisfaisante.

Moiré, chatoyant, mélodieux, pacifique et ludique, Tekrock prouve, s'il en était encore besoin, que Roland C. Wagner a franchi un nouveau palier en tant qu'écrivain. On attend désormais avec espoir, et non sans une certaine impatience, de voir où l'escalier conduit.

Pierre-Paul DURASTANTI

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