Rosalia AGUILAR SOLACE
ACTUSF
550pp - 24,90 €
Critique parue en avril 2025 dans Bifrost n° 118
Inspiré par l’univers et les designs du cultissime festival belge de musique électronique Tomorrowland, voici le début prometteur d’une trilogie intrigante. Car, au-delà de l’intérêt expérimental et commercial porté par le festival et ses très influents réseaux, et passés les références et les clins d’œil destinés aux nombreux spectateurs (des centaines de millions) des différentes éditions dudit festival, le livre est en lui-même suffisamment bien ficelé pour qu’on s’y intéresse et s’y plonge avec plaisir.
Le Monde de Papier vit en paix depuis des années quand l’Homme de Cendres, un mythe que tous croyaient éteint, semble réapparaître pour semer la destruction. Seuls les sages de la Grande Bibliothèque de Demain, ces gardiennes et gardiens de connaissances et savoirs millénaires, auraient le pouvoir de l’arrêter. Car seuls eux ont accès aux différents mondes reliés par la bibliothèque.
Dans ce (gros) volume initial, on suit plus particulièrement Helia, une sage qui représente l’Espoir, et Nù, une habitante du Monde de Papier, qui feront tout pour défendre le savoir et les connaissances humaines en menant, de découvertes en dangers, un groupe hétéroclite de personnages touchants rencontrés au fil de leur quête.
Tous les ingrédients classiques sont réunis : des personnages auxquels on s’attache — trop —, une bibliothèque magique, mystérieuse et géante qui s’ouvre sur une multitude de royaumes à explorer, des dragons, des robots (si, si), des élixirs incroyables, un Arbre-Mère qu’on rêverait de voir, un ennemi séculaire redouté de tous, des complots et des rivalités qui laissent présager du pire pour ce Monde de Papier fort inflammable…
Si la parabole est belle et onirique, le style, lui, est assez simple, avec des phrases efficaces, qui vont directement au cœur de l’action. Cela semble parfois un peu rapide, et mériterait probablement un soupçon de fard, mais le tout fonctionne, et l’envie de poursuivre l’aventure reste présente. Les personnages, eux, sont pour l’instant effleurés, et on aimerait les voir évoluer plus en profondeur, car les promesses chuchotées de révélations traumatisantes pour les lecteurs et lectrices sont nombreuses…
Même si ce premier opus ne révolutionne pas le genre (et tel n’était pas son enjeu), il propose un ensemble honnête et cohérent, et mérite qu’on s’y attarde. Le potentiel qu’on devine derrière ces quelques aperçus des différents mondes, des différentes histoires personnelles, des différentes politiques, des différentes mythologies, donne envie d’en savoir davantage. On attendra donc la suite littéraire avec un réel intérêt, mais sans impatience.
La curiosité se situera peut-être aussi dans ce qui se développera probablement entre les différentes plateformes digitales ou réelles du festival Tomorrowland, dans ce qui se construira autour de cet univers. Comment les artistes se répondront-ils à travers les différents supports ? En quoi cela nourrira l’intrigue du prochain tome ? Et enrichira l’expérience de lecture ? Histoire à suivre…