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Les critiques de Bifrost

Treize

Treize

Seth PATRICK
SUPER 8
576pp - 21,00 €

Bifrost n° 78

Critique parue en avril 2015 dans Bifrost n° 78

Premier volet annoncé d’une trilogie, Treize part sur une trame que l’on pense connaître, mais parvient à travailler sa matière avec ce qu’il faut d’originalité et d’efficacité pour emporter le lecteur blasé. Un page turner, comme disent les jeunes, dont on retient moins le style que le rythme du récit.

De nos jours, aux Etats-Unis. Les revivers sont capables de ramener les morts brièvement à la conscience, un bouleversement social majeur vu comme une chance pour beaucoup : il est dorénavant possible de faire ses adieux à ses proches, un service offert par quantité de sociétés privées. La police, bien sûr, a développé son propre corps de revivers intervenant sur les scènes de crime pour tenter d’extirper à la victime les circonstances de sa mort, et donc témoigner contre son propre assassin. Jonah Miller est l’un de ces légistes d’un genre nouveau, toujours sur le fil du rasoir de la santé mentale. Un reviver partage en effet les émotions ainsi que les pensées du défunt, ce qui le plonge dans une fusion empathique extrême — pas simple, lors d’un décès violent. Ainsi, Jonah ne doit jamais négliger de prendre ses médicaments ; le prix à payer pour ne pas perdre les pédales et optimiser son talent. Il est un des meilleurs, de ceux qui ont le plus fort pourcentage de réussite. Il est aussi un homme hanté : lors de sa dernière intervention, il a eu la très nette impression que quelque chose d’autre était présent avec la victime, quelque chose de maléfique tapi dans les ténèbres. Le roman démarre véritablement quand Daniel Harker — le journaliste qui, une dizaine d’années plus tôt, a révélé au monde l’existence des revivers — disparaît…

Entre les hallucinations qui le poursuivent et la conspiration qui se dessine à mesure que son enquête progresse, Jonah Miller risque de perdre bien plus que la vie. Il incarne par conséquent une figure narrative des plus classique, oscillant entre son traumatisme fondateur et les différentes épreuves appelées à le définir.

Le roman, qui développe un postulat fantastique, aborde non sans discrétion certains rivages bien connus de nos lecteurs amateurs d’horreur tout en incorporant des ingrédients propres au thriller, notamment quant au rythme du récit, la gestion du suspense et de ses rebondissements. L’ensemble tient grâce à la manière dont Seth Patrick explore les diverses conséquences de son postulat initial sur notre société. A ce titre, force est de constater qu’il parvient à dépasser la bonne idée pour livrer au final une intrigue solide.

Si l’annonce en quatrième de couverture de l’adaptation prochaine du roman au cinéma ne vous fait pas fuir (un classique, chez Super 8, à se demander s’il ne s’agit pas là d’un critère obligatoire…), ce livre propose ce qu’il promet : une lecture prenante et efficace. De quoi donner envie de revoir l’intégrale de séries TV comme Dead Like Me ou Pushing Daisies, qui exploraient à leur manière des thèmes similaires.

Étienne BARILLIER

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