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Les critiques de Bifrost

Unica

Unica

Élise FONTENAILLE
LIVRE DE POCHE
158pp - 5,10 €

Bifrost n° 51

Critique parue en juillet 2008 dans Bifrost n° 51

Voici un court roman qui, initialement publié chez Stock en 2007, est sans doute passé inaperçu de beaucoup d'amateurs de science-fiction lors de sa première incarnation en grand format. Un bouquin qui aurait pu le rester, inaperçu, sans la sagacité de Gérard Klein le Grand, seul et véritable maître de tout Bifrostien digne de ce nom, qui nous offre ici une seconde chance en rééditant ledit livre dans sa collection poche… Loué soit qui vous savez. Car de science-fiction, il est bel et bien ici question.

Vancouver. Demain. Herb Charity est flic. Mais pas n'importe quel flic. Il bosse pour la Cyber, une brigade spécialisée dans la traque des pédophiles œuvrant sur le net. Et Herb est sacrement motivé, il faut dire que sa sœur a été victime d'un de ces salopards — elle n'est jamais revenue d'un rendez-vous que lui avait donné un internaute… C'est comme ça qu'Herb a fait ses classes, tout seul, comme un grand, enfermé nuit et jour dans le garage de la maison familiale, oubliant jusqu'à ses cours, jusqu'à sa mère en plein naufrage affectif, pour se consacrer à la traque de ce qu'il y a de plus immonde sur la Toile dans l'espoir de retrouver sa sœur. Vous avez dit no life ? Sa vie d'expert à la Cyber prend un tournant nouveau le jour où Herb, alors qu'il s'apprête à arrêter un cyberpédo au petit matin, découvre un type pleurant du sang face à son PC. Puis un second quelques jours plus tard, tout aussi aveugle que le premier. L'enquête va révéler l'existence d'une bande de gamins, sortes de cyberterroristes bien décidés à éradiquer jusqu'au dernier des pédophiles grâce à un procédé nanotechnologique étonnant. Et à la tête de ces mômes, une énigmatique fillette aux cheveux blancs… Une concurrence que Herb est bien décidé à rencontrer.

Si Unica est manifestement le premier roman S-F d'Elise Fontenaille (alors qu'il s'agit de son septième livre), il ne fait aucun doute que l'auteur connaît ses classiques (Dick notamment, dont elle reprend d'ailleurs en exergue l'un des titres) et a parfaitement intégré les codes du genre. Extrêmement rythmé, référencé en diable, elle signe ici un excellent technothriller. Qui vaut surtout par le portait de son héros narrateur hanté par le souvenir d'une sœur disparue et qui se livre à une véritable vendetta alors qu'il est lui-même porté par une sexualité borderline — un chasseur se chassant lui-même et refusant de se l'avouer. Autre qualité à souligner : voilà enfin un auteur français capable de dépeindre une ville nord-américaine qui ne ressemble pas à un décalque parisien assaisonné d'Hill Street Blues. Fontenaille a vécu à Vancouver, ça se sent et c'est tant mieux. Si on regrette peut-être le twist final, téléphoné et artificiel, Unica se révèle néanmoins un excellent moment de lecture, un petit roman (joie !) S-F bien ficelé, glauque à souhait et porté par des personnages remarquablement brossés et sans excès de caricature (même si parfois, on y échappe de peu). Certes pas un roman majeur, mais une belle réussite tout de même, et une entrée en science-fiction pour Elise Fontenaille tout ce qu'il y a de remarquable. Encore, Elise !

Olivier GIRARD

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