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La Déesse noire et le diable blond

[Tu m’as tué.]

Les mots crépitent, s’estompent, reviennent, leitmotive obsédant.

[Tu m’as tué.]

 

Va-t’en, sale rêve ! Dégage ! Je dors ! Je dors ! Je dors ?

Ses bras, ses jambes, serrés, groupés. Position du fœtus. Autour d’elle, la douceur des draps entortillés. Tirer un pan de leur cocon jusqu’au crâne. Réfugiée. Protégée.

 

[Tu m’as tué.]

Ses mains se plaquent à ses oreilles. Impuissantes. La phrase accusatrice revient et cette fois se poursuit.

[Tu m’as tué, Andria Diou Del Logo. Sors de ce sommeil insupportable ! J’ai soif de tes sens. Je veux ta vie.]

1,99 €

Hydra

Hellas touche ses yeux, incrédule, terrifié de les trouver aussi secs que le corps de Lyse. Penché sur sa femme, il la fixe de ses yeux secs jusqu’à ce qu’ils le brûlent. Il voudrait pleurer, pleurer encore, arroser de ses larmes les seins, les épaules, le visage flétris de son amour perdu, mais il demeure immobile, courbé comme une pietà de plâtre, stérile, tari.

J’ai peur.

Le goût du sang vient sur sa langue et il s’aperçoit que ses dents ont scellé ses lèvres. Il n’a plus de bouche. Il ne veut plus avoir de bouche. Il doit réfréner les cris qui montent en lui. Il les mord avant qu’ils ne sortent.

Tais-toi, tais-toi, ou tu embrasseras la révolte et l’horrible folie te prendra, comme elle a déjà pris tes amis.

Il est vain de menacer le dieu impie qui vole toute l’eau de leurs femmes.

Dieu d’eau. Qui donne la vie, la mort et la folie.

Lyse, ne me laisse pas seul sur la rive, seul devant l’Autre, tout seul à décider de vivre ou de mourir.

Il soulève le corps dont il a tant aimé la souplesse et qui n’est plus que brindilles cassantes. Les bras de Lyse se ferment sur sa taille, ses yeux engloutis le fixent, sa bouche craquelée s’ouvre et, au fond de la cavité obscure, il voit la langue de sa femme bouger tel un animal prisonnier.

Deux mots chuintent, forcés contre le palais asséché :

« Emmène-moi. »

1,99 €

Cendres

Réfugiée dans ma case. Porte et volet fermés. Les ténèbres rabattues sur moi comme une chape protectrice. Je vous préviens, commandant, mon humeur est funèbre. Les hommes ! Votre rire résonne encore à mon oreille. » Vous avez peur de ces arriérées ? Elles ne s’apercevront de rien, je vous l’assure. »

Votre morgue n’a d’égale que votre infirmité à comprendre l’autre moitié de l’humanité ! Ces « arriérées » vous ont damé le pion, commandant. Il fallait réfléchir davantage à ce nom qu’elles ont donné à leur planète : « Cendres »… Vouer le passé aux flammes, ce n’est pas l’oublier.

Elles ont su tout de suite que le cristal greffé entre mes sourcils n’était pas un bijou scintillant. Vous serez sans doute déconfit d’apprendre qu’elles n’ont pas eu besoin d’exciser l’émetteur pour le neutraliser. Et guère plus heureux d’avoir trouvé ici matière à confirmer vos guerrières paroles : « Ça passe ou ça casse ! » Je vous ai détesté quand vous avez refusé de me fournir un autre système de com, mais elles l’auraient détecté : elles m’ont scanné entièrement. Elles ont extirpé l’enregistreur implanté dans mon bridge, et m’ont dit aussitôt, désinvoltes : « C’est l’affaire d’une heure, simple curiosité. Ensuite, on te le rend, puisqu’il ne permet pas d’émission à distance. » Je regrette que vous ayez manqué ce spectacle d’un ennemi à qui on a par négligence abandonné des armes et qui s’en réjouit. Je vous avais prévenu : si nous acceptons leurs consignes, pas d’infraction. Vous ne m’avez pas écoutée.

0,99 €

Arthro

Quand je me réveille, j’ai mal, et je trouve un goût de rouille à ma bouche. Je porte une main tremblante à mes lèvres, touche à la source de la douleur, la trouve chaude, poisseuse, palpitante. Je regarde mes doigts, rouges de sang. Mes oreilles résonnent. Juste avant que je sois arrachée aux bras de Niki, il y a eu ce bruit géant de papier qu’on froisse et qu’on déchire…

Nikola ?

Je me soulève sur un coude et le découvre, affalé dans un angle de la cabine. Il a les yeux ouverts. Sa tête forme un angle impossible avec son cou. Silence. Cette brutale absence de bruit est plus atroce que le son qui s’accrochait encore à mes oreilles. C’est une colle épaisse où je m’enlise. Mon cri de déni m’en délivre.

Pas Niki ! Pas lui !

Je rampe jusqu’à mon ami, tire son corps à la tiédeur trompeuse, son corps trop mou, privé de souffle, son corps déserté. Sur mes lèvres, le sel de mes larmes dilue l’âcreté de mon sang.

Hébétée, je reste de longs instants penchée sur Nikola avant d’entendre des appels inquiets, au loin, dans la coursive. La cloison m’offre un appui providentiel pour me lever. Toute entière concentrée sur la source des voix, sûre de trouver bientôt auprès d’elle un réconfort, je refuse de m’interroger sur l’inclinaison des murs. Par chance, la porte n’est pas bloquée. Je hasarde quelques pas qui chancellent, Maritza me cueille d’une main ferme.

« Zoé ! Merci mon Dieu, tu es vivante !

– Niki… Nikola… »

1,99 €

Imago

Prisonnier. Comme jamais. Son esprit enfermé dans son corps, et ce corps dans le noir. Ses yeux sont-ils ouverts ? Ses tentatives pour cligner des paupières ont échoué. Il a essayé de bouger ses bras, ses jambes, s’est aperçu qu’il ne lui en venait rien de plus qu’une sensation de membres fantômes… Ont-ils osé l’amputer ? La terreur l’engloutit, brutale, aveugle. Il voudrait hurler mais sa gorge rétive n’émet que des sons étouffés, indistincts. Seul son odorat est intact, qui lui livre une odeur animale, suffocante. Son corps ? Ces relents douceâtres s’exhalent-ils réellement de sa chair ?

Bloque ta respiration. Tu es paralysé. Si tu vomis, tu vas t’étouffer.

Il ne vomit pas. Reprend son souffle. Au moins, il respire, il ne mourra pas tout de suite. Qu’ont-ils inventé pour le torturer ?

Réfléchis. Tu as toujours su ce qu’ils te préparaient. En t’évadant. Jusque dans le coma, ton esprit savait aller chercher de quoi préparer tes ripostes.

Pas d’évasion, cette fois. Pourtant son corps est en éveil. Et si déplaisantes soient-elles, des sensations en proviennent. Il s’est trompé. Il n’est pas paralysé. Sa carcasse est capable de reptation. Assez pour qu’il éprouve à nouveau l’envie de hurler. Il est enfermé dans une sorte de sarcophage. Il lui suffit de se tortiller pour en éprouver les limites. Il hoquette, la gorge sèche, sûr qu’il commence à manquer d’air.

« La peur est meurtrière, chantonne en lui la voix de Maître Tengri. La peur est meurtrière. Quelle est la réponse à la peur, Victor Itzamma ?

– Contrôle et projection.

– Ne l’oublie pas. »

0,99 €

Alien bise

La planète luisait tel un saphir enchâssé dans la nuit. Massés devant le grand écran de la salle de contrôle, nous la regardions approcher.

« On dirait la petite sœur de Terra ! » s’est exclamé John Chamberlain d’une voix un peu rauque.

Nous avons tous hoché la tête. Notre pilote en second est une masse de muscles encline au romantisme ; pour une fois, son appréciation ne nous semblait en rien exagérée. La nostalgie nous serrait la gorge. Les années-lumière qui nous séparaient de notre système d’origine s’étaient abolies. Nous avions l’impression de rentrer chez nous.

Plus près, le globe azuréen s’est marqueté de bruns, de verts, de panaches immaculés. L’espace d’un instant, il a pris l’apparence d’une sphère-cocktail de Globe-trotter. À ce moment, j’aurais pu tendre la main pour le saisir et le gober.

Alors, sentir sa délicieuse explosion rafraîchir et picoter mes papilles, l’ivresse de la stimulation sensorielle s’emparer de moi, le flux et reflux des images, l’assaut des sensations surprises…

La planète a grossi dans l’écran de contrôle. Elle m’échappait. Quelque chose s’est crispé dans mon ventre comme je découvrais le dessin étranger de ses côtes.

Fermer les yeux, tenter de retenir l’image fallacieuse du monde originel. Trop tard. L’illusion s’est enfuie.

Dieynaba Diop a tourné vers nous son visage d’ébène aux traits de médaille précieuse. Pour être un as de la programmation, notre belle Africaine n’en est pas moins férue de culture antique. Elle a battu des cils avec ce naturel qui tour à tour m’agace et me ravit, puis elle a dit dans un souffle :

« Gaïa… Appelons-la Gaïa. »

0,99 €

La Fiancée du roi

« Vous allez mourir, professeur Vargas. »

Voix neutre. Pas un regard au-dessus des lunettes étroites dont on disait au labo qu’elles étaient un truc pour se vieillir, pour se donner une apparence de sérieux. Rhadamante Eléazar affectait de lire les papiers sortis de son imprimante. Belle et froide « comme un rêve de pierre ». Mes collègues, qu’exaspéraient ses airs distants, la surnommaient Rad ou Nada. Moi, je jouais en secret avec la deuxième partie de son prénom impossible : trouverais-je en elle l’amante ou la mante ? Même à cet instant, Rhadamante me fascinait.

Je secouai la tête. J’allais mourir ? Elle allait me déchiqueter de ses pattes griffues ? Je plongeai dans ses yeux d’ombre. J’éprouvais une sensation de vertige. Je m’entendis répondre :

« Nous mourrons tous un jour, docteur Eléazar. Le plus tard possible. Et vous le savez bien, je suis en pleine forme. »

Je la dévisageais trop ardemment pour manquer l’éclair de compassion qui traversa ses yeux. Mon corps se glaça. Le sang battait à mes oreilles.

« Vous allez mourir, professeur Vargas. Pas dans cent ans. Dans six mois, neuf au plus. Tumeur cérébrale massive. Inopérable. C’est la cause de vos céphalées et de vos vertiges. »

0,99 €

Hurlegriffe

Hurlegriffe ! Ils m’appellent Hurlegriffe ! Les hommes. Ces créatures à l’odeur blanche, au bruit blanc et dur.

Annsyphar, ma planète, ma douce, ma clémente Annsyphar, ils ont violé ton sol, profané tes fluides ; et moi, moi qui me ranimais à ta source, leur coquille de métal hurlant a failli m’écraser. Mes petits s’étaient déjà enfoncés dans la vase ; ils termineraient leur croissance à l’abri. Moi, j’étais sans défenses, sans prises sur l’espace ni le temps. Un corps dépeuplé de lui-même, dépouillé de son énergie.

Je n’étais pas inquiet. Même les Tors, nos prédateurs les plus cruels, observent une trêve au moment de notre parturition. Ils attendent un cycle. Lorsque les trois Dar-di-Ann ont fini de se pourchasser dans notre ciel de nuit et que la lueur de Syphar les éclipse, les Tors attaquent. Avant, nous sommes des proies trop faciles.

Je ne maîtrisais plus l’espace ni le temps. Je n’ai pas pu leur échapper. Des créatures aussi chétives ! Me capturer ainsi. Et pourquoi, puisqu’elles ne voulaient pas me manger ?

 

0,99 €

La Faim du monde

Cette nouvelle vous a été proposée gratuitement au téléchargement du 1er au 30 septembre 2010 !

 

Il fallait d’abord frapper le chien. Pour attendrir la viande ou au contraire saturer les tissus d’adrénaline, afin d’augmenter sa saveur. Sur ce point, les écoles divergeaient, mais toutes admettaient l’importance du rituel. Le premier assistant de Paul Veyne tira de sa cage l’animal à poil gris, couleur de hyène. Le meilleur choix. Contrairement à la vision simpliste des Occidentaux, n’importe quel chien ne pouvait convenir pour la préparation du Thit cho. A défaut d’un gris, on pouvait se rabattre sur un jaune tacheté de marron. Jamais un noir, réservé au traitement des maladies mentales, ce qui aujourd’hui aurait fait montre d’une impardonnable faute de goût. L’aide rôtisseur plaça le chiot sur son plan de travail et le frappa en répartissant uniformément les coups pour éviter les hématomes. La bête tenta de se dégager mais ses membres étaient entravés par un câble d’acier. Comme elle aboyait, Paul Veyne fit signe à un cuistot d’augmenter le volume de la chaîne. L’Art de la fugue interprété par Glenn Gould couvrit les hurlements. Le célèbre cuisinier Paul Veyne aimait travailler en musique.

« Diffusion dans quinze secondes. »

 

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Quirites

Le Superbe s’avachit sur son trône pendant que les licteurs, faisceaux à la ceinture et haches en main, canalisaient les entrants. Le spectacle de leur brutalité l’excitait. Il vida sa coupe avec un claquement de langue, ramena à lui les lourds pans de sa pourpre puis posa un regard sur les premiers plaignants. Deux Rom’, misérables et puants. Il grogna. Comment ces chiens osaient-ils quitter leur cloaque et venir réclamer justice ? L’Ancien les avait relégués aux tâches dépourvues de dignité. Parqués dans le Palatin, avec les déchets qu’ils étaient chargés de recycler. Tels des rats, ils y proliféraient. S’il n’avait tenu qu’à lui, ils auraient depuis longtemps fini dans le Foyer. Leur existence nuisait au lustre de la tyrannie. Mais l’Ancien lui avait appris la patience. D’ici deux ou trois générations, plus personne dans le Latium ne se souviendrait qu’ils étaient les rejetons du Premier Guide.

1,99 €

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