Swan Song
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Encore une fois, l’éditeur Monsieur Toussaint Louverture sait dénicher de véritables pépites du passé. Après une réédition de La Maison du Lac sous le titre Zéphyr, Alabama en 2022 (cf. Bifrost 107), la maison sort le grand-œuvre de Robert McCammon, Swan Song, jusqu’ici inédit en français. Coupé en deux beaux pavés (Le Feu et la glace suivi de La Glace et le feu), ce récit fleure bon le pulp apocalyptique teinté de fantastique comme savaient si bien en écrire les écrivains anglophones au pic de la Guerre froide. Normal, pour un livre publié à l’origine en 1987. Et pour le coup, l’éditeur enfonce le clou avec deux couvertures qui se répondent et reprennent les deux personnages féminins principaux : Sister Creep (sur la première) et Swan (sur la seconde), dans des poses apeurées – mais habillées – et sexys. Sans correspondre, hormis pour la couleur des chevelures, à la description des personnages réels. Comme souvent les couvertures d’époque.
Assez parlé de la forme, que vaut le fond ? Dans Swan Song, la Guerre froide devient tellement chaude que l’apocalypse nucléaire s’abat sur le monde. Bon, d’accord : sur les États-Unis, et accessoirement sur le reste de la planète, mais nous n’en parlerons plus passés les tous premiers chapitres. Le Président disparaît dans son Air Force One et ne répond plus… Nous allons suivre quelques survivants, d’abord dans les premiers jours et semaines suivant la catastrophe pour le premier volume, puis sept ans plus tard, alors que différentes poches de civilisation plus ou moins violentes tentent de renaître et de reformer leurs versions des USA. Et pour la touche fantastique ? Elle tient principalement en un personnage protéiforme et mystérieux, incarnation du Diable, qui va pister les deux protagonistes à tour de rôle et tenter d’anéantir ce qu’elles représentent : l’espoir. Le fantastique est également présent via des artefacts, comme l’anneau de Sister ou les cartes de tarots, et dans le pouvoir inexpliqué de Swan sur la végétation (qui date d’ailleurs d’avant l’apothéose nucléaire). Côté horreur, vous aurez également votre content de scènes chocs, particulièrement si vous êtes claustrophobes et si la peur d’être enterré vif vous paralyse.
On l’aura compris, avec Swan Song nous tenons un page turner efficace, bien ancré dans les années 80, que ce soit par l’utilisation des fax et le contexte de l’histoire (guerre froide, la foi comme outil de survie et de renouveau, une conception très judéo-chrétienne de l’affrontement entre le Bien et le Mal – impossible de ne pas songer au Fléau du roi King) ; mais également étrangement moderne : obsession militaro-religieuse de certains survivalistes, des femmes comme protagonistes, sans que celles-ci soient définies par le sex-appeal, bien au contraire ; un casting diversifié correspondant plus à la population américaine que la frange WASP habituelle des œuvres de l’époque. Et vous ne verrez pas les mille pages de ce pavé passer, malgré une fin un peu précipitée – comme souvent, là encore, dans les années 80.