Bifrost 87 : les critiques sont en ligne
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Les chroniques de livres du Bifrost 87 et son guide de lecture Jean Ray sont désormais en ligne sur la page Critiques !
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Les chroniques de livres du Bifrost 87 et son guide de lecture Jean Ray sont désormais en ligne sur la page Critiques !
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Dans son Journal d'un Homme des bois, Francis Valéry nous évoque ses dernières lectures en date Silverberg, Jack Vance, Randall Garrett et Ursula K. Le Guin…
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« Ce numéro de Bifrost consacré à Greg Egan permet de se familiariser avec l’écrivain de Hard-SF. Le dossier, complet, soulève quelque peu le voile au-delà de l’auteur et dévoile un homme passionné, positif ainsi qu’un des meilleurs défenseurs de la science dans son rapport à l’homme. » Albédo - univers imaginaires
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Découvrez sur le forum l'illustration de couverture, signée Aurélien Police, de Danses aériennes, recueil des meilleures nouvelles de Nancy Kress, en librairie le 23 novembre.
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Quarante-Deux fait sa sélection du meilleur de Nancy Kress !
Dans toutes les bonnes librairies depuis le 30 novembre !
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Comment aborder Saint-Judas-de-la-Nuit, assurément le récit de Jean Ray le plus difficile d’approche ? Tout simplement en annonçant que le roman va en quelque sorte débuter là où s’arrêtait Malpertuis, avec cette résurgence de Doucedame dans une phrase dérobée à Malpertuis et mise dans le « Prélude à Saint-Judas-de-la-Nuit ». Mais, plus qu’une réécriture, cet ultime roman de Jean Ray est une complexification de la structure de Malpertuis. On doit d’ailleurs avouer que la lecture en est particulièrement ardue, ce en raison d’un refus absolu de linéarité. Poussant à l’extrême le procédé utilisé dans Malpertuis, Saint-Judas-de-la-Nuit se présente en effet comme un roman du retardement et du difficile recentrement, avec son « Avertissement », son « Prologue », sa « Mise en place sur l’échiquier » puis ses huit chapitres entrecoupés de cinq interférences. La lecture est de même rendue difficile par ce déploiement en volets, où le lecteur est amené à douter en permanence de la temporalisation des extraits, et il en vient même à s’interroger sur des noms qui changent de graphie sans explication apparente, à l’image de Pierre-Judas Huguenin qui devient Judd, puis Hügenholz, l’auberge Les Sept étoiles que l’on appelle aussi Le Char de David, ou la ville que l’on présente indifféremment sous les noms de La-Roche-sur-Orgette ou La-Ruche-sur-Orgette.
Il apparaît donc nécessaire de repositionner la chronologie des trois quêtes du Grimoire Stein qui s’entremêlent dans Saint-Judas-de-la-Nuit. Néanmoins, sans doute faut-il aussi éviter de penser uniquement en résumé chronologique et suggérer que c’est définitivement dans cette forme même que l’on peut pleinement saisir la portée métaphysique que l’auteur entendait donner à son ultime roman. Jean Ray propose une épouvante véritablement existentielle : l’Homme a peur de refuser le sens commun imposé par le vocabulaire courant, mercantile (le jeu avec les noms d’auberge qui renvoient à une origine sacrée), et si les mots inversent leurs significations par des alliances et un jeu de regard sur eux, le monde ne serait qu’un illusoire équilibre. Structure de l’illusoire, ce roman, qui ne se prête pas au résumé, allierait son sens à sa forme même. On y verra là une grande réussite… ou un échec, à partir du moment où, dans les autres textes de Jean Ray, l’histoire porte la métaphysique, alors qu’ici la métaphysique emporte l’histoire.
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Le recueil, constitué après la mort de Jean Ray, regroupe des textes initialement parus dans la revue Golf. Exercices d’écriture sous contrainte, donc. Dans Les Contes du whisky, l’unité thématique donnait prétexte aux récits sans vraiment les influencer. Ici, le fond détermine les différentes variations formelles, et Jean Ray brasse large. « 72 holes… 36… 72 », « Seul dans le Club House » et « Mademoiselle Andrée Froget » traitent de tragédies amoureuses. « La Balle de l’engoulevent » s’intéresse à la sorcellerie, « Les Links hantés » et « La Chance des aigles blancs » sont des histoires de fantômes, « Hécate » et « EG-1405 » parlent de surnaturel exotique, tout comme le très beau « Monsieur Ram », histoire d’enfant martyr et de son ami pas si imaginaire que cela. « Le Mystère du dipclub » propose une vengeance à la Monte-Cristo. « La Grande Ourse » revisite l’un des thèmes classiques du fantastique, la boutique qui disparaît du jour au lendemain. « La Bête des links » offre un récit réaliste autour d’un tueur de femmes, tandis que « Le Plus ancien membre », « La Fin » et « Le Septième trou » relèvent du fait-divers. On retrouve aussi la parodie d’essai, exercice cher à l’auteur, avec « Le Vestiaire » et l’usage de références historiques, fausses ou avérées dans « Le Golfeur de Mabuse ».
On appréciera, à titre de clin d’œil, « La Balle volée », qui permet de retrouver le personnage de Si Triggs, héros malgré lui du roman La Cité de l’indicible peur (Alma, 2015), et surtout « Le Swing », récit d’une réjouissante méchanceté.
Un ensemble hétérogène, qui va de l’agréable à l’excellent, complété dans l’édition d’origine par une postface d’Henri Vernes.
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Ce recueil rassemble nombre de thèmes chers à l’auteur, traités à travers certains de ses meilleurs textes. L’hyper-géométrie sert de toile de fond à « Mathématiques supérieures », « Le Tessaract » et « Smith contre tout le monde ». Un fantastique de facture classique anime « Bonjour M. Jones ! » et « La Sorcière ». Le sordide quotidien s’illustre dans « Le Banc et la porte ». La tête autonome permet différentes variations, comme autant d’exercices de style dans « La Tête de Monsieur Ramberger », ou la tête vivante dans « Histoires drôles », florilège d’historiettes au comique absurde et grinçant. « La Sotie de l’araignée » revient à l’animal cher à Jean Ray depuis Les Contes du whisky (le nectar écossais laissant place pour ce recueil à la chartreuse verte, évoquée plusieurs fois). « Croquemitaine n’est plus », récit au ton flamand qui évoque le peintre James Ensor, est un bel exemple de la manière dont Jean Ray recyclait ses lectures (ici empruntées au Magasin pittoresque).
On retiendra surtout deux nouvelles, « Trois petites vieilles sur un banc », réinterprétation des trois Moires au fil d’un récit terrifiant, et surtout « Tête-de-Lune », probablement l’un des plus beaux textes de Jean Ray, illustration au vitriol de ce que Hegel appelait « le dimanche de la vie », soit l’idéal bourgeois du paradis, fait d’un plantureux déjeuner familial, suivi d’une promenade digestive. Sur le même thème, en mode comique, l’auteur propose également « Le Beau dimanche ».
Dans sa première édition, le recueil est complété par Le formidable secret du pôle, court roman pour la jeunesse signé à l’origine John Flanders. L’intrigue convoque Thulé et l’Atlantide et se place sous les auspices de Jules Verne et de Ridder Haggard, ce dernier donnant son nom à l’un des personnages. Un roman dispensable, qui ne sera d’ailleurs pas repris dans l’édition Alma en 2018.
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Publié en 1947, Le Livre des fantômes reprend des thèmes chers à Jean Ray, comme l’étrange fusion et confusion des mondes, avec ici, privilégiée, la relation « monde des vivants / monde des morts ». Mais cette fusion / confusion ne peut s’opérer que par la porte sensible de l’homme, par ce qu’il aime, qu’il juge bon, par ce qu’il désire et qui l’attire dans un piège. Aussi voit-on apparaître très distinctement la thématique du goût dans le recueil. C’est d’abord « La Choucroute », texte à la fois comique et inquiétant, où le narrateur, fin gourmet, reçoit de son ami un billet lui permettant de voyager sur n’importe quelle ligne de chemin de fer. Se laissant aller à l’aventure, il descend fortuitement dans une ville, qui ne semble abriter aucune âme : il se retrouve dans un restaurant, où il commande une fabuleuse choucroute qui s’enflamme et qu’il ne pourra jamais goûter. C’en est fait de lui. Tous les autres plats lui paraîtront fades en comparaison de ce qu’il n’a pu toucher, et ce « manque » lui fait irrémédiablement perdre son ami. Dans la nouvelle suivante, « M. Wohlmut et Franz Benschneider », un éminent professeur, M. Wohlmut, confisque à l’un de ses élèves une liqueur. Le père, venant s’excuser peu après, lui propose de taire le scandale et que tous deux profitent de la bêtise de l’adolescent. M. Wohlmut accepte avec joie et ils goûtent la fameuse liqueur. Bien mauvais acte que de ne voir là qu’un simple contentement des sens : les voilà projetés dans un monde sombre où se dessinent d’effrayants visages. Toutefois, ces hantises plutôt cocasses et parfois amusantes se doublent très vite de spectres plus sombres, comme la culpabilité qui poursuit le cousin Passeroux dans la nouvelle éponyme et qui contaminera celui chez qui il se réfugie. Désirant ardemment les perles d’un peuple vivant aux antipodes, Passeroux kidnappe la fille du chef afin de procéder à l’échange. Mais celle-ci s’échappe et, regagnant le rivage à la nage, est dévorée par les requins. Voilà Passeroux maudit. Cette culpabilité, c’est aussi l’inconscience du président du tribunal, M. Larrivier, dans la nouvelle « Maison à vendre », où le juge, dans sa froideur, est condamné à expier, une fois mort, l’ingratitude exprimée de son vivant. Enfin, la dernière hantise, c’est celle de la mort qui, de sa faux, parfois visible, parfois non, poursuit tout vivant. C’est « Mon fantôme à moi (l’homme au foulard rouge) » qui joue avec le lecteur par ses premiers mots : « Non seulement ceci n’est pas un conte, mais c’est un document » ; c’est aussi la découverte de la besogne de l’oncle Timotheus, dans la nouvelle placée à son étrange enseigne. Le Livre des fantômes apparaît donc comme le livre de la hantise, des puissances invisibles qui peuplent le monde et se jouent des mortels. Qu’elle soit religieuse, psychologique, ou même magique, la hantise remplit bien sa fonction, celle de hanter, et, une main posée sur l’épaule, d’orienter l’homme vers sa fin funeste.
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Il y a du jeu dans La Cité de l’indicible peur… Triggs, ce détective malgré lui, ne jauge ni ne juge les événements, mais il les fait pourtant jouer. Il permet ainsi d’aller au-delà du décor « plus british que british » de la ville d’Ingersham. Détective involontaire, il découvre non seulement un vrai trafic de faux billets, mais il fait aussi dire aux habitants des choses tues et cachées… Surtout, il fait jouer dans le roman cette alternance entre ce qui relèverait du roman policier et ce qui renverrait à la tradition du récit fantastique. Les deux perspectives se rejoignent, ce qui fait tout le sel du récit, au point que la critique ait pu avancer qu’il s’agissait là d’un faux roman policier, ou d’un faux roman d’épouvante. Si l’on semble donc s’écarter du récit fantastique, le lecteur pourra s’interroger sur cette ouverture historique de haute volée, avec cette « Grande peur » et ces « Ils » qui franchissent les siècles et parcourent l’Angleterre, avant d’atteindre la petite ville d’Ingersham, alors que les habitants n’ont que pour seules préoccupations gastronomie et sexualité. Que reste-t-il de cette « Grande peur » si Scotland Yard réussit à démonter la machination humaine ? Le lecteur pourra alors questionner le seul « vrai » fantôme du roman, qui erre solitaire dans l’hôtel de ville, sans que personne ne s’en préoccupe désormais.
Dis-moi qui tu hantes, je te dirai qui Ils sont, promettait en quelque sorte le début du récit. Dis-moi ceux que tu ne hantes plus, je te dirai ce qu’ils sont devenus, avance-t-il finalement… Ce qu’ils sont devenus ? Des personnages à l’écart de l’Histoire, qui refusent toute rupture, toute avancée, se contentant de profiter du présent, de ce qui est littéralement à portée de main. Pas de femme ? Un mannequin suffira. Pas d’homme ? Des repas et des objets les remplaceront. Pas de Dieu ? Un détective le supplantera. C’est ce règne du faux, des palliatifs, qu’invite à découvrir ce roman, avec un seul plaisir vrai : celui de la lecture.