Les escargots se cachent pour mourir
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Le titre loufoque donne une idée du contenu : les deux romans (initialement parus au Fleuve Noir et depuis longtemps introuvables) qui nous sont ici proposés figurent parmi les pires que Pagel ait pu commettre. Les pires, c'est-à-dire les meilleurs pour les amateurs d'humour déjanté, où les loufoqueries tiennent lieu de ligne narrative et où les jeux de mots plus qu'approximatifs sont l'expression d'envolées lyriques.
Pour une Poignée d'helix pomatias, le livre aux cent notes de bas de page, met en scène un héros pour le moins particulier : Chris Malet est en effet capable de s'introduire dans les intrigues romanesques dont il modifie la trame pour le compte d'une très secrète agence gouvernementale. Sommé de changer une scène secondaire d'un roman gore louchant sur Jack l'Éventreur, où l'héroïne s'empoisonne avec des escargots de Bourgogne, dans un restaurant français qui plus est, il apprend qu'il est lui-même un personnage fictif créé par un certain Pagel dont les apparitions intempestives prouvent qu'il est bien décidé à ne pas laisser les produits de son imagination modifier son scénario à leur guise. Outre les nombreuses références à Chandler, Hammett, Fleming, Ramsey Campbell, ce roman est également truffé de private jokes renvoyant à la condition d'écrivain, que les nouvelles notes de bas de page explicitent parfois pour ceux qui n'auraient pas connu le paysage littéraire à l'époque de la première parution.
Plus classique dans sa trame, hommage référencé au space opera, Le Cimetière des astronefs utilise les poncifs et les stéréotypes du genre avec une verve rafraîchissante. Gaba, contrebandier avec scrupules, part à la recherche du cimetière des astronefs pour le compte du richissime Aykip D. Foot, où se trouverait la Campanule Cosmique ayant appartenu à John I. Mustgotothe, où seraient enfouies les notes ayant permis à ce P.D.G. de devenir immortel. Il embarque à bord de Betty, son vaisseau déglingué qui manifeste sa jalousie quand il prend à son bord une pulpeuse blonde recherchée pour meurtre. Les péripéties qui s'ensuivent valent les meilleurs romans de Brown et la conclusion ébouriffante n'est pas sans rappeler Philip K. Dick, dans un registre toutefois moins métaphysique.
Comme le signale l'auteur, dans une préface sans doute appelée à devenir un morceau d'anthologie, il est difficile de trouver plus stupide. Mais, revendiquant haut et fort son attachement aux séries populaires auxquels ces livres très référencés appartiennent, il ne s'en excuse même pas, vu le délassement qu'ils lui ont procuré, et que le lecteur partagera sans doute. En ricanant bêtement.