Chroniques de la grande séparation
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Fut un temps, G.-J. Arnaud écrivit ses chroniques de « La Grande Séparation », publiées au Fleuve Noir (dernière édition en 2000). Rien à voir avec celles-ci qui sont « l’œuvre » de Gabriel Eugène Kopp.
Prologue : on nous montre quatre colons galactiques perdus qui récréent en un siècle une population viable et une civilisation, dans un recommencement accéléré qui évoque autant l’Ouroboros qu’une boite de Petri avant de se conclure en Planète des Singes. Ouch !
La suite nous décrira l’aventure spatiale qui a conduit ces explorateurs à devenir des naufragés et à se changer en Adam à trois Eve. Kopp nous explique donc pendant une centaine de pages comment l’Humanité, ayant admis l’impossibilité de la vitesse supraluminique ainsi que celle des vaisseaux arches, a développé une technique basée sur un « repliement (plus ou moins) de l’espace ». Il détaille les expériences, les échecs, les raffinements progressifs du concept et de la technique, jusqu’à la colonisation d’une bonne partie de la galaxie par l’espèce humaine, conduisant à l’abandon progressif de la Terre et à sa régénération écologique subséquente.
Pourquoi pas ? Mais, comme pourrait l’écrire Kopp, il y a maldonne.
En 1996, le physicien Alan Sokal réussit à publier un article de sciences sociales, que lui savait pastiche, dans la prestigieuse revue Social Text. Pompeusement intitulé « Transgresser les frontières : vers une herméneutique transformatrice de la gravitation quantique », Sokal y prouvait par l’exemple qu’il était possible de paraître brillant et post-moderne, jusqu’à leurrer un comité de lecture, en utilisant à l’emporte-pièce des concepts et des termes scientifiques durs mal compris et mal utilisés. Cet article fit ensuite l’objet d’une développement en France avec le livre Impostures intellectuelles (chez Odile Jacob), écrit par Sokal et Bricmont.
Avec Chroniques de la Grande Séparation, Kopp renverse la proposition. Il est un poète qui « écrit » une novella de SF, voire de hard SF. Il le revendique en postface comme une blague, celle d’un « imposteur guilleret » ou d’un « farceur ».
Problème : Kopp n’est jamais convaincant, jamais drôle, en plus d’être atrocement franchouillard.
Dans son texte, il n’y a aucun personnage qui dépasse le statut générique d’un pion de Monopoly, et aucune prospective ni réflexion intéressante sur les conséquences de l’évolution technique. Dans le but d’être « guilleret », je suppose, il offre au lecteur quelques vannes de bien piètre qualité et une bonne grosse rigolade sur des problèmes de pipi caca (ça fait toujours marrer). De plus, mais là, j’ignore s’il y a un but, il utilise régulièrement un vocabulaire argotique que n’aurait pas renié André Pousse, « bourrin », « piaf », « zozios », « on rase gratis », etc. Sans compter une déformation transparente de Galilée.
Quant à son « imposture SF », les néologismes et concepts qu’il invente rendent juste la lecture pénible, tant il accumule les mots boursouflés qui, peut-être, le font rire, mais donnent uniquement au lecteur l’impression très justifiée de perdre son temps sans rien comprendre. Qu’on me permette d’écrire que ce ne sont que billevesées et calembredaines hypnagogiques et superfétatoires.
Y a-t-il des lecteurs qui peuvent consacrer 9,50 euros et 1 heure 30 de leur vie à lire ça et en sortir satisfaits ? J’en doute.