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e-Bélial' Nouvelles

e-Bélial', c'est aussi de nombreuses nouvelles disponibles à la pièce et à petits prix, toujours sans DRM !

Chaque mois, Le Bélial' vous propose une nouvelle gratuite à lire sur le blog Bifrost ou à télécharger. De nombreuses nouvelles sont également disponibles gratuitement en permanence, un bon moyen de tester nos livres numériques avant d'en acheter pour de bon.

Certaines nouvelles sont extraites de recueil, vous les reconnaîtrez au symbole .

Disponible   À paraître   Bientôt épuisé   En réimpression   Épuisé

Le Crâne

Griaule n’est plus. Son corps colossal a été dépecé — sa peau, ses os, son sang, tout a été vendu. Cent ans après sa mort, de l’immense dragon ne demeure plus qu’un crâne, non moins gigantesque et qui fait l’objet d’un culte au Temalagua. C’est dans ce petit pays d’Amérique du Sud que se retrouve Craig Snow. Sa rencontre fortuite avec Yara, une étrange jeune fille, va l’amener à bientôt croiser le chemin de Jefe, nouvel homme fort d’une rébellion, apparu de nulle part…

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In Vino

Le menton appuyé sur la gouttière, les genoux plantés entre deux volées de tuiles, Grégory laisse son regard chuter dans la grande cour. Il aime ce vertige animal, cet émoi de faucon circonscrit par les quatre murs de l’institution Cithéron, son horizon à angle droit dont il partage le panorama grisâtre avec deux cents autres enfants. L’air vicié de la grande cour ne monte pas jusqu’au toit. Des courants le tiennent captif entre le rez-de-chaussée et le sixième étage. Les six derniers étages, jusqu’aux gouttières de plomb oxydé, délimitent le ciel de Grégory, son terrain d’imagination.

Épuisé  

Le Porteur d'eau

C’est une vallée désertique, terre craquelée, arbres morts, pelade d’herbes jaunes moribondes. Sur les flancs ravinés des collines, des souches calcinées, de la caillasse, des broussailles épineuses et revêches, de la poussière qui volute au moindre souffle de vent. Les empreintes d’anciens champs, des vestiges de clôtures. Au creux de la vallée, quelques fermes en ruines gisent le long de routes défoncées, dont l’asphalte est réduit à l’état de plaques noirâtres. Sur les rives pierreuses d’une rivière asséchée s’étend un village, dont le centre est enclos d’une grossière palissade de tôles. Hors de l’enceinte, les maisons sont abandonnées, écroulées ou incendiées. Une zone artisanale en friche arbore les carcasses dénudées de bâtiments industriels, entourés de traces de parkings envahis de moisine, où achèvent de pourrir deux ou trois épaves de voitures sableuses et mangées de rouille. Au milieu du village, un pont effondré, rafistolé de bric et de broc, enjambe la rivière. Quelques panneaux solaires décatis s’étalent sur les toits des maisons. Quatre éoliennes de guingois tournent en grinçant. Surgissant au-dessus des collines pelées, le soleil se lève sur cette désolation, énorme, boursouflé. La journée s’annonce torride, comme d’habitude.

Épuisé  

Une forêt de cendres

En Angleterre, dans un avenir indéterminable, où les archaïsmes côtoient les résidus de la technologie…  Duc du Dragonshire et possible descendant d’Uther Pendragon, Paul of Perth a dédié sa vie à combattre le cercle de ténèbres qui broie la réalité, chaque jour davantage, et étrangle jusqu'à l'idée même du bien...

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A l'heure du loup

« L’homme est un arbre qui s’ignore. Aujourd’hui nous disparaissons. Demain les loups viendront. Ce n’est que justice. »

Dernier Frêne, l'homme-arbre, parcourt un monde d’après la fin du monde. En lui, en sa sève, il porte l'espoir d'une renaissance... Son périple l’amène à rencontrer Lise et Anne, deux orphelines. Mais les étoiles s’éteignent et l’heure du loup est proche de sonner.

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L'Erreur

Londres, bientôt. Big Mama déverse à longueur de journée ses Horror News, chroniques d’un monde en déglingue. Un jour, c’est au tôt de Darrell Jhune. Darell, qui a vu la fin du monde dans les « douze dragons renversés », une série de graffs qui sont autant de visions de l’Apocalypse et du Paradis terrestre. Darrell qui, maintenant, doit réparer l'Erreur...

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La Mécanique des profondeurs

Dans une ville d’Amsterdam partiellement engloutie surnagent les Bulles, enclaves à l’abri des eaux et zones sans loi où sévissent les trafics les plus crapuleux. Mutante amphibie, Ozzie est une tueuse impitoyable, en traque d’un serial killer, plus proche d’elle-même qu’elle ne l’imagine. Elle devra apprivoiser la mécanique des profondeurs pour enfin trouver sa place dans un univers au bord du gouffre...

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La Notion de génocide nécessaire

Pour faire profiter les humains de leur technologie avancée, les Archontes, puissants extraterrestres, édictent des conditions draconiennes. Comme le recensement de toute la population mondiale. Au service d’une Organisation des Nations Unies des plus fantoches, Ismaël Kashoggi a été chargé de recenser les tribus nomades de Mongolie. Surtout, il devra empêcher un génocide programmé...

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Démon aux yeux de lumière

Il est Loki, le démon aux yeux de lumière, celui qui a provoqué le Ragnarok, du jour où il est ressorti des entrailles de la terre, en libérant le monde de dieux moribonds, pâles reflets d'eux-mêmes... Au volant de sa Porsche, les Rolling Stones à fond dans l’autoradio, il fonce vers la Chine. Il boit, il baise et il fait des blagues nazes. Jusqu’au moment où il rencontre Cybèle, jeune mortelle qui changera sa vie à un point qu’il ignore encore.

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Le Goût du sang

Lors de la fête qu’il donna à l’occasion de son départ de Siléna, Herbie-V. Quinn eut la surprise de retrouver son vieil ami Anouar-V. Ben Hassan.

 

Cela faisait presque un siècle T.U. (Temps Universel — c’est-à-dire temps de la Terre) qu’Herbie résidait sur la première en date des colonies spatiales humaines. Durant plusieurs décennies, il y avait exercé la profession de sherlock privé, bâtissant peu à peu sa réputation jusqu’à pouvoir augmenter ses tarifs, travailler moins et se consacrer à une tâche autrement importante : la reprise de ses études.

 

Pour un Mbuti né dans la forêt de l’Ituri quelque huit cents ans plus tôt, bien avant l’Ère de la Fusion, avant même les Grandes Guerres et l’Ère Néo-Œcuméniste, pour un être quasi primitif au moment de sa transvitation, il s’était d’ores et déjà doté d’une solide culture mais n’avait jamais eu le temps ni l’occasion de poursuivre des études supérieures. Voilà pourquoi il s’était inscrit à l’U.N.A.S. (Université de La Nouvelle-Aube, Siléna) en section biologie, choisissant vite la spécialisation vampirologie. Son diplôme en poche, il avait fondé son propre laboratoire de recherche, alimenté sur le plan financier par la résolution sporadique d’énigmes criminelles au bénéfice de riches clients.

 

Épuisé  

Les Mondes de Rempart

Rempart

2019.

C’est cette année-là que les Bouches se sont ouvertes. Deux d’abord, une au-dessus du Pacifique et une autre au milieu de la mer de Chine. Rien de grave pour la sécurité mondiale : ce qui en sortait, la plupart du temps, tombait dans un grand « plouf », se débattait quelques secondes avant de se noyer. L’avantage d’avoir beaucoup d’océans…

Le choc a été brutal pour les grandes religions : le choc de l’innocence perdue. Par contre, pour un paquet de sectes, ça a été du pain bénit, tous ces aliens qui déboulaient sur notre belle planète bleue. Mais ensuite, même elles ont été débordées. Trop de variété, trop de biochimies, trop de langages différents… trop tout court. Car d’autres Bouches se sont ouvertes sur la terre ferme.

Par dizaines.

Épuisé  

Je suis l'ennemi

Johnny a beaucoup dormi ; on a déplacé sa cage tôt ce matin, il n'est plus stocké dans le laboratoire de cryotechnologie. Sa prison se réchauffe peu à peu, et par voie de conséquence son corps devient plus souple : il peut de nouveau se déplier dans la sphère de Walton sans risquer de s'effriter, de casser net, comme un glaçon sur lequel on verse du thé brûlant. À quelques mètres à peine, dans la coursive, des soldats discutent. Johnny réorganise sa structure pour entendre ce qui est dit. Quelqu'un tente de relever la section de garde, mais un des hommes qui est de faction depuis une bonne heure, probablement un sous-officier, proteste en essayant de ne pas trop hausser le ton. Johnny redouble d'attention — depuis qu'on l'a trimbalé d'un bout à l'autre de la station orbitale, il a vu tous les comportements possibles et imaginables. Il a contemplé le regard dément de celui qui admire son ennemi, le regard éveillé de celui qui le craint et le regard avide de ceux qui espèrent pourvoir utiliser ses talents hors normes.

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Rêve de Chine

Été 1930. Dans l'Himalaya des premières grandes aventures automobiles, l’expédition française Turpin-Audouard ne cesse de grimper, plus haut, plus haut, toujours plus haut, vers des altitudes aussi inespérées qu’improbables, vers une Chine dont elle s'éloigne peu à peu... Quel monde perdu se trouve au bout du chemin ?

Épuisé  

Swing, puzzle, Harlow

Harry Hakeley est fatigué. Monteur de spectacles débauché de Broadway pour exercer son talent à Hollywood, il regrette New York comme il peine à faire aboutir son nouveau projet, La Fille de Broadway. C’est que les producteurs s’inquiètent des extravagances du film : costumes païens, géante sculpture pleine de tentacules et chansons aux chœurs imprononçables. Quelque chose d’aussi ancien que profond menace dans les coulisses…

Épuisé  

Incidents de villégiature

Antoine n’aurait pas dû accepter l’invitation de son ami Germain. Cela lui aurait évité de finir retranché au sommet du phare de Quiberon, armé d’un fusil, faisant face aux forces de l’ordre. Pourtant, il s’agissait juste de passer un weekend en bord de mer, loin de l’agitation de la vie parisienne, dans une campagne bretonne si tranquille, si agréable que personne n’aurait envie de la quitter.

Épuisé  

Nos anges sont de fiel

Mortagues s’en vint à la Tour Noire. Elle est haute, cette Tour, si haute qu’elle tutoie les étoiles, et si loin qu’elle en paraît inaccessible. Surtout, elle est située sur une autre planète, éclairée par trois soleils et peuplées de créatures ailées surnommées « anges ». Mortagues veut l’atteindre, rencontrer ses habitants et trouver réponse aux questions qui l’obsèdent.

Épuisé  

Temps morts, morte saison

Naëlle est malade. Va mourir. Avec Jacques, elle s’octroie un dernier voyage, une lune de miel à rebours sur les traces de celle qu’ils ont vécu dix ans plus tôt. Retour sur les côtes bretonnes, littéralement figées par un phénomène aussi inexpliqué qu’inexplicable qui les suspend hors du temps.

Épuisé  

L'Homme singulier

Vous êtes poursuivi par la DST., traqué sans relâche... Pourquoi ? Peut-être à cause d'un don qui fait de vous l'homme singulier… l’homme d’une singularité. Au sens physique du terme. Un don, peut-être. Une malédiction, sûrement.

Épuisé  

L'Ultime réalité

Après huit ans d’absence, Olivier Perrin revient sur le site du grand accélérateur de particules. Pas pour le travail, mais pour inspecter le bureau de son ami et ancien collègue Jérôme Leverrier, probablement suicidé. Leverrier était en quête de la réalité ultime via la physique des particules. Aurait-il découvert derrière les secrets de la mécanique quantique une présence qui menace

Épuisé  

Les Architectes du rêve

Un voyage virtuel dans le Paris libertin des années 1960 vous intéresse ?… Il suffit tout simplement de céder vos souvenirs, contre une somme fort rondelette. Néanmoins, qui vous assure que les architectes du rêve ont tout prévu ? Que les souvenirs n’ont pas été falsifiés ?

Épuisé  

Les Visages de Mars (nouvelle)

« Le globe rouillé de Mars esquissait un rictus sur le fond velouté de l’espace, masque de carnaval grimaçant dans la nuit. La cicatrice de Valles Marineris figurait la bouche, et les volcans de Tharsis les orbites inexpressives de ce visage étranger, définitivement non-humain. »

La première mission humaine pour Mars s'est probablement écrasée sur la planète rouge. Quel mystère, vieux de plusieurs millions d'années, se cache derrière Cydonia Face, le légendaire visage de Mars ? A-t-il dévoré l'équipage naufragé ?

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Averse cosmique

Oubliant qu’il se trouvait à 50 000 unités astronomiques de la Terre, Linus Archibald Benedetti batifolait dans la neige fraîche comme aux plus belles années de son enfance.

Profitant de la micro-gravité, le géophysicien alternait bonds et cabrioles, envolées et pirouettes dignes d’un trapéziste de cirque. A chaque fois que ses bottes reprenaient contact avec la neige, un nuage de flocons s’élevait majestueusement dans la nuit.

Les flocons atteignaient des hauteurs insoupçonnées, puis mettaient des heures à retomber. Les premiers de ces nuages — ceux qu’il avait créés en sortant du camp de base, une demi-heure auparavant — étaient encore visibles. Figés à différents stades de dissipation, ils balisaient son périple le long des filins de sécurité comme autant de spectres emmaillotés dans leur linceul de neige.

Abstraction faite du scaphandre dont il était revêtu et de la pesanteur, Linus aurait pu se croire sur Terre, par une froide nuit d’hiver. Aucune irrégularité, dune ou congère, ne troublait l’uniformité du manteau neigeux. Dans le ciel dépourvu d’atmosphère, l’éclat des étoiles blessait les yeux. L’une de ces étoiles, en direction de Persée, attirait l’attention par sa brillance légèrement supérieure aux autres : le Soleil, l’astre du jour des terriens, rendu insignifiant par la distance.

Les constellations étaient familières, quoique orientées différemment par rapport à la Terre. Un quartier de lune fantomatique rasait l’horizon oriental. Quasiment invisible du fait de l’éloignement du Soleil, le satellite de la nouvelle planète ressemblait comme un frère à celui éclairant les nuits terrestres. Même taille, même distance à la planète-mère, et surtout, mêmes configurations géologiques.

« Alors, professeur Benedetti, on s’éclate?? »

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Les Enfants de Mercure

La tribu, bien qu'épuisée par le froid du tunnel, s'était suffisamment reposée, décida Cils-d'Or.

Il était maintenant temps de combattre.

Elle monta dans l'eau glacée, les nageoires en action, et se prépara à conduire le groupe en avant, le long du tunnel de glace vers la caserne qui contenait la nouvelle Cheminée.

Mais, alors que la tribu arrêtait de paître et se massait derrière elle dans l'eau froide et croupie, la résolution de Cils-d'Or vacilla. Le Quêteur s'avérait telle une lourde présence à l'intérieur de son corps. Elle pouvait sentir les tentacules lovés autour de son estomac et elle savait que les filaments avaient déjà pénétré son cerveau, son esprit, son être.

D'un battement de nageoires, elle propulsa son corps dans le tunnel. Elle ne pouvait pas se permettre de montrer de la faiblesse. Pas maintenant.

« Cils-d'Or. »

Un corps large et chaud sortir de la foule et vint à travers l'eau turbulente toucher le sien ; il s'agissait de Nageoires-Puissantes, une des Tri?épouses de Cils-d'Or. La présence de Nageoires-Puissantes lui apporta un réconfort immédiat. « Cils?d'Or. Je sais que quelque chose ne va pas. »

Cils-d'Or envisagea un moment de nier mais elle se détourna, son malaise s'aggravant. « Je savais bien que je ne pourrais pas avoir de secrets pour toi. Crois-tu que les autres le sentent aussi ? »

Les cils qui recouvraient comme une chevelure le ventre de Nageoires-Puissantes vi-braient à peine lorsqu'elle parlait. « Seule Née-De-La-Glace soupçonne que quelque chose ne va pas. Et si ce n'était pas le cas, nous devrions le lui dire. » Née-De-La-Glace était la troisième des épouses de Cils-d'Or.

« Je ne peux pas me permettre d'être faible, Nageoires-Puissantes. Pas maintenant. »

Épuisé  

Le Cimetière des toucans

La ville de Veistos, placée sous le patronage de Saint Hubert, se trouvait à la jonction de trois forêts. Les deux premières, giboyeuses à souhait, étaient le lieu de prédilection des chasseurs. Celle du sud-ouest abritait des hardes de cerfs, de daims et de chevreuils : les gars l’appelaient avec cynisme le bois des Cuissots. Quant à celle du sud-est, qui regorgeait de lièvres, de levrauts et de lapins de garenne, ils l’avaient baptisée le bois des Civets.

La troisième, tournée vers le nord, portait le nom sinistre de Bered-Maa.

En raison d’obscures légendes, personne ne s’y aventurait jamais. Seul un sculpteur, Quentin, s’était installé à la lisière, dans une cahute qu’il avait bâtie de ses mains. Un refuge contre le désespoir : veuf, âgé d’une quarantaine d’années, il l’avait construite après la mort de sa femme et de leur jeune fils, emportés un hiver par la fièvre grise. Depuis, il y vivait loin du tumulte de la ville, cherchant dans l’art la force de surmonter son deuil.

Le pain lui était fourni par le frère du meunier ; le lait par une fermière du voisinage. Pour les légumes et les fruits, il se contentait de ce qui poussait dans son jardin. Il ne se ren-dait à Veistos que de temps en temps, pour y acheter vêtements, outils ou viande salée. Bien que peu loquace, il savait encore se montrer aimable. Les rides creusées par le chagrin ne lui avaient pas durci le cœur. Jadis, on s’en souvenait, il avait été un joyeux compagnon. Mais si on lui faisait bon accueil, c’était surtout pour son talent : il venait vendre sur la place du marché le produit de son travail – des objets devant lesquels les amateurs ne pouvaient que s’émerveiller.

Il ciselait des œufs. De la taille du pouce pour les petits, de la main pour les plus grands, il y sculptait des scènes d’une finesse admirable : qu’elles soient guerrières ou pasto-rales, elles semblaient plutôt tissées dans la dentelle que taillées au burin. Et l’on n’en finis-sait pas de s’ébahir devant une telle métamorphose de la matière en beauté.

La matière, certes… Mais quelle matière ?

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Je ne suis pas une légende

A L’EPOQUE OU MALO rencontra son premier vampire, il frôlait la dépression.

Après deux ans de bons et loyaux services en tant que Life Time Value Manager chez Johnson & Johnson, une persistante absence de cravate doublée d’une regrettable propension à quitter le bureau en sifflotant sitôt son travail bouclé lui avait valu une mise au placard définitive. Dans les premières semaines de sa relégation, il essaya d’inverser la vapeur : il mit une cravate noire imprimée de petits ours rouges et passa de longues heures supplémentaires près de la machine à café.

Peine perdue.

Il était trop tard.

Beaucoup trop tard.

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Le Sourire cruel des trois petits cochons

ADELINE AVAIT TOUJOURS deux kilos à perdre, un travail à durée déterminée et des opinions bien arrêtées sur une douzaine de séries télévisées. En clair, c’était une fille terriblement banale, hors cette habitude, dont elle n’avait jamais réussi à se débarrasser, de s’endormir avec une grosse boîte à gâteaux vide serrée contre elle.

Elle parcourait ses rêves, la boîte sous le bras, et la ramenait emplie de brimborions oniriques. Une fois, c’était une canne sauteuse, une canne en bois noire ramassée dans un cauchemar idiot, qui sautillait tout le temps et qu’Adeline, à bout de patience, enterra nuitamment près d’un calvaire de Rostrenen (elle doit toujours y être). Une autre fois, c’était un bon litre d’eau de lac de fée, qu’Adeline avait mis en bouteille et posé sur sa table de nuit. On y voyait parfois passer le visage idiot d’une sirène ou le regard gélifié d’un noyé. Adeline conservait aussi une petite robe de perles de jais dans laquelle elle ne rentrait plus, un optique de feu rouge en plastique bleu, une poignée de sable dévoreur, un pot de miel impossible à vider, une plaque de rue émaillée « boulevard Higelin » et une paire de ciseaux en cuivre couverts de reflets d’yeux verts.

Ce dont Adeline rêvait, ou plus exactement ce qu’elle voulait et dont elle n’arrivait pas à rêver, ce qu’elle avait toujours cherché et jamais trouvé, c’était une baguette magique. Elle savait exactement quoi lui demander et dans quel ordre, tant elle avait passé d’heures à ordonner ses désirs. Elle la découvrit finalement, un matin de ses vingt-trois ans, alors qu’elle abordait le rivage amer du réveil après un voyage au bout de la mer infinie — là où la mer se recourbe, quand l’île que vous devez bientôt aborder se trouve juste au-dessus de votre tête, verte et noire dans son lagon d’eau claire, et que des fruits en tombent pour rebondir sur le pont de votre bateau… La baguette était là, dans la brume épaisse des frontières du rêve, plus fine qu’un cheveu, intermittente. Adeline tendit la main, referma sa boîte et se réveilla.

Elle souleva doucement le couvercle : la baguette y était toujours.

 

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L'Immaculée Conception

Pour la première fois de sa vie, Claude se regardait vraiment dans sa glace. Sous le néon de la salle de bains, son reflet grumeleux de boutons lui adressait un regard fixe de poisson mort qui ne lui apprenait rien. Elle aurait pourtant bien voulu savoir comment elle se sentait. À force de fixer ce visage aussi immobile qu’une flaque de dentifrice, une baudruche d’angoisse commença à gonfler dans sa gorge. Elle se détourna du miroir, prit sa brosse à dents, la considéra : ce n’était pas l’heure de se brosser les dents. Elle reposa sa brosse. Elle se massa la nuque, sonnée comme la fois où une collègue pressée lui avait donné, en passant, un coup de listing. Elle posa la main sur son ventre puis la retira brusquement, et resta dix secondes à regarder sa main, organe étrange capable de commettre un geste aussi… aussi… La baudruche enflait. Claude s’assit au bord du lit, aussi pesante qu’un sac de plâtre. Puis elle se leva et alla boire un verre d’eau. La voix du Docteur résonnait dans les coins du studio :

« Ça arrive, Docteur, qu’on ait des enfants… euh, sans… enfin, sans être allé avec un homme ? »

Rire pointu.

« C’est arrivé une fois, oui. Il y a 2000 ans. Pourquoi ? Vous nous faites une immaculée conception ? »

Rire pointu.

 

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Vergiss mein nicht

L’IEPT (Institut d’Etudes Polyvalent du Trident) est un préfabriqué provisoire depuis vingt ans, auquel quelque architecte fou ou ivre a donné la forme d’un cancer généralisé. Cette monstrueuse tumeur de béton répand ses métastases au bord du canal Vieux Baiser, crachant ses élèves par trois sorties : l’une, côté sud, dégringole jusqu’à la nationale, l’autre, côté est, mène à un puits de boue pompeusement nommé stade, et la troisième, plein nord, à la cité universitaire. Il devrait y en avoir une à l’ouest, mais c’est là que passe le canal. Qu’aucune sortie ne donne sur cet égout est la seule preuve de l’intervention d’un cerveau raisonnablement pensant dans la conception de l’IEPT.

La ZI du Trident prolifère sur dix kilomètres autour de l’Institut, jusqu’à la ville de Haussun Sassey ; on la voit de loin, à cause de son dôme de smog. Quand on arrive des hauteurs d’Haussun, et pour peu qu’il fasse beau, la vue est d’une splendeur martienne : les infrastructures des usines étincellent au fond de la brume délétère, les tuyères luisent comme des anguilles, le dos rond des hangars ruisselle de soleil.

Vu de près, c’est moins gracieux.

Tout l’IEPT rêve de mettre la main sur le type qui a ainsi appliqué à la lettre l’idée pleine d’esprit de rapprocher le monde universitaire de celui de l’entreprise. Lui mettre la main dessus et ensuite, lui faire prendre un bain dans le canal. C’est un fantasme sadique, car Vieux Baiser charrie l’intégralité des déchets industriels du Trident plus une bonne partie des déchets domestiques de Haussun Sassey. Un centre de traitement des eaux usées est censé intervenir quelque part en amont, mais ce sont des rumeurs peu dignes de foi.

A hauteur de l’IEPT, on a installé le long du canal un grillage protecteur que les émanations acides ont depuis longtemps réduit en loques. Les panneaux « Baignade interdite » ont fait rire des générations d’étudiants : la mousse qui recouvre Vieux Baiser, nuancée depuis le jaune pisse jusqu’au vert morve et secouée de brusques remontées de gaz, donne envie de vomir, de fuir ou d’éteindre sa clope mais jamais — jamais — de nager.

Tout ça n’empêche pas l’IEPT d’être « une bonne université remplie de bons profs avec du bon matos ». Je me récitais cette devise quand je sentais la foi me quitter, et chaque fois je faisais un petit bâton sur un petit carnet. Dès que j’avais une pleine page de petits bâtons, je sautais dans mon cendrier roulant, une R5 en ruine, et filais vers Hauss boire un peu d’oxygène et beaucoup de bière dans un bar downtown. Ceci mis à part, j’étais une thésarde modèle, passant un tiers de mon temps en amphi, un tiers à dormir dans une cellule tapissée de posters des Editions du Désastre, et le troisième tiers à me préoccuper du matériel : refouler les resquilleurs dans la queue du restau U, trier la viande du gras, boucher les trous dans la porte des chiottes avec du PQ pour pisser en paix et tabasser la photocopieuse.

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La Lumière des elfes

POUR MOI, IL Y A DEUX Peintures : la concave et la convexe — celle qui sort du cadre pour vous coller au mur et celle qui vous invite à enjamber le cadre pour aller voir comment se continue le paysage, au-delà.

Celle qui vous prend la tête en hurlant et celle qui vous prend par la main en chantant à voix de sirène.

Pour moi, il y a Guernica et les prisons du Piranèse.

 

 

Pour moi, il y a deux Femmes : les pétasses en A et les autres. Les pétasses en A sévissent chez les artistes — Gala, Elsa, Amanda, des chieuses aux yeux fous et aux comptes bancaires soignés. On dit : des Muses.

Hier soir, j’ai dîné avec Zelma, qui fut la Muse de Toussaint Settbon. Zelma, en bonne et due Muse, a la cinquantaine efflanquée, des cheveux de gitane, le cuir trop cuit et des pâtés sur la gueule (du khôl, du fard à joue, du rouge à lèvres). Tout ça est emballé dans des voileries noires qui puent la clope et lesté par des bijoux en argent crasseux, qui tintent à rendre folle une vache suisse.

Je n’arriverai jamais à donner de Zelma l’impression qu’elle veut donner, celle d’une belle pute vieillissante dont on suppose qu’elle a, en son jeune temps, posé à poil pour des génies drogués sous d’immenses verrières glaciales — d’une main elle boit un Tequila-Mezcal, de l’autre elle caresse ses beaux seins durcis. Drapée dans sa seule chevelure, elle incline sur une épaule frissonnante son beau crâne ravagé par l’Art et l’Opium…

Je n’y arriverai jamais. Zelma est trop conne. D’ailleurs, Toussaint Settbon était un gros con.

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Rhume des foins

C’EST UNE GRANDE MAISON en bois cérusé, blanche et gracile, échouée parmi les fleurs. On y entre par des portes-fenêtres gréées de mousselines et une galerie en fait le tour, séparée du jardin par une colonnade mangée de vigne vierge.

Pour aller de la route à la maison, il faut remonter une longue allée tracée à même un fouillis de chèvrefeuille. Le climat est si doux que les floraisons se succèdent sans interruption, d’un bout à l’autre de l’année, entretenant une jungle de parfums. C’est l’allée des vapeurs et des ivresses, un champs de pavots n’est pas plus suffocant, ni plus enchanteur. Les lilas s’enlacent à l’infini entre les fûts droits des tilleuls, élèvent vers les frondaisons des vrilles de pollen puis roulent enchevêtrés vers le sable de l’allée, qu’ils dévorent.

Le reste du jardin est une houle d’herbe où tanguent des corbeilles d’œillets, où transhument des troupeaux de fuchsias. Entre les flaques couvertes de nénuphars que bénissent les saules, tournoient des bosquets de laurier-roses poisseux. En écartant les branches, on rencontre parfois un buste moisi, ou un reste de balancelle, un kiosque en roseau pourrissant, une jardinière moustachue de menthe, un souvenir de plate-bande où le jasmin et le cannabis se battent en duel. On peut craindre parfois de se perdre, mais on retrouve toujours la maison, à cause des rires.

Sous la galerie sont servis à toute heure du thé brûlant, du café chaud, des gâteaux encore tièdes, des sirops glacés et des sourires chaleureux. Ça sent bon le bois, la citronnelle et le frais. Assis sous la véranda, j’ai vu bien des fois le soleil se coucher au fond du jardin, allumant des vers luisants dans la pelouse et des incendies sur l’horizon. Longtemps cette maison, ses parfums et ses livres, a été pour moi le paradis sur Terre. Et savez-vous quel serpent m’en a chassé ?

Le rhume des foins.

Mais il ne m’est pas venu tout seul, oh non…

 

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