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Princes de la pègre

Vous aimez les histoires de cape et d’épée ? Alexandre Dumas vous manque ? Jetez-vous sur Princes de la pègre de Douglas Hulick. Certes, l’histoire ne se déroule pas dans un monde réel. Elle n’a pas pour protagoniste des rois ou des hommes d’armes ayant réellement existé. Mais le rythme, l’enchaînement, la vivacité des aventures de Drothe font penser à ces romans vivifiants qui ont bercé l’enfance, la jeunesse ou la vieillesse de beaucoup de lecteurs. Car le titre français peut s’avérer trompeur : rien à voir ici avec Chicago, ou les bas-fonds d’une grande ville américaine en pleine Prohibition. Les quelques jours racontés dans ce livre ont pour décor Ildrecca, vaste cité tentaculaire divisée en cordons. L’empereur dirige l’Etat, les parrains locaux leurs quartiers. Et les conflits se règlent à l’épée (l’auteur en connaît d’ailleurs les subtilités) plutôt qu’à la mitraillette.

Le héros de ce premier volume d’une série en cours d’écriture est un « nez ». Un fouineur, en fait, capable d’écouter toutes les rumeurs de la ville et de renifler les problèmes, les tendances. Il peut ainsi prévenir son chef, un des parrains d’Ildrecca. Drothe est bien établi. Ses affaires roulent. Il est implanté dans son cordon et a l’oreille de son chef. Evidemment, tout cela ne va pas durer. A la recherche d’un livre qu’on lui avait promis, Drothe va se retrouver au centre d’un conflit aux prolongements inattendus. Sa petite routine quotidienne va céder au chaos ambiant. Et le sommeil de-viendra une denrée rare, un luxe difficile à s’offrir, sa vie se réduisant à l’état de variable d’ajustement. Seule sa finesse d’esprit et son habileté lui permettront de déjouer les pièges et d’espérer sauver son existence. Et aussi de découvrir les rouages secrets de cette ville qu’il croyait connaître.

Dès le premier chapitre, Douglas Hulick plante le décor, pose ses personnages, lance l’intrigue. On ne perd pas de temps, mais sans tomber dans le schématique ou le caricatural. Par petites touches, l’auteur peint une cité gigantesque : on respire ses odeurs, on entend ses bruits, les cris de ses habitants pleins de vie. Certains cordons nous deviennent familiers au long des pages. Mais cela ne suffit pas à un bon roman. Il faut des aventures, de quoi tenir en haleine le lecteur. Là encore, notre guide sait y faire. Richesse des rebondissements, personnages à double facette, retournements de situation. Cela n’empêche pas quelques facilités et on imagine assez aisément la fin de cette histoire. Mais pas ses tours et ses détours. Et il est bien agréable de se laisser entraîner dans les rues bouillonnantes d’Ildrecca, sur les pas de Drothe, guide involontaire et attachant. Alors ne perdez pas de temps, ceignez votre épée, prenez votre respiration et immergez-vous dans « Les Bas-fonds d’Ildrecca ».

Le Dernier des Francs

César est mort ! Assassiné ! Vous le saviez déjà ? Oui, mais ce que vous ignorez, c’est que, dans Le Dernier des Francs, il ne tombe pas, comme nous l’ont appris nos livres d’histoire, sous les coups de sénateurs effrayés de la place que prenait ce grand homme. Il ne meurt pas trahi par son fils adoptif, Brutus, en prononçant ces paroles célèbres : « Toi aussi, mon fils. » Non, César trépasse sous les coups d’un Gaulois, lors du siège d’Alésia, alors que celui qui allait devenir Vercingétorix (avec une majuscule) résistait encore. Brennus, par ce meurtre, a changé l’histoire. Notre histoire.

Et nous nous retrouvons huit siècles plus tard dans un univers bien différent de celui qu’enseignent les professeurs de latin à nos « chères têtes blondes ». L’empiré romain n’existe pas. Ou plutôt, si. Mais il est moins puissant, ayant dû partager le monde avec trois autres : les Celtes, bien sûr, les Parthes et les Huns. Un équilibre précaire est maintenu, malgré quelques escarmouches sans grande conséquence. Or, suite à des manœuvres de l’empereur de Rome, les Celtes et les Huns projettent de s’unir. C’est un mariage qui sera le garant de cette alliance. Pour les Romains, cette union ne peut avoir lieu.

C’est dans cette situation tendue qu’est plongé Lucius Antonius, un jeune Romain. Protégé par un sénateur puissant, il espère gravir les échelons du pouvoir malgré son handicap physique. Il n’est pas appelé Tubero (« le bossu ») pour rien. Et à Rome, en cette période, le physique joue un grand rôle. Aussi accepte-t-il sans hésiter longtemps la tâche qu’on lui confie : servir de couverture à une mission d’importance. Pour cela, il devra voyager jusqu’à Gergovie. Et y épouser une charmante jeune femme. Que demander de plus ? Hélas pour lui, rien ne va se dérouler comme prévu. Et ce périple de se transformer en cauchemar, aux conséquences autrement plus importantes que la simple petite vie de Lucius Antonius Tubero.

Michel Pagel est un habitué de l’histoire. Dans son cycle des « Immortels » (critique in Bifrost 46), il nous a entraîné en 3200 avant J.-C. à Sumer et en Egypte. Dans Le Roi d’août, c’est sur les pas de Philippe Auguste qu’il nous a conviés. Il n’y a donc rien d’étonnant à le voir une fois de plus nous offrir un récit aux apparences historiques. Car après la lecture du Dernier des Francs, il est difficile de ne pas croire à cette réalité, à ce monde imaginé mais aux accents si vrais. Les sociétés décrites, les personnages rencontrés et l’intrigue choisie sont frappants de réalisme. L’auteur connaît son sujet, on ne peut en douter. Et même si les aventures de Lucius manquent un peu de rebondissements, de surprises, la façon dont Michel Pagel nous les narre pallie cette légère réserve. Un roman qui mérite le détour, assurément.

Le Château d'Eymerich

[Chronique comme à Nicolas Eymerich, InquisiteurLes Chaînes d'Eymerich et Le Château d'Eymerich.

La couverture est sombre mais d’une élégante sobriété, avec sa police « Inquisition » qui dessine une croix sur le premier volume. La Volte présente l’intégrale du cycle de Nicolas Eymerich, à ce jour incomplet en France. Après la reprise des deux premiers volumes, nécessaires pour comprendre la série, paraît le septième volume du cycle, inédit, le huitième si on compte le recueil de nouvelles Métal Hurlant.

Nicolas Eymerich est cet inquisiteur intransigeant du milieu du XIVe siècle, uniquement porté par sa foi et son devoir, en proie à des manifestations diaboliques sur lesquelles il enquête avec la maestria d’un Sherlock Holmes, éradiquant les hérésies avec une expéditive insensibilité. Mais il s’agit de science-fiction, et l’intérêt de la série réside avant tout dans la découverte du voyage dans le temps grâce à une particule plus rapide que la lumière, le psytron, qui vibre sous l’action des neurones, autrement dit de la pensée : il est vrai qu’on se transporte instantanément ailleurs par la pensée. Inspirée de la théorie des cordes, cette vibration des particules dans un espace sensible aux psytrons, nommé Psyché, débouche sur le dédoublement du penseur lors d’un voyage dans le passé. C’est ainsi que dans le futur le Malpertuis, vaisseau spatial avec à son bord un curé fanatique, tente d’aborder une planète nommée Olympe pour y récupérer des créatures mythologiques encore existantes, mais se retrouve par erreur à l’époque d’Eymerich. Les interférences sont la cause des troubles constatés à l’époque de ce dernier. Dans le premier volume, on voit Eymerich manœuvrer très habilement pour mériter son poste d’inquisiteur malgré son jeune âge. Trois époques s’interpénètrent superbement. On regrettera cependant que la traduction de Quadruppani n’ait pas été révisée pour ce qui concerne l’em-ploi de certains termes comme le flogistique pour phlogistique, ou ces curieux neutrins pour désigner les neutrinos.

C’est précisément l’interpénétration des époques qui fait l’intérêt de la série, tissant des liens qui font sens. Dans Les Chaînes d’Eymerich, le procédé se trouve consolidé : en établissant des relations entre la résurgence d’une hérésie cathare en Savoie, des expériences génétiques commencées dans l’Allemagne des années 30 et poursuivies dans la Roumanie de Ceaucescu, des trafics d’organes au Guatemala, et encore un inquiétant futur en guerre où une organisation eugéniste hitlérienne, la Rache, poursuit sa quête d’immortalité, Evangelisti montre que chaque exaction est un anneau de la même chaîne allant des sombres heures du passé aux périodes modernes encore plus terrifiantes. Nicolas Eymerich, dangereux fanatique, dépeint comme un être qui agit dans ce qu’il croit être juste, ne torturant jamais pour le plaisir, apparaît finalement plus sympathique que bien des contemporains dénués de scrupules. Il a au moins son sens de la justice, discutable et excessif, qui l’empêche de franchir certaines lignes.

C’est en partie sur cette intransigeance que repose l’intrigue du Château d’Eymerich. L’officier nazi ne dédaigne pas coucher avec les servantes juives du camp de concentration où il cherche à créer le soldat invincible ; des frères dominicains sont prêts à utiliser la magie juive, et donc à se damner, pour sauver leur Eglise ; Pierre le Cruel, assiégé dans son château, a assis son pouvoir par des compromis avec les ennemis naturels de la Chrétienté, les Sarrasins et les Juifs qui le protègent. Ces derniers ont équipé son château de dix tours et l’ont truffé de souterrains qu’il ignore ; le motif d’ensemble reproduit un dessin kabbalistique destiné à un rite à venir. Trois intrigues s’entrecroisent donc à nouveau. Eymerich appelé pour contrer des manifestations diaboliques dans la forteresse de Pierre le Cruel, déjà assiégée par son beau-frère Henri de Trastamare, en passe de lui ravir le trône de Castille, lutte contre maintes créatures fantasmagoriques, mais aussi, qui l’eût cru, contre la tentation de la chair. Le château lieu de complots, le château hanté et celui du savant fou : Evangelisti joue de tous ces motifs pour déployer les registres du fantastique dans cet épisode hautement symbolique, où la répétition même de certaines scènes ou répliques, qui pourraient passer pour des erreurs d’écriture, tisse un réseau de nature incantatoire. Eymerich, symbole de forteresse imprenable, se sent fragilisé en découvrant ses faiblesses, plus horrifié par ses sentiments que par les désirs charnels. Par ailleurs contesté dans son autorité par ses pairs, désorienté, c’est un Eymerich plus humain qui est présenté ici. Le final, paroxystique et délirant, clôt superbement cet opus où la noirceur se teinte parfois d’un humour sarcastique. Jubilatoire.

L’ensemble des reprises et inédits devrait se poursuivre jusqu’en 2014. Les dix volumes de la saga méritent bien cette belle présentation.

Les Chaînes d'Eymerich

[Chronique comme à Nicolas Eymerich, InquisiteurLes Chaînes d'Eymerich et Le Château d'Eymerich.

La couverture est sombre mais d’une élégante sobriété, avec sa police « Inquisition » qui dessine une croix sur le premier volume. La Volte présente l’intégrale du cycle de Nicolas Eymerich, à ce jour incomplet en France. Après la reprise des deux premiers volumes, nécessaires pour comprendre la série, paraît le septième volume du cycle, inédit, le huitième si on compte le recueil de nouvelles Métal Hurlant.

Nicolas Eymerich est cet inquisiteur intransigeant du milieu du XIVe siècle, uniquement porté par sa foi et son devoir, en proie à des manifestations diaboliques sur lesquelles il enquête avec la maestria d’un Sherlock Holmes, éradiquant les hérésies avec une expéditive insensibilité. Mais il s’agit de science-fiction, et l’intérêt de la série réside avant tout dans la découverte du voyage dans le temps grâce à une particule plus rapide que la lumière, le psytron, qui vibre sous l’action des neurones, autrement dit de la pensée : il est vrai qu’on se transporte instantanément ailleurs par la pensée. Inspirée de la théorie des cordes, cette vibration des particules dans un espace sensible aux psytrons, nommé Psyché, débouche sur le dédoublement du penseur lors d’un voyage dans le passé. C’est ainsi que dans le futur le Malpertuis, vaisseau spatial avec à son bord un curé fanatique, tente d’aborder une planète nommée Olympe pour y récupérer des créatures mythologiques encore existantes, mais se retrouve par erreur à l’époque d’Eymerich. Les interférences sont la cause des troubles constatés à l’époque de ce dernier. Dans le premier volume, on voit Eymerich manœuvrer très habilement pour mériter son poste d’inquisiteur malgré son jeune âge. Trois époques s’interpénètrent superbement. On regrettera cependant que la traduction de Quadruppani n’ait pas été révisée pour ce qui concerne l’em-ploi de certains termes comme le flogistique pour phlogistique, ou ces curieux neutrins pour désigner les neutrinos.

C’est précisément l’interpénétration des époques qui fait l’intérêt de la série, tissant des liens qui font sens. Dans Les Chaînes d’Eymerich, le procédé se trouve consolidé : en établissant des relations entre la résurgence d’une hérésie cathare en Savoie, des expériences génétiques commencées dans l’Allemagne des années 30 et poursuivies dans la Roumanie de Ceaucescu, des trafics d’organes au Guatemala, et encore un inquiétant futur en guerre où une organisation eugéniste hitlérienne, la Rache, poursuit sa quête d’immortalité, Evangelisti montre que chaque exaction est un anneau de la même chaîne allant des sombres heures du passé aux périodes modernes encore plus terrifiantes. Nicolas Eymerich, dangereux fanatique, dépeint comme un être qui agit dans ce qu’il croit être juste, ne torturant jamais pour le plaisir, apparaît finalement plus sympathique que bien des contemporains dénués de scrupules. Il a au moins son sens de la justice, discutable et excessif, qui l’empêche de franchir certaines lignes.

C’est en partie sur cette intransigeance que repose l’intrigue du Château d’Eymerich. L’officier nazi ne dédaigne pas coucher avec les servantes juives du camp de concentration où il cherche à créer le soldat invincible ; des frères dominicains sont prêts à utiliser la magie juive, et donc à se damner, pour sauver leur Eglise ; Pierre le Cruel, assiégé dans son château, a assis son pouvoir par des compromis avec les ennemis naturels de la Chrétienté, les Sarrasins et les Juifs qui le protègent. Ces derniers ont équipé son château de dix tours et l’ont truffé de souterrains qu’il ignore ; le motif d’ensemble reproduit un dessin kabbalistique destiné à un rite à venir. Trois intrigues s’entrecroisent donc à nouveau. Eymerich appelé pour contrer des manifestations diaboliques dans la forteresse de Pierre le Cruel, déjà assiégée par son beau-frère Henri de Trastamare, en passe de lui ravir le trône de Castille, lutte contre maintes créatures fantasmagoriques, mais aussi, qui l’eût cru, contre la tentation de la chair. Le château lieu de complots, le château hanté et celui du savant fou : Evangelisti joue de tous ces motifs pour déployer les registres du fantastique dans cet épisode hautement symbolique, où la répétition même de certaines scènes ou répliques, qui pourraient passer pour des erreurs d’écriture, tisse un réseau de nature incantatoire. Eymerich, symbole de forteresse imprenable, se sent fragilisé en découvrant ses faiblesses, plus horrifié par ses sentiments que par les désirs charnels. Par ailleurs contesté dans son autorité par ses pairs, désorienté, c’est un Eymerich plus humain qui est présenté ici. Le final, paroxystique et délirant, clôt superbement cet opus où la noirceur se teinte parfois d’un humour sarcastique. Jubilatoire.

L’ensemble des reprises et inédits devrait se poursuivre jusqu’en 2014. Les dix volumes de la saga méritent bien cette belle présentation.

Nicolas Eymerich, inquisiteur

[Chronique comme à Nicolas Eymerich, Inquisiteur, Les Chaînes d'Eymerich et Le Château d'Eymerich.

La couverture est sombre mais d’une élégante sobriété, avec sa police « Inquisition » qui dessine une croix sur le premier volume. La Volte présente l’intégrale du cycle de Nicolas Eymerich, à ce jour incomplet en France. Après la reprise des deux premiers volumes, nécessaires pour comprendre la série, paraît le septième volume du cycle, inédit, le huitième si on compte le recueil de nouvelles Métal Hurlant.

Nicolas Eymerich est cet inquisiteur intransigeant du milieu du XIVe siècle, uniquement porté par sa foi et son devoir, en proie à des manifestations diaboliques sur lesquelles il enquête avec la maestria d’un Sherlock Holmes, éradiquant les hérésies avec une expéditive insensibilité. Mais il s’agit de science-fiction, et l’intérêt de la série réside avant tout dans la découverte du voyage dans le temps grâce à une particule plus rapide que la lumière, le psytron, qui vibre sous l’action des neurones, autrement dit de la pensée : il est vrai qu’on se transporte instantanément ailleurs par la pensée. Inspirée de la théorie des cordes, cette vibration des particules dans un espace sensible aux psytrons, nommé Psyché, débouche sur le dédoublement du penseur lors d’un voyage dans le passé. C’est ainsi que dans le futur le Malpertuis, vaisseau spatial avec à son bord un curé fanatique, tente d’aborder une planète nommée Olympe pour y récupérer des créatures mythologiques encore existantes, mais se retrouve par erreur à l’époque d’Eymerich. Les interférences sont la cause des troubles constatés à l’époque de ce dernier. Dans le premier volume, on voit Eymerich manœuvrer très habilement pour mériter son poste d’inquisiteur malgré son jeune âge. Trois époques s’interpénètrent superbement. On regrettera cependant que la traduction de Quadruppani n’ait pas été révisée pour ce qui concerne l’em-ploi de certains termes comme le flogistique pour phlogistique, ou ces curieux neutrins pour désigner les neutrinos.

C’est précisément l’interpénétration des époques qui fait l’intérêt de la série, tissant des liens qui font sens. Dans Les Chaînes d’Eymerich, le procédé se trouve consolidé : en établissant des relations entre la résurgence d’une hérésie cathare en Savoie, des expériences génétiques commencées dans l’Allemagne des années 30 et poursuivies dans la Roumanie de Ceaucescu, des trafics d’organes au Guatemala, et encore un inquiétant futur en guerre où une organisation eugéniste hitlérienne, la Rache, poursuit sa quête d’immortalité, Evangelisti montre que chaque exaction est un anneau de la même chaîne allant des sombres heures du passé aux périodes modernes encore plus terrifiantes. Nicolas Eymerich, dangereux fanatique, dépeint comme un être qui agit dans ce qu’il croit être juste, ne torturant jamais pour le plaisir, apparaît finalement plus sympathique que bien des contemporains dénués de scrupules. Il a au moins son sens de la justice, discutable et excessif, qui l’empêche de franchir certaines lignes.

C’est en partie sur cette intransigeance que repose l’intrigue du Château d’Eymerich. L’officier nazi ne dédaigne pas coucher avec les servantes juives du camp de concentration où il cherche à créer le soldat invincible ; des frères dominicains sont prêts à utiliser la magie juive, et donc à se damner, pour sauver leur Eglise ; Pierre le Cruel, assiégé dans son château, a assis son pouvoir par des compromis avec les ennemis naturels de la Chrétienté, les Sarrasins et les Juifs qui le protègent. Ces derniers ont équipé son château de dix tours et l’ont truffé de souterrains qu’il ignore ; le motif d’ensemble reproduit un dessin kabbalistique destiné à un rite à venir. Trois intrigues s’entrecroisent donc à nouveau. Eymerich appelé pour contrer des manifestations diaboliques dans la forteresse de Pierre le Cruel, déjà assiégée par son beau-frère Henri de Trastamare, en passe de lui ravir le trône de Castille, lutte contre maintes créatures fantasmagoriques, mais aussi, qui l’eût cru, contre la tentation de la chair. Le château lieu de complots, le château hanté et celui du savant fou : Evangelisti joue de tous ces motifs pour déployer les registres du fantastique dans cet épisode hautement symbolique, où la répétition même de certaines scènes ou répliques, qui pourraient passer pour des erreurs d’écriture, tisse un réseau de nature incantatoire. Eymerich, symbole de forteresse imprenable, se sent fragilisé en découvrant ses faiblesses, plus horrifié par ses sentiments que par les désirs charnels. Par ailleurs contesté dans son autorité par ses pairs, désorienté, c’est un Eymerich plus humain qui est présenté ici. Le final, paroxystique et délirant, clôt superbement cet opus où la noirceur se teinte parfois d’un humour sarcastique. Jubilatoire.

L’ensemble des reprises et inédits devrait se poursuivre jusqu’en 2014. Les dix volumes de la saga méritent bien cette belle présentation.

La Formule de Dieu

Une belle Iranienne demande à Tomás Noronha, cryptologue portugais et cador dans son domaine, de se rendre dans son pays pour y déchiffrer un manuscrit d’Einstein, du moins les quelques lignes codées qui accompagnent les pages en allemand remplies de formules. Avant le départ, il est approché par la CIA qui croit que ce manuscrit décrit le moyen de fabriquer une bombe atomique facile et pas chère, demandée par Ben Gourion à Einstein au printemps 1951, afin que le jeune état d’Israël puisse se défendre contre ses ennemis. Tomás doit vérifier cette assertion alors même qu’il ne connaît rien en physique, malgré un père enseignant les mathématiques à l’université, ami d’un physicien réputé ayant connu Einstein, et le communiquer à des agents sur place. Par ailleurs, il apprend à l’arrivée qu’il ne sortira pas d’Iran avant d’avoir résolu cette énigme considérée comme un secret d’état. Voilà qui augure d’un bon suspense, certes très formaté best-seller, comme on s’en rend vite compte devant la dramatisation excessive de la mise en place et les éléments didactiques à l’intention du lecteur de base, depuis la physique nucléaire jusqu’à la situation géopolitique en Iran. C’est pour très grand public : les explications seront donc diluées dans des conversations où le naïf s’étonne à chaque détail, l’auteur distillant les informations avec les codes narratifs du thriller. Pourquoi pas…?

Cependant, on déchante vite avec quelques jamesbonderies d’une confondante stupidité : dès le premier jour, après qu’on lui a brièvement montré le manuscrit et sous prétexte de visiter le souk, Tomás échappe à son guide de façon spectaculaire pour rencontrer son contact. Et que croyez-vous qu’il arriva ? On accepte son explication de préférence pour les balades solitaires, son maton est juste fâché d’avoir été ridiculisé et personne ne nourrit d’autres soupçons devant un tel agissement. Le héros comme les méchants sont très naïfs alors qu’on veut nous les faire croire très retors. Reste le fond de l’intrigue…

Il est vite évident que l’énigme sur le sens des formules du manuscrit (les Iraniens auraient dû se rendre compte aisément que celui-ci ne concerne pas une arme nucléaire) renvoie à des considérations d’une ampleur cosmique, qui amène à s’interroger sur la nature de l’univers, ses lois, son destin, et la place de l’homme. C’est à la question du principe anthropique que s’attaque donc dos Santos, traitant en parallèle des religions présentant des analogies avec les réponses de la physique. Einstein détiendrait le moyen de démontrer l’existence de Dieu, insérée dans un quatrain et deux lignes cryptés, qui donnent la juste perspective aux équations et au texte du manuscrit (dont on ne saura rien). L’explication finale, et même son exposé, entre philosophie et démonstration scientifique, ne manquent pas de séduire et paraîtraient assez remarquables sous la plume d’un auteur sachant écrire, à condition de supporter les interminables leçons distillées dans d’assommants bavardages.

L’auteur, par ailleurs présentateur vedette du « 20 heures », ancien reporter de guerre, a compilé un certain nombre d’ouvrages de vulgarisation qu’il régurgite autour d’une intrigue si hâtivement bricolée qu’il ne prend même pas la peine de la traiter convenablement. Mais on voit bien, dans quelques subtilités de hiérarchie des informations, que dos Santos a tout juste digéré sa documentation et que ses dialogues entre savant et naïf sont parfois amenés de façon inepte ou contradictoire (un agent de la CIA expliquant qu’il est question d’un secret nucléaire ne se lance pas dans un cours sur la composition de la matière ni sur la différence entre force forte et faible, un héros cryptologue, donc disciple de Turing, entre autre père de l’informatique, ne peut ignorer certains détails qu’il feint de découvrir avec étonnement, même à la troisième explication), avec des répliques qui constituent de véritables sottisiers. Le PPDA portugais est pourtant une célébrité littéraire : son personnage a déjà vécu cinq aventures et certains de ses ouvrages se vendent autant que ceux de Marc Lévy. Un de ses thrillers sera adapté par Hollywood… La quatrième de couverture annonce un roman dans la lignée d’Umberto Eco et Dan Brown. C’est exact. Pas entre, mais bien dans la lignée, tout à la droite de Brown.

Force est de reconnaître pourtant que le point est clairement fait sur l’univers et la nature de la matière, sans complication excessive, et sur les questions philosophiques afférentes, ce qui est en soi méritoire ; le grand public fuyant les ouvrages de vulgarisation trouvera son compte dans cette SF pour les nuls. Peut-être passera-t-il à Stephen Baxter ensuite. On peut rêver… Et d’ores et déjà présenter dos Santos comme l’auteur des prochains grands succès de librairie.

L'Age des miracles

Un jour, la rotation de la Terre a progressivement ralenti. Les premières conséquences sont bénignes, jusqu’à ce qu’il faille réévaluer les horaires de travail, des transports, avec les problèmes d’organisation sociale qu’on imagine…

Les conséquences sont examinées par le petit bout de la lorgnette, à la première personne, à travers les yeux d’une adolescente renfermée qui observe les bouleversements au sein de sa communauté et de sa famille, à commencer par sa mère, catastrophiste, qui vit mal les changements imposés par l’allongement des jours et des nuits — son père, chirurgien, n’a aucun mal à s’adapter à des horaires décalés. Elle voit aussi des amies changer et s’éloigner, voire déménager pour affronter une éventuelle fin du monde.

Pour faire face aux désordres s’installant un peu partout, le gouvernement américain rétablit une journée artificielle de vingt-quatre heures, la population se couchant quand le soleil est au zénith et effectuant ses activités de nuit jusqu’à ce que les cycles coïncident à nouveau pour une durée toujours plus brève. Journée arbitraire à laquelle se dérobent, malgré les pressions parfois violentes du voisinage, les réfractaires préférant suivre le rythme circadien dans sa dérive, jusqu’à se déconnecter de la vie sociale. Le ralentissement provoquant une légère augmentation de la gravité, les oiseaux sont les premières victimes, lors de vols mal contrôlés ; les athlètes voient leurs performances baisser et un syndrome affecte les personnes, provoquant brefs évanouissements, pertes de repères, puis des symptômes plus graves ; la flore, surtout, a du mal à s’adapter aux journées étouffantes et aux nuits glaciales, de sorte que seules les cultures sous abri et lumière artificielle préservent un semblant d’agriculture… jusqu’à ce que les coupures d’électricité se multiplient, que la neige tombe en soirée et que le changement d’intensité du champ magnétique terrestre provoque des perturbations exposant la civilisation du tout-électrique aux éruptions solaires et à ses mortelles radiations que rien ne dévie plus…

Cette histoire de fin du monde, assez exacte sur le plan scientifique (quoique nettement exagérée, selon notre professeur Lehoucq, en ce qui concerne la gravité), reste trop centrée sur les seuls Etats-Unis : il semble déjà douteux que le temps de réaction nécessaire pour isoler et éclairer artificiellement les cultures suffise à sauver l’agriculture du pays, mais il est certain que bien des régions du globe, faute de ressources énergétiques suffisantes, ont cessé leurs exportations ou connu la famine. Mais il faut garder à l’esprit que c’est une adolescente encore peu ouverte sur le monde qui raconte (à ce titre, L’Age des miracles est d’ailleurs proposé en librairies par l’éditeur au rayon littérature, mais aussi jeunesse, et ce sous deux couvertures différentes). L’impact planétaire n’est qu’un vague bruit de fond qui ne prend consistance que lorsque des mesures concrètes sont décrétées. En revanche, les changements sont observés au niveau des relations familiales et de l’entourage, la prof de piano progressivement recluse, le grand-père se préparant au pire, et la perte des amies d’enfance concomitamment à l’éveil sexuel.

Moins qu’un récit de science-fiction centré sur les conséquences sociales d’un tel bouleversement, ce roman est la métaphore de la perte d’un monde, celui de l’enfance, et les perturbations de l’adolescence, quand la gravité affecte le corps devenu plus gauche et les sentiments, alors que l’adulte s’enfonce progressivement vers des plages de temps toujours plus longues et pesantes, jusqu’à l’extinction. Une lecture agréable, malgré cette perspective légèrement gauchie aux yeux des puristes, pour les qualités d’écriture, et le portrait psychologique d’une adolescente, tout en finesse et d’une grande intensité à la fois.

Ténèbres 2012

Que reste-t-il aujourd’hui de l’Horreur, genre littéraire majeur dans lequel se sont longtemps illustrés Poppy Z. Brite, Clive Barker, Peter Straub, Dean R. Koontz et Stephen King ? Si la plupart de ces auteurs sont passés à autre chose, le genre, lui, a continué de produire tout en devenant de plus en plus marginal, au point que certains de ses derniers romans importants, primés, ne sont plus traduits en nos contrées. L’horreur cinématographique (et il en va de même pour la SF) est un genre en bonne santé (on ne dressera pas ici la liste des films à petit budget qui ont remporté cinquante fois leur mise de départ), pourquoi cette bonne santé ne se traduit-elle pas par une présence accrue en librairie ? Comme c’est la question à cent mille dollars de la semaine, je n’en ai pas la réponse… Et vous ne la trouverez pas dans cette anthologie. Quoique…

Ténèbres 2012 contient dix-sept nouvelles (pas toujours fantastiques, d’ailleurs) qui revisitent les thèmes habituels ; enfance maltraitée, croquemitaine, fantôme, vampire, muse. Beaucoup d’ennui, de pages lues en diagonale, rien d’inoubliable (sauf en matière de pénibilité, si on prend en compte le texte de Serena Gentilhomme). On s’arrêtera néanmoins sur trois textes : « Le Violver » de C.C Finlay, récit d’une invasion extraterrestre aux allures de fin du monde, dont l’idée centrale est si répugnante qu’elle marque durablement (dommage que la progression narrative du texte soit si pataude et riche en clichés) ; plus original, Tobias S. Buckell nous propose de monter dans un vaisseau fantôme, mais pas n’importe lequel, un négrier. Sans être transcendant, son « Rejeter Babylone » est peut-être le meilleur texte de la sélection ; Luca Masali, lui, nous refait le coup du Sixième sens avec une petite fille zombie et un arrière-fond très politique (comme chez Romero). Dans les ratés, on tirera du lot « Dans la peau » de Pascal Sacré, c’est « monté » n’importe comment, mais il en reste deux trois images vraiment dérangeantes. Une fois la dernière page tournée, on espère que cette anthologie ne présente pas le meilleur de l’Horreur d’aujourd’hui, auquel cas on pourrait dire sobrement que la messe est dite1.

Note :
Les ouvrages publiés par Dreampress n’étant pas ou peu disponibles en librairie, on passera commande directement sur le site de l’éditeur.

Magie brute

USA, années 30… Pistolets mitrailleurs Thomson, dirigeables, petite pépés et magie à gogo, tels sont les principaux ingrédients de Magie brute.

Le roman commence par une mission désastreuse pour Jake Sullivan, survivant de la Grande Guerre et « lourd », c’est-à-dire magicien capable d’agir sur le champ gravitationnel et la densité. Missionné par J. Edgar Hoover pour tuer son ancien amour Delilah, devenue une implacable meurtrière, Jake, non seulement échoue, mais s’aperçoit qu’il a été manipulé par le pénible père-fondateur du FBI. Une mission foirée, un ramassis de mensonges, difficile de dire quel est le truc qui le met le plus en rogne. Ça va saigner.

Pendant ce temps, la jeune Faye, (qui a le pouvoir de se téléporter) assiste au meurtre de son père adoptif, un fermier d’origine portugaise aux lourds secrets. C’est un coup de Madi, un garde de fer au service du Président, le magicien immortel qui règne sur le Japon. Obligée de fuir, Faye est recueillie par le Grimnoir, une société secrète de magiciens qui s’est jurée de mettre à genoux le Président et qui informe Jake, rallié à sa cause, que le geotel, l’arme de Tesla qui a rasé la moitié de la Sibérie en 1905, est en passe de tomber dans de bien mauvaises mains.

La guerre peut commencer.

Magie brute est un roman enthousiasmant, un divertissement qu’on lit à toute allure, avec le plus grand plaisir… quatre cents pages durant. Puis, arrivé sur les cinquante dernières pages, le livre qui s’appréhendait jusque-là comme une fantasy urbaine pleine d’humour et d’action échevelée vire au gore, au sadique. Jake tue les « méchants » (sic) japonais avec un plaisir évident, transformant en bouillie tout Jaune se mettant en travers de sa route. Il en est de même pour Faye, qui, jusqu’ici, nous avait été présentée comme idéaliste/naïve et un poil coincée. Cette façon de présenter le bien/le mal, les bons/les méchants, de noyer les idéaux dans le sang et les tripes, rappelle les carnages successifs de la tétralogie L’Arme fatale où Gibson/Glover massacrent dix, douze « méchants » par épisode, avant de se faire un barbecue. Au moment du gueuleton familial, ils pourraient se poser des questions, avoir une baisse d’appétit, mais non, tout va bien, il convient plutôt d’empêcher les saucisses de brûler et de ne pas tomber à court de bière.

Evidemment, on peut se dire que Magie brute est avant tout un comics sans image, à ne pas prendre trop au sérieux, mais comme le récit regorge de détails politiques et uchroniques, ça ne suffit pas à gommer le mauvais goût que ses cinquante dernières pages laissent dans la bouche.

Pour finir, un mot sur la traduction, qui est horripilante tant le livre regorge de vocabulaire relatif aux armes à feu, vocabulaire précis avec lequel la traductrice a un certain contentieux. Ça pourrait passer si Magie brute n’était pas une succession quasiment ininterrompue de scènes d’action et de fusillades. De fait, ça coince un peu. Dommage.

120 journées

Dans Les 120 journées de sodome, œuvre inachevée du Marquis de Sade dont seul le premier quart existe sous forme, disons, définitive, le duc de Blangis, son frère (évêque), le président de Curval et le financier Durcet, s’enferment dans un château de la Forêt Noire, Silling, avec leurs épouses et de jeunes enfants des deux sexes, enlevés à leurs parents. Là se déchaîneront les plaisirs les plus aboutis et les perversions les plus inouïes. Dans Salò ou les 120 journées de Sodome, probablement le film le plus éprouvant de l’histoire du cinéma, Pier Paolo Pasolini (qui sera assassiné juste après avoir achevé ce qui reste donc comme son testament) déplace l’action de la fin du règne de Louis XIV (et donc du château de Silling) à la fin du règne de Mussolini, à Salò.

Jérôme Noirez, lui, nous emmène dans un espèce de Groland banal (la capitale s’appelle Griblain), où huit collégiens de La Macle (deux heures de route depuis Griblain) sont kidnappés par les frères Blangis, Mme Curval et Mme Durcet. Et se retrouvent à Silling, sous la garde de leurs ravisseurs, de la cuisinière Fanchon, fausse infanticide, et de Guenet, vrai psychopathe violeur.

Tous les dix jours, un homme (engagé par les ravisseurs, mais ignorant tout de leurs crimes) raconte une histoire à la radio pour les enfants qui n’interviennent pas, en présence de leurs ravisseurs qui, eux, se permettent d’intervenir. Cet animateur spécialisé dans les faits divers est le papa divorcé de la petite Ninon, la crapote, dont il s’occupe à sa manière, sans doute pas parfaite, mais il n’existe pas de parents parfaits. L’école de Ninon a brûlé, ce qui n’est pas sans poser quelques problèmes.

120 journées est un livre complexe, ambitieux et en fin de compte assez obscur, où imaginaire et réalisme s’interpénètrent sans cesse (son principal défaut étant qu’on ne croit jamais à cette histoire d’animateur radio qui ne comprendrait pas à qui il s’adresse, ce qui place tout de suite le livre sur l’étagère des récits absurdes, un absurde ici très ancré dans le quotidien des parents d’élève). Si toute la partie de l’animateur radio (M. Duclos) est d’une grande puissance, avec ses morceaux de bravoure — « La combustion de tonton », l’histoire de la princesse Pneumonie et de la limnée —, la partie où l’on suit les enfants kidnappés, elle, est nettement moins percutante ; sans doute le lecteur de Sade et le spectateur de Pasolini s’at-tendaient-ils à un déluge d’horreurs. Des horreurs ? il y en a : un viol, un suicide, un crâne éclaté à coups de barre de fer, mais paradoxalement elles ne sont pas hissées très haut par l’auteur, qui leur préfère le passage d’un monde à l’autre, celui du caca-pipi-prout qui devient celui du chattes-règles-bite-enculé. L’intérêt du roman est donc dans des questions comme « qu’est-ce que l’éducation ? », « qu’est-ce que la maturité ? », « en quoi les parents ont le droit de se sentir supérieurs à leurs enfants ? », « comment accompagner ses enfants au moment de leur passage à l’adolescence ? ». Amateurs de supplices en déferlante, d’excès sexuels ou cruels, vous pouvez passer votre chemin. Noirez refuse toute surenchère, son propos est ailleurs.

Si on n’y réfléchit pas trop, 120 journées ressemble à « Another brick in the wall, part 2 », on connaît tous la chanson : « we don’t need no education, we don’t need no thought control », mais à la réflexion, ce roman est beaucoup, beaucoup plus compliqué/subtil que ça (très moral sans jamais être moralisateur). Livre puissant et entêtant, on ne pourra pas lui enlever ça, 120 journées est un roman qui souffre de quelques longueurs et redites ; une œuvre déséquilibrée, dans laquelle une petite fille, la crapote, gagne un combat à distance contre huit kidnappés et leurs médiocres ravisseurs.

Ça vient de paraître

Au-delà du gouffre

Le dernier Bifrost

Bifrost n° 120
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