Focus La Tour de Garde
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Pour les deux ou trois du fond qui n’auraient pas suivi l’actualité fantasy hexagonale de ces dernières années, « La Tour de Garde » est un édifice romanesque bâti à quatre mains par Guillaume Chamanadjian et Claire Duvivier, constitué de deux trilogies subtilement liées mais indépendantes, chacune centrée sur une ville et une galerie de personnages. Après deux tomes 2 chacun plus réussi que le tome 1, il est peu dire que les attentes étaient hautes pour la double conclusion.
Les Contes suspendus s’attache aux pas de Nox et de son meilleur ami Symètre. Suite aux événements désastreux et spectaculaires ayant conclu Trois Lucioles, les deux amis n’ont eu d’autre choix que de quitter Gemina, leur ville natale, immense cité bigarrée en prise désormais avec ce qui s’apparente bien à une guerre civile et un afflux continuel de réfugiés. Un long périple à travers le continent les amène non loin de Dehaven, à la Tour de garde : ce qui donne son nom au jeu le plus populaire des deux capitales est aussi un lieu. Un domaine qui, pour l’heure, est à l’abandon, et nécessite d’importantes réparations… et qui est déjà occupé par une poignée de squatteurs tout droit venus de la capitale septentrionale. Charge à Nox de s’arranger aves ceux-ci, de faire valoir ses droits face à quelque nobliau caractériel, de gérer la venue des réfugiés, de superviser la réparation des bâtiments – en un mot, de transformer la Tour de garde en utopie. Néanmoins, Nox sait également qu’il lui faudra régler les affaires restées en suspens à Gemina, tôt ou tard.
L’Armée fantoche commence quelques semaines avant Les Contes suspendus, alors qu’Amalia et Hirion ont trouvé refuge à la Tour de garde – c’est l’occasion de percevoir les événements du volume de Guillaume Chamanadjian sous un jour différent. Néanmoins, Amalia et son ami ont fort à faire : ils sont toujours recherchés par les forces de l’ordre de Dehaven, suite à l’échec de la révolution, et Amalia cherche à tirer au clair la nature de certains objets magiques. Surtout, de moins en moins lointaine, il y a la menace constituée par cette armée mystérieuse et en apparence invincible. Après avoir mis à sac plusieurs villes proches et suscité un afflux de réfugiés à Gemina, cette armée pourrait bien s’attaquer à Dehaven, si Amalia croit en sa vision. Comment faire pour éviter la dévastation ? Il faudra pour la jeune femme s’éloigner de la Tour de garde, même si, à sa manière, tout se ramène in fine au jeu qui en a hérité le nom.
Au fil de deux volumes plus amples d’une bonne centaine de pages que les précédents, Guillaume Chamanadjian et Claire Duvivier avaient la lourde de tâche de conclure leurs trilogies respectives, tout en les entremêlant juste ce qu’il faut. Délaissant donc en partie les décors grouillants de vie de Gemina ou ceux, moins accueillants, de Dehaven, pour aborder d’autres horizons, les deux auteurs en profitent pour approfondir leurs personnages et leurs relations, sans oublier de lever le voile sur les mystères… et, aussi, de conclure de façon satisfaisante tous les fils d’intrigue laissés en suspens. Si les deux romans semblent chacun marquer le pas dans leur première moitié, la suite se révèle difficile à lâcher dès lors que l’on s’éloigne de la Tour de garde et que les événements se mettent en branle. Questionnant le pouvoir des histoires, celles que l’on se raconte, celles qui nous racontent, Les Contes suspendus s’avère une conclusion à la hauteur des deux premiers volumes. Porté par une héroïne touchante dans sa gaucherie, L’Armée fantoche parachève l’ensemble avec brio.
À l’issue de cette conclusion reste donc une grande interrogation : que Guillaume Chamanadjian et Claire Duvivier nous réservent-ils pour la suite ?
Impatients nous sommes…