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Les Hurleuses

Les Hurleuses est la première partie du diptyque « Vaisseau d’Arcane », qui se déroule dans le même univers qu’Engrenages et sortilèges, roman d’Adrien Tomas YA paru chez Rageot. Celui-ci se destine cette fois aux adultes et se place dans un autre coin de ce monde. En termes de genre, Les Hurleuses relève de l’Arcanepunk / Fantasy industrielle mélangeant technologie et magie, la première étant alimentée par la seconde (l’arcanicité remplace l’électricité). En effet, la magie peut se présenter sous forme solide ou liquide, pouvant notamment frapper quelqu’un pris sous un « orage de mana » et le transformer en « Touché », individu dont la personnalité et l’intelligence sont quasiment annihilées mais qui, contrairement à un mage classique, a accès à des réserves d’énergie surnaturelle illimitées, utilisées pour alimenter trains, canons à rayons et autres ascenseurs à lévitation. La magie a de plus des effets mutagènes, transformant des essaims d’insectes en intelligences de groupe ou les poissons des abysses en une civilisation hautement évoluée, qui explore la surface via des aéroscaphes mécaniques. On comprendra donc que les villes humaines soient sous dômes !

L’intrigue nous fait suivre Sof, une infirmière qui cherche à soustraire Solal, son frère qui vient juste de devenir un Touché, du sort de centrale énergétique vivante qu’impose le gouvernement, tandis que Nym, Opérateur (assassin) jadis au service de ce dernier, cherche à les retrouver, alors qu’il vient de décider de trahir et est lui-même poursuivi par ses anciens collègues. Le roman nous emmène aussi sur les premiers pas de l’ambassadeur Gabba Do du peuple des Profonds… pardon, des Poissons-crânes. Le tout alors que la guerre menace sur deux fronts, d’un côté avec les orcs (qui sont verts car partiellement autotrophes grâce à la chlorophylle), de l’autre avec l’ancienne puissance colonisatrice, la république isocratique (comprenez : Communiste) de Tovkie.

Au début, on croit deviner dans Les Hurleuses un classique pamphlet pro-écologiste, anti-industrialisation, anti-préjugés (ici envers les orcs), dénonçant une oligarchie vaguement déguisée en démocratie, les assassinats commandités par l’État, les collusions entre les officiels et les industries (armement, minières), les méfaits du capitalisme débridé, le musellement (ou pire) des intellectuels, journalistes, opposants et syndicalistes, avec en point d’orgue « l’ isocratisme, c’est le Bien ». Sauf qu’on finit par s’apercevoir que le propos d’Adrien Tomas est considérablement plus nuancé et subtil que cela. Et que de toute façon, l’univers (même si les races tolkieniennes végétales ou celles mutées par magie ne sont pas originales, juste assez inhabituelles), les personnages, les dialogues, le style, et surtout un scénario remarquablement astucieux compensent largement ce qui aurait pu être une maladresse. Et de toute façon, comment résister à un roman mettant en vedette la gougère à la méduse ? Vivement la suite !

La Chose

Approchez… Plus près… Installez-vous confortablement au coin du feu et venez lire cette histoire terrifiante… Laquelle ? Vous la connaissez, voyons… Celle de l’expédition partie au pôle Sud et qui n’est jamais revenue : hommes et chiens confrontés à l’inconnue, à l’horreur radicale. John Carpenter vous l’a déjà racontée en 1982 dans The Thing, à moins que ce ne soit la version de 1951 de Christian Nyby, The Thing from Another World… Ici, revenez à la source et découvrez la toute première version de l’histoire : La Chose, signée par John W. Campbell sous le pseudonyme de Don A. Stuart en 1938 dans les pages de son magazine, Astounding. Un récit culte. Séminale s’il en est. Une pierre de touche dans l’histoire de la SF mondiale.

Délicieusement rétro avec ses grands gaillards adultes parlant de « zoziaux  » ou son poêle à charbon pour chauffer la base, La Chose est finalement très moderne dans son histoire. Et si la lecture superpose les images des films aux mots du texte (l’adaptation de Carpenter s’avérant très fidèle), elle apporte également sa propre scénographie. L’origine extraterrestre de la chose est détaillée, son vaisseau localisé, et son apparence initiale présentée. Le tour de force opère : que le lecteur connaisse par cœur l’histoire qui va se dérouler au fil des pages ou qu’il la découvre complètement, la tension montera petit à petit, jusqu’au climax final. Même si celui-ci est, par une belle pirouette, plus optimiste que les films, et finit par un beau cadeau scientifique pour l’humanité. Si un récit a mérité le nom de la collection qui le publie, c’est bien celui-ci : dès les trois premiers mots, impossible de le lâcher. D’autant que le texte est suffisamment ancien et court pour que l’auteur n’ait pas eu le temps d’exposer ses théories les plus nauséabondes sur l’esclavage, le racisme, les femmes ou la sexualité. Autant en profiter sans remords ni mauvaise conscience, donc.

Le livre terminé, il reste tout de même une question : comment diable des vaches ont-elles été acheminées dans le sous-sol de l’Antarctique pour répondre aux besoins en viande et en lait des scientifiques américains ? (1)

Note
(1). Par bateau, comme tout le reste, ainsi que l’a fait l’amiral Byrd en 1933 avec trois têtes de bétail qui seront même ramenées aux États-Unis en 1935, ce dont Campbell, curieux et documenté, avait forcément connaissance [NdPPD]

Eau douce

Que se passe-t-il quand un enfant grandit dans le ventre de sa mère ? Pour les Igbo, il est encore en contact avec les esprits qui décident de son destin. Mais le portail est censé se fermer le jour de la naissance.

Ada, elle, n’a pas eu cette chance : la porte est restée ouverte, et elle est désormais ?gbanje, habitée par les esprits qui n’ont pas réussi à quitter son corps avant la naissance.

Elle grandit au Nigeria dans une famille divisée, en ignorant cette possession. Jusqu’à son départ pour des études aux États-Unis, et à l’agression violente qu’elle subit là-bas, qui déclenche sa « renaissance  ». Désormais, elle partage sa vie avec les êtres qui habitent son âme, chambre de marbre censée être inviolable. Tiraillés entre l’émerveillement d’être chair, et l’appel insistant des « frèresœurs », ceux qui sont restés dans l’obscurité de l’autre côté, les esprits prennent parfois le contrôle de son corps, comme As?ghara, la bête, qui gère tout contact charnel, ou Saint Vincent, qui offre une autre alternative à l’Ada, « en suspension, entre ces concepts inadaptés de masculin et de féminin ». Car comme le disent si bien les voix, les « nous », qui protègent l’Ada de l’intérieur, pour lui éviter de trop souffrir : « beaucoup de choses sont préférables à une souvenance totale. »

Sans fard, mais gardant néanmoins toujours une certaine pudeur sur les agressions vécues, qui se devinent, et se dévoilent peu à peu pour être enfin écrites dans la dernière partie du livre, ce récit en partie autobiographique exprime avec brio le terrible parcours des troubles de la personnalité, et des traumatismes qui ont pu les déclencher.

Jouant parfois avec le fantastique par la multiplicité des personnalités mythologiques et divins qui s’y expriment, ces narrateurs si différents, l’histoire retrace surtout avec force et intimité le parcours d’une vie fracassée, et le coût de la survie, ses années passées à se chercher, et à tenter de recoller les morceaux éparpillés dont on n’avait pas conscience ni connaissance. Car comment réparer ce qui est dévasté ? Comment avancer, quand seule la déshumanisation permet de continuer ? Les émotions sont précises, et la sincérité visible derrière chaque voix, chaque moment de la vie de… de qui d’ailleurs ? Chaque voix, à sa façon est unique, et le patchwork dessiné est fascinant, dans ses détails ou dans son ensemble.

Le fantastique n’est qu’esquissé, à travers le doute entre folie ou la foi dans la cosmologie igbo ou chrétienne, est sert surtout de passerelle vers la construction d’un nouvel être, qui sera la somme de tous les autres, et de toutes ses expériences, charnelles, divines, mystiques, qui forment, malgré tout, l’humain.

“À dos de crocodile” dans la Yozone

« À dos de crocodile est un concentré de science-fiction de haut vol, celle du vertige explorant un avenir très lointain et si différent de notre présent. L’humain a toujours besoin de défis pour alimenter son envie d’aller plus loin, les extraterrestres sont une réalité, la science a progressé à bonds de géant… mais l’univers conserve toujours une part de mystère, donc de magie. » La Yozone

“Vision aveugle” : la couverture

Sur le forum, découvrez la couverture, signée Manchu, de la réédition de Vision aveugle de Peter Watts ! Le roman, augmenté d'une préface et d'une nouvelle inédites ainsi que d'illustrations intérieures, sortira le 23 septembre.

“La Course aux étoiles” dans la Yozone

« Lire un épisode de « Capitaine Futur » revient à s’injecter une bonne dose de sense of wonder, et pas besoin d’aiguille pour ça ! Et les effets sont notables : évasion garantie avec oubli de la morosité ambiante, sans oublier le rajeunissement à la clé. La course aux étoiles, c’est le space opera dans toute sa splendeur, celui des débuts où aucune limite n’existait. Plein gaz ! » La Yozone

Bifrost 103 : en librairie !

Consacré à l'indispensable Sylvie Denis, le Bifrost 103 est désormais officiellement disponible, en papier comme en numérique, dans toutes les bonnes librairies et sur belial.fr !

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