Ysabel
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Les Marriner, père et fils, Canadiens bon teint (câlisse !), séjournent à Aix-en-Provence. Photographe professionnel, Edward tire le portrait des lieux pendant que son fils, Ned, tue le temps entre deux prises en faisant son jogging ou en approfondissant sa connaissance du pays. Pour son bonheur, la région fourmille de monuments anciens à découvrir, histoire de finir moins bête. Pour son malheur, il se découvre un talent pour sentir les événements passés. Alors qu’il visite la cathédrale d’Aix en compagnie d’une jeune touriste américaine rencontrée sur place, il assiste à une scène inquiétante qui l’interpelle (tabarnak !). Progressivement, de spectateur, il devient l’acteur d’un drame trouvant son origine dans l’Antiquité, autour des colonisations grecque et romaine. De quoi meubler la monotonie des vacances…
Entamons cette chronique par une précaution oratoire. Que les fans de Guy Gavriel Kay rengainent leurs armes, ce qui va suivre risque fort de leur déplaire. En dépit d’un prix (World Fantasy Award en 2008) et d’une ribambelle de critiques élogieuses outre-Atlantique, Ysabel se révèle, hélas, un roman poussif et médiocre n’offrant guère de surprises. L’auteur canadien délaye sur près de cinq cents pages une intrigue qui aurait pu tenir sur une centaine, contraignant le chroniqueur à sauter des passages entiers pour éviter de s’assoupir.
Avec Ysabel, Guy Gavriel Kay renoue avec la Provence, région qui avait déjà servi de décor pour La Chanson d’Arbonne. Délaissant la fantasy historique, sous-genre dans lequel il s’est taillé une solide réputation, il opte ici pour un récit contemporain saupoudré d’une touche de fantastique. À bien des égards, le roman s’apparente à une déclaration d’amour pour les environs d’Aix-en-Provence. Les Baux, Arles, Fontaine-de-Vaucluse, la Montagne Sainte-Victoire, l’oppidum d’Entremont servent de toile de fond à un récit puisant ses ressorts dans les mythes celtes. Hélas, on est bien loin de l’ampleur et de l’émotion des Lions d’Al-Rassan ou de Tigane. L’intrigue pointe même aux abonnés absents, se contentant d’un minimum où les références à l’Histoire se trouvent réduites à une notule digne de figurer dans un guide pour touristes pressés. À vrai dire, on s’ennuie beaucoup du rythme paresseux du récit et de sa légèreté dépourvue de toute tension dramatique. Et ne parlons même pas des échanges dont les lourdes saillies ne contribuent qu’à engluer les situations dans une impression de dilettantisme, voire de je-m’en-foutisme. Quant au personnage principal, le jeune Ned, son caractère falot et ses atermoiements agaçants plombent le récit, contribuant à donner l’impression de lire un roman d’apprentissage en pantoufles.
Bref, avec cette histoire de triangle amoureux mâtinée de magie celtique, Guy Gavriel Kay réussit le tour de force d’être complètement transparent (et ne parlons pas de la traduction…). À fuir pour ne pas être dégoûté de l’auteur.